Les magistrats ont suspendu la décision implicite du gouvernement de Gabriel Attal, le 26 juillet, de « refuser la délivrance de l’agrément sollicité par Anticor » en janvier dernier.
Le premier ministre est ainsi mis en demeure, par le juge des référés, de « réexaminer la demande d’agrément de l’association Anticor, en tenant compte des motifs de la présente ordonnance, dans un délai de quinze jours à compter de la notification de cette ordonnance ».
Trois lettres d'Anticor restées sans réponse
Le président d’Anticor, Paul Cassia a écrit à trois reprises au premier ministre depuis le 13 juin, sans jamais obtenir de réponse. Le 25 juin notamment il était demandé au premier ministre :
‘‘Aussi, vu la configuration soudaine née de la dissolution de l’Assemblée nationale le 9 juin et la date butoir pour nos institutions nationales qu’est devenue celle du 7 juillet, je vous redemande à la suite de mon courriel du 13 juin dernier ci-dessous resté sans réponse, au nom des 20 autres membres du conseil d’administration et des 7 200 adhérents et adhérentes de l’association, de nous ré-accorder avant cette date un agrément anticorruption que nous n’aurions jamais dû perdre ni à plus forte raison avoir à quémander’’. Pas de réponse.
Par un dernier courrier, daté du 3 juillet, l’Association rappelle, ‘‘Comme vous le savez, avec la loi n° 2013-117 du 6 décembre 2013 relative à la lutte contre la fraude fiscale, le législateur a entendu consacrer le rôle des associations qui luttent contre la corruption en prévoyant un mécanisme d’agrément ; ainsi qu’il est écrit dans les travaux préparatoires à la loi, « le projet de loi consacre le rôle déterminant que les associations de lutte contre la corruption jouent déjà aujourd’hui et joueront plus encore demain, grâce à la faculté d’ester en justice qui leur est ouverte, dans la lutte contre ce fléau qu’est la corruption ».
‘‘Cette intention du législateur sur le « rôle déterminant » d’Anticor, qui avait onze ans d’existence en 2013 et était déjà un acteur majeur de la lutte citoyenne en faveur de l’éthique publique, doit guider la décision ministérielle dans le processus décisionnel sur nos demandes d’agrément.
‘‘...L’exemplarité dont Anticor fait preuve devrait vous conduire, tant qu’il en est encore temps, à nous redonner l’agrément anticorruption que nous ne devrions de toute évidence ni avoir perdu, ni avoir à quémander... Nous vous demandons, une ultime fois, que ce jour arrive cette semaine, avant le dimanche 7 juillet 2024’’.
Pas encore une victoire... mais un sursaut démocratique
Cette décision n’accorde pas l’agrément à Anticor. Cette décision ne juge pas sur le fond le dossier Anticor.
Cette décision souligne que ce gouvernement, à la suite d’autres, ignore superbement toute interpellation qui puisse venir questionner sa toute puissance et surtout son appropriation et utilisation du droit pour ne pas ‘‘déranger’’ son pouvoir. Et on le comprend aisément, le garde des Sceaux est obligé de se déporter car mis en cause par la justice, la ministre de la culture a été nommée alors qu’une procédure judiciaire était en cours, ou que le bras droit du président, secrétaire général de l'Élysée, est ‘‘mis en examen pour prise illégale d'intérêts’’... que des exemples significatifs de l'éthique de ce pouvoir.
Il semble clair que le premier-ministre et ses ministres-démissionnaires ou le président-non-démissionnaire cherchent à avoir la peau d’Anticor (créée en 2002 par le juge Eric Halphen et l'attachée parlementaire Séverine Tessier, comme un sursaut au lepenisme). Anticor et ses adhérents ne sont pas dupes de la volonté gouvernementale de se passer d’éthique ou de la lutte contre la corruption... M. Kholer en assure une "surveillance étroite" (La Lettre 6 fév 2024)!
En attendant, on peut toujours visiter son site et, peut-être même y adhérer : https://portail.anticor.org/fr/adherer
Dépêche AFP...
Première « victoire » pour Anticor dans sa bataille pour retrouver l’agrément qui lui permet d’intervenir en justice: le tribunal administratif de Paris a suspendu le refus implicite du gouvernement de lui renouveler cette autorisation et lui a enjoint de réexaminer la demande de l’association anticorruption. mediapart.fr/journal/fil-dactualites/120824/l-association-anticor-obtient-de-la-justice-le-reexamen-de-sa-demande-d-agrement-par-le-gouvernem