ARTHUR PORTO (avatar)

ARTHUR PORTO

Abonné·e de Mediapart

846 Billets

2 Éditions

Billet de blog 12 juin 2013

ARTHUR PORTO (avatar)

ARTHUR PORTO

Abonné·e de Mediapart

Toujours la quinzaine: Henri, Rosette et Sombra!

Henri et RosetteC'est un café restau de quartier, où viennent les voisins et les travailleurs du coin. Petit café le matin, déjeuner à midi et une bière le soir. Quelque part en Belgique, du côté de Charleroi, pas bien joyeux. La Cantina s'ouvre, s'anime, grâce à la gaîté de la belle patronne Rita (Lio) et à la cuisine du patron, Henri (Pippo Delbono), jusqu'au jour où la patronne décède et leur fille suggère d'embaucher une «papillon» pour faire le service en salle.

ARTHUR PORTO (avatar)

ARTHUR PORTO

Abonné·e de Mediapart

Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

Henri et Rosette

C'est un café restau de quartier, où viennent les voisins et les travailleurs du coin. Petit café le matin, déjeuner à midi et une bière le soir. Quelque part en Belgique, du côté de Charleroi, pas bien joyeux. La Cantina s'ouvre, s'anime, grâce à la gaîté de la belle patronne Rita (Lio) et à la cuisine du patron, Henri (Pippo Delbono), jusqu'au jour où la patronne décède et leur fille suggère d'embaucher une «papillon» pour faire le service en salle.

Une papillon c'est le nom qu'on donne aux pensionnaires de la maison des handicapés pas loin du bistrot. Il suffit de traverser la passerelle, longue et avec des zig et des zag, bien dans la symbolique de ce qui relie. En France les «papillons blancs» sont issus des associations de soutien aux parents et amis de personnes handicapées mentales, en créant notamment des établissements d'accueil.

Et la papillon, Rosette (interprétée par Candy Ming), va progressivement y faire sa place, entre le taciturne Henri, et ses potes Bibi et René (Jackie Berroyer et Simon André), joyeux et parfois tristes comparses de beuverie et de réflexions autour de leur passion commune, la colombophilie (magnifique lâché de pigeons-voyageurs avec Rosette en liberté, presque volant...). Elle que rêve d'être comme tout le monde, en liberté et éprise d'amour.

Mais pour l'extérieur ce qui s'y vit, ce qu'elle fantasme, ce qui se joue, n'est pas bien normal,  il y a même des soupçons (et on ne fait pas ça avec des handicapés...). En colère, Henri décide de partir, de tout envoyer balancer, d'aller vers la mer. Rosette plus autonome que ce qu'on en pense, cachée dans la voiture elle va faire partie du voyage, jusqu'au bout de ce qui est possible pour eux de vivre.

Et c'est là qu'on est admiratif de cette force de la réalisatrice, Yolande Moreau, qui va les prendre au sérieux eux, qui n'ont pas les clés, comme elle le dit, pour vivre dans cette société peu tolérante envers la différence, le handicape! Peu de fois, une maison pour des gens pas comme les autres a été filmée avec autant de respect, de simplicité, d'empathie, disons comme la maison des autres, comme la nôtre!

A la séance de présentation au Forum des Images, Yolande Moreau nous a rempli d'humanité et d'humour pour nous parler de ce film qui a mis tant de temps à se faire, partageant avec le public son engagement à raconter simplement une histoire, traversée par l'émigration italienne et par son regard sur les profils singuliers que son film nous fait découvrir.

La sortie en salle est prévue pour le 4 décembre 2013. Notez-le sur votre agenda car la rencontre avec Henri et Rosette (deux interprétations bien en harmonie avec ces rôles dans les marges de la vie) vous apportera un beau moment de cinéma et Yolande Moreau mérite bien notre présence.

Até ver a luz, Après la nuit

La séance du dernier samedi de la Quinzaine des réalisateurs au Forum des images, du film de Basilio Da Cunha, n'avait pas beaucoup de spectateurs, mais les jeunes cap-verdiens de Paris étaient nombreux. Pour cette séance il n'y a pas eu de présentation comme à l'accoutumée et c'est peut-être une opportunité manquée pour parler de cinéma et donner à connaître et à voir à des jeunes qui ne fréquentent pas ce lieu qui aime le cinéma et sait le faire aimer.

Entre la fiction et le documentaire, Até ver a luz (titre en français Après la nuit) est un film d'un jeune cinéaste luso-suisse habitué de la Quinzaine où il avait présenté des courts dont Nuvem-o peixe lua (Nuage-le poisson lune) en 2011.

Dans ce premier long-métrage, Basilio Da Cunha nous raconte l'histoire de Sombra (Ombre). Un jeune dealer qui sort de prison et va rejoindre le milieu qu'il avait quitté, confronté à nouveau aux dettes. Celle qu'on lui doit et celle qu'on lui réclame. Tourné dans le quartier de Reboleira, Amadora, dans la banlieue de Lisbonne, qu'on ne voit pas, le filme se déroule toujours la nuit. Sombra (Pedro Ferreira) comme son compagnon un petit iguane, n'est jamais à la lumière du jour (até ver a luz on pourrait le traduire jusqu'à la lumière...). Son film nous accroche par sa façon de nous amener dans ce bas-fond de la ville blanche, suivre le personnage principal dans ses refuges, ses amitiés, ses pièges qui le prennent pour le châtier voir le faire disparaître. Il nous a manqué, me semble-t-il, davantage de référence autour de Sombra.

Les personnages ne se posent jamais, circulent, s'invectivent en permanence et c'est peut-être ainsi que leur présent suggère leur devenir. Sombra voulait que les choses se déroulent autrement et semble aux prises avec ce monde dont on ne peut s’échapper. Il essaye, confie l'iguane à sa petite voisine ainsi que sa montre pour payer la pension, finit par voir le sorcier recommandé avec insistance par sa tante, écoute sans toujours le comprendre son ami, un peu philosophe,  qui lui veut du bien et veut qu'il vienne vivre à la lumière du jour... sans réussir à l'y amener.

Sans proposition pour en parler, les jeunes présents à la projection se sont levés dès le début du générique sans qu'on puisse connaître leur avis. Des réactions tout de même très joyeuses lors de certaines répliques en créole, pas évidentes sans doute à traduire.

Présenté par le réalisateur dans un lycée, en classe de seconde en mai dernier, un participant commente ce débat, «nous avons appris qu'il recrute ses acteurs dans son entourage d'amis. Ici ce sont les habitants d'un quartier de Lisbonne. De plus, ils ne jouent pas un rôle imposé puisque qu'ils racontent leur propre histoire, ce qui est plutôt surprenant. Il réalise une fiction, à partir de la réalité, qui se rapproche alors d'un documentaire […] Je trouve que ce film est passionnant car il permet de dévoiler les faces cachés du Portugal qui est surtout connu pour son tourisme. De plus cela permet de découvrir la culture créole qui est complètement différente de la culture portugaise».

Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.