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Billet de blog 12 juin 2024

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Macron, ‘‘le coup d'état de tension permanente’’

Nous pourrions dire aussi ‘‘le coup de com’ permanent’’, ‘‘le coup de la manœuvre permanente’’, ‘‘le coup de la torpille permanente’’... ou encore d’autres mots comme ‘‘machiavélisme, cynisme, mépris permanent...’’ Tant son ‘‘septennat’’, déjà 5+2, a contribué au clivage de la société française, à la montée du F-N/Rassemblement-National, qui constituent deux de ses réussites !

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"Le coup de tension permanente"

Il faut dire qu’il avait tout fait pour que ce scénario soit possible. Outre les leurres du ‘‘faire barrage’’ de 2017 et 2022, suggérer un débat entre lui et Marine Le Pen ou ordonner à son boy-premier-ministre de débattre avec Bardella à la place de la candidate macroniste, il a nourri l’opinion sur le seul vote qui vaille, en désignant celui qui serait son ‘‘vrai’’ adversaire. Largement discrédité, un vote protestataire s’imposait et plus de 7,7 millions de voix l’ont exprimé clairement. (Si on ajoute aux 7 765 946 de Bardella, les 1 353 127 de Maréchal-Le Pen, les 582 894 des chasseurs et les 229 187 de Philippot, on arrive à 9 millions 931 mil 154 votes estampillés extrême-droite...).

Nous pouvons jeter un œil en arrière sur les récentes décisions de la Macronie, la réforme des retraites refusée par la majorité de la population et imposée par le 49.3, et constater la similitude des votants de la loi de l’immigration rassemblant la Macronie, la droite dite de gouvernement et celle, plus radicale qui y aspire. On peut y ajouter l’action de son ministre de la police celui qui déclarait qu’il voulait ‘‘rendre la vie impossible’’ à des femmes et des hommes migrants en France.

Ce ministre de l’intérieur, qui cajole depuis longtemps le syndicat de la police, d’un côté en suivant leurs desiderata, en imposant une certaine impunité sur des violences policières et en désignant et criminalisant les manifestations et les opposants à la politique gouvernementale notamment en matière sociale mais aussi écologique et économique. Les troupes LePenistes y trouvent, d’ores et déjà, matière pour leurs futurs décisions.

Et c’est cette police dont Macron a besoin pour casser les oppositions, Darmanin y veille et déjà en 2015, 51,5 % des policiers et gendarmes avaient voté FN.

De même qu’il a besoin d’un ministre de la justice qui fustige les Magistrats. Ce n’est pas banal d’entendre hier Dupont-Moretti brandir le risque qu’un gouvernement RN s'en prenne à l’indépendance des magistrats et voire ici la décision du Tribunal de Nanterre...les-ecoterroristes-lamende. où on constate que parfois cette ‘‘indépendance’’ est déjà bien minée.

Il y a également dans sa décision quelque chose à voir avec le comportement capricieux de celui qui n’a pas été suivi. Punir ceux qui n’ont pas accepté ce qu’il avait ordonné. Attitude qui souligne son manque de maturité aussi bien politique qu’humaine. Aussi bien le mépris envers ses propres ministres d'une décision prise pour prendre le pays par le "buzz" des journaux télévisés. Outre le coup stratégique d’une dissolution du fait du score du FN-RN, avec une élection qui confirmerait le vote pour les européennes et l’obligation d’une cohabitation avec les LePenistes. La refusant, il démissionne et, par les astuces de la loi, essaierait de se candidater à un deuxième-troisième mandat, devenant ainsi le "résistant" qui s'est levé contre l’extrême-droite.

Une dissolution pour affirmer sa toute puissance

A l’évidence, cette dissolution sert au Président pour déplacer le focus en banalisant le résultat de sa candidate (moins de la moitié de Bardella) et évoquant surtout la dissolution dont tout le monde en parle. Fixer les élections dans un délai si-court c’est aussi empêcher que les oppositions s’organisent, aussi bien à droite qu’à gauche. Et si la droite saisira l’opportunité pour flirter, même plus car il y a des affinités, avec les LePenistes, la gauche est bien en difficulté pour trouver un accord qui puisse rassembler toutes les nuances qui se réclament de la justice sociale et d’un engagement écologique durable qui sont, entre autres, les valeurs de la gauche.

Et s’il y a risque, et il y a risque, ce n’est pas pour Macron dont le poste n’est pas en jeu, c’est pour ses députés (envoyés à l’abattoir...)  qui lui ont servi de paravent pour toutes ses réformes qui progressivement ont contribué à accélérer le démantèlement du service public et à répondre aux exigences du pouvoir économique et des directives de la FNSEA.

Et c’est aussi un risque pour le pays, pour celles et ceux qui s’engagent dans le combat pour une société plus juste, plus égalitaire, plus démocratique. L’arrivée en tête de l’extrême-droite aux législatives, après les européennes, c’est la déroute de tous les combats et acquis sociaux, c’est la débâcle de la démocratie, c’est le démantèlement du service public. Et on sait que sous les quinquennats de Macron ce chemin a déjà commencé à être emprunté.

Mais si l’urgence est d’empêcher l’arrivée des nationaux-populistes au pouvoir, notre engagement est aussi dans l’opposition déterminée au pouvoir que Macron représente. Ce pouvoir qui a, en quelque sorte ‘‘aidé’’ à l’avènement d’une extrême-droite dédiabolisée et sans tabou.

D’où l’urgence d’un ‘‘Front Populaire’’ qui nous est nécessaire, indispensable. Et l’initiative de François Ruffin est bien plus qu’une chance, c’est une opportunité de rassemblement pour un combat qui ne peut pas exclure ni les moins politisés ni les plus radicaux, et sans faire de tri cher à certains ‘‘propriétaires de la politique de gauche’’. Bannissons les slogans d’auto-satisfaction et d'affirmation sans nuances qu’on entend souvent : ‘‘plus à gauche que moi tu meurs’’.

merci Juin pour ce dessin (in Charlie Hebdo mars 2024)

* Un très court signe de joie de ce 9 juin. Au Portugal, en mars dernier les nationalistes-populistes, du parti Chega ! (Assez!) ont réussi un score de 18,07% de votes aux élections legislatives. Dimanche dernier leur score était de 9,82%, sensiblement la moitié. Un petit soulagement même si, là aussi, le risque "de la peste brune" reste bien présent.

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