Pour les «soutiers» de la France!
«Il n'est jamais trop tard pour bien faire», «mieux vaut tard que jamais», commentaires de mon gardien, pas très versé en politique, mais qui sort à chaque événement le petit livre rouge de proverbes de sa grand-mère espagnole, internée enfant au camp du Vernet dans l'Ariège en 1939.
Bon connaisseur et voisin de la Porte Dorée (dans le 12ème) la venue du Président au Musée de l'histoire de l'Immigration ne lui a pas échappé. Il faut dire qu'ils étaient nombreux, un Président et trois ministres, plus les assesseurs, familles des assesseurs, copains des assesseurs, et quelques autres qu'on voit dans les gazettes.
Je serais tenté de dire avec mon gardien à propos du discours présidentiel. Cependant, la sagesse populaire des proverbes et dictons a ses limites. Et autant ce discours volontaire et juste, par bien des aspects, avait sa pertinence dans la foulée de mai 2012, autant aujourd'hui ressemble davantage à des « paroles verbales », qu'au désir d'engager des véritables transformations, par ailleurs impossibles à mettre en place à l'heure actuelle faute de majorité politique.

dessin de Plantu, présenté dans une exposition pour la Paix
La mesure phare du vote des étrangers, aurait été possible quand le Président disposait de la majorité au Sénat et à l'Assemblée et surtout la légitimité d'une nouvelle majorité dans la continuité de l'élan de la victoire. Cette décision aurait été plus que symbolique car elle suggérait, outre une position claire et cohérente, que les discours racistes et discriminatoires de certains élus soient autrement mesurés. C'est que les étrangers, dans leurs communes auraient un droit de vote et la possibilité, par leur acte électorale de rappeler aux candidats la dignité de chaque citoyen, égale en droits et devoirs. Le dire aujourd'hui, même au Musée de l'histoire de l'immigration, presque à voix basse, c'est surtout affirmer l'impuissance d'une telle réforme car les "autres" (droites dans les diverses versions et extrême droite) s'y opposeront.
Soulignons également, même si 'il n'était pas le lieu pour cette démonstration, que «si l'immigration vaut bien un discours», les actes répressifs qui n'ont pas varié fondamentalement depuis la Sarkozie, restent des mesures toujours en application. Parler de l'immigration c'est aussi parler du monde et surtout de l'engagement à soutenir le développement des pays d'origine des migrants. La sous-ministre de la Coopération (et de la francophonie) aurait pu y être présente si cette dimension mobilisait les autorités de l’État.
S'il reste importante que des paroles précises et engagées soient dites, quelque soit les propos extrêmes des droites, (certaines du soutien d'une majoritaire hostile dont l'Allemagne nous donne l'exemple actuellement), l'effet et la pertinence mobilisatrice de son discours lui font défaut. Comme si affirmer une volonté politique forte, quand elle ne peut plus s'exercer, renvoyait à l'autre la responsabilité, faute d'avoir assumée la sienne.
Le Président a annoncé des mesures pas chères. Une rallonge importante du budget pour les années à venir qui permettront, espérons-le, au nouveau directeur Bernard Stora de donner une impulsion à ce Musée dont il a la légitimité pour le diriger. L'autre, plus que juste et nécessaire, l'ouverture du droit à la nationalité française des vieux travailleurs immigrés, ayant plus de vingt cinq ans de travail et un enfant français. Rendant ainsi hommage et reconnaissance, là aussi bien tard, à ce qu'on appelle les "chibanis". Mais l'immigration a besoin de plus qu'un Musée, elle a besoin que des guichets s'ouvrent partout, dans l'esprit du discours de la Porte Dorée!