Ils ont tout, le Président de la République, la présidence des deux Assemblées, le gouvernement, la majorité des Conseils Généraux (une soixantaine), 24 régions, la mairie dans quelques grandes villes, Lille, Lyon, Paris, Toulouse, Grenoble ... et pourquoi faire?
Nous traversons une "déconfiture" du pouvoir politique, que Mauduit nomme «étrange capitulation». Alors que la «gauche» a tous les pouvoirs, détient la majorité dans le pays, à quoi ça peut bien servir si cette «gauche» se comporte comme s'il fallait s’accommoder d'un rapport de forces hostile. En face le parti du pouvoir de la Sarkozie balance entre une droite «décomplexée» et une droite classique et bien déterminée à la revanche. En face une extrême-droite faisant feu de tout bois, prête à prendre les restes de Copé, à convaincre les indécis de Fillon et à rentabiliser le nouveau profil d'une Le Pen, la fille et investissant sur la petite-fille dont le PS a facilité l'élection.
A sa gauche, le pouvoir en place dans tout le pays, n'a pas su ou voulu l'intégrer, l'insérer dans la dynamique d'un changement attendu et conquis par une majorité d'électeurs. Les Verts sont au gouvernement, faute d'être ailleurs ou plus exactement, ils ont l'air de ne pas savoir où se mettre. Les communistes essayant de recoller les morceaux d'une histoire glorieuse mais révolue, avec un tribun, ex-sénateur PS, cherchant par un discours enflammé à se positionner comme le premier des opposants, le plus virulent, le plus en fougue, le plus coléreux.
Et ceux qui détiennent tous les pouvoirs tergiversent, font comme si les «promesses» mais surtout leur programme pouvait attendre. Ils me font penser à la remarque du Canard Enchainé, dans les années 30 (sauf erreur!?) «ils aiment tellement leur programme, qu'ils n'osent pas y toucher».
Deux ou trois exemples, entre autres, me sidèrent. Le cumul des mandats, mesure indispensable pour assainir bien modestement le paysage politique, renvoyée aux calendes grecques via la commission Jospin-Bachelot ; la mise au pas du pouvoir bancaire et financier, avec quelques rustines bien en deçà des besoins et des dires du candidat; la réforme timide du Conseil Supérieur de la Magistrature malgré la présence d'un des ministres qui me semble sortir du lot, Mme Taubira; l'éducation dont la première annonce a été de prolonger de deux jours les vacances scolaires de la Toussaint 2012. Les hésitations sur le «Partenariat-Public-Privé» qu'on pourrait traduire par «Profit Privé aux dépens du Public». Sans compter les mesures ou plutôt son absence concernant l'environnement. En attendant, sur cette question M. Hulot devient envoyé spécial du Président, Mme Joly se propose de manifester dans la rue et les ministres verts, le sont peut-être mais de «rage»!
Tout en privilégiant une austérité qu'eux-mêmes disent «cette politique d'austérité conduit à la débâcle»!
A quoi bon une Majorité partout? ... nous nous sommes battus pour faire partir le clan de la Sarkozie et d'un Président excité, méprisant, armé d'un bouclier pour défendre les privilèges en place, nous nous retrouvons avec un Président normal, comme tout le monde, menant des politiques qui ne tranchent pas véritablement avec les travers précédents, qu'il s'agisse de la politique de l’État ou des hommes, qu'ils s'appellent Guérini, Cahuzac ou Kucheida. Ce n'est sûrement pas la question d'un homme, mais c'est bien lui qui a incarné à un moment donné une perspective de changement et qui, finalement, devient l'exemple même de l'effondrement d'une volonté majoritaire.