L’ancien élève, originaire du Cameroun envoyé en France et à Bétharram par ses parents qui espéraient que là il pourrait faire des études brillantes, retrace dans son témoignage les violences subies dès son arrivée à Bétharram, sexuelles, gifles, injures racistes.
Sans trop comprendre ce qui lui arrive, craignant la réaction de ses parents s’il critique l’école ou ses professeurs, Némès dit qu’après le bac c’est comme s’il sortait de prison et trouvait la liberté.
Mais dans ces conditions sa liberté devient vite un ‘‘enfermement’’ dans des fréquentations et des habitudes marginales, des consommations qui vont l’enfoncer dans des pratiques négatives pour trouver une autre voie que celle des ‘‘études brillantes’’ auxquelles il était destiné.
Les violences qui lui ont été faites sont ‘‘prescrites’’ et seulement un courrier de l’église, reçu il y a peu, lui reconnaît les abus dont il a été victime. C’est son récit des violences et les conséquences de ces actes dans l’austère mais ‘‘bien réputé’’ Bétharram qui m’a incité à faire ce billet de colère car ce sont vraiment des "criminels"! /ici/affaire-betharram-bayrou-la-mecanique-du-silence
Collectif des victimes
Le porte-parole du collectif des victimes, Alain Esquerre qualifie le dossier de « tentaculaire », et avec de nombreux anciens-élèves il a été reçu par le procureur de Pau et a exhorté «ceux qui sont isolés dans leur coin, qui revivent leurs traumas et qui sont terrifiés» à se joindre au collectif des victimes. Et une des victimes présentes, Pascal Gélie l’a dit à la presse avant la rencontre ‘‘On ne peut plus dire à des victimes « C’est prescrit ». Ce n’est plus suffisant parce qu’elles peuvent être amnésiques traumatiques et avoir une remontée de leur trauma à un moment où le dossier est prescrit’’.
Le porte-parole des victimes a annoncé qu’il allait insister auprès du procureur de Pau, Rodolphe Jarry, sur ‘‘l’importance d’inclure l’institution Bétharram dans l’information judiciaire, pour interroger les responsabilités de l’établissement’’.
‘‘C’est une institution de salopards. Point. Et le mot est faible’’, c'est exclamé avant la rencontre Jean-Marie Delbos, 78 ans, victime d’un prêtre aujourd’hui nonagénaire qui avait été placé en garde à vue la semaine dernière mais a été relâché pour prescription.
D’autres collectifs d’anciens élèves disant avoir subi des violences physiques et sexuelles dans des établissements privés un peu partout en France, sont en train de se constituer.
Les spécialistes soulignent souvent les conséquences graves des violences sexuelles sur des enfants qui provoquent des traumatismes à long terme. Et les professionnels énumèrent la longue liste pour les victimes des «risques les plus importants de suicide, de développer des maladies cardio-vasculaires et respiratoires, du diabète, de l’obésité, des troubles psychiatriques, des addictions, des troubles du sommeil et de l’alimentation, de douleurs chroniques invalidantes…» Ce sont aussi des personnes plus vulnérables risquant de subir à nouveau des violences à l’âge adulte, ou d’en commettre.
Que l’actuel premier-ministre refuse de reconnaître que depuis longtemps il était au courant des violences ainsi infligées à des mineurs dans l’établissement qui lui est cher et en lien étroit avec sa famille (son épouse y était enseignante et ses enfants scolarisés) c’est grave et de nature à mettre un terme à ses fonctions. Qu’il devait démissionner cela va de soi mais, s’il a couverte ces agissements sa démission ne sera pas de son fait car son éthique et sa morale ne le lui imposeront jamais.
Mais ce qui me paraît le plus grave et qui devait mobiliser les citoyens et les mouvements politiques de gauche c’est l’exigence que l’état de droit s’impose, que les manquements complices et criminels soient démasqués et punis et surtout que les victimes (à tout jamais non ‘‘prescrites’’) soient accompagnées et soutenues. Mais aussi qu’un audit national soit mis en place sur l’enseignement privé en général.
La Croix annonçait il y a quatre jours que ‘‘Le collectif des victimes recense plus de 140 dénonciations pour des violences sur un demi-siècle, dont près de 70 d’ordre sexuel, des faits très souvent prescrits.’’(23/02/2025) Combien d’autres cas sont tus, pour le moment, par les victimes qui doutent et n’osent plus s’exprimer.
Depuis quelques mois l'actualité dans ce pays est, entre autres, faite de violences sexuelles sur des femmes, des enfants, l'affaire de Mazan, le procès en cour du pédocriminel Scouarnec, la révélation de Bétharram vient confirmer qu'il s'agit aussi d'une question urgente de santé publique.