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Billet de blog 24 février 2022

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EPR en construction à Flamanville : la suite du fiasco ?

Les 245 assemblages de combustible nucléaire neuf, acheminés par camion entre octobre 2020 et l’été 2021 depuis l’usine Framatome de Romans-sur-Isère, devront-ils être remplacés avant même d’être utilisés ?

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Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

La CRIIRAD avait révélé l’an dernier que les graves incidents qui ont affecté le réacteur EPR de la centrale de Taishan en Chine pouvaient concerner les autres EPR en construction dans le monde et en particulier celui construit par EDF à Flamanville (Flamanville 3).

Les industriels concernés et de nombreux instituts spécialisés cherchent à minimiser ce qui s’est produit à Taishan, insistant sur le fait que des ruptures de gaines de crayons de combustible avaient déjà affecté d’autres réacteurs. Mais les dommages subis par le combustible nucléaire du réacteur de Taishan 1 vont bien au-delà. Les informations transmises à la CRIIRAD par un lanceur d’alerte qui travaille dans l’industrie nucléaire indiquent que des vibrations très anormales ont affecté ce réacteur. Elles ont gravement endommagé la structure des assemblages, dont les grilles de maintien des crayons combustible. Ceci pose évidemment des problèmes de sûreté nucléaire et de radioprotection. Le réacteur Taishan 1 cumule déjà plus de 6 mois d’arrêt et il est probable qu’il ne puisse redémarrer avant plusieurs mois. Ces vibrations seraient dues en particulier à un défaut de conception générique affectant l’hydraulique dans la cuve des EPR.

Interrogée par la CRIIRAD le 27 novembre 2021 sur cette affaire et sur les conséquences pour l’EPR de Flamanville, l’ASN a indiqué le 15 décembre qu’elle ne disposait pas d’informations précises mais qu’elle n’autoriserait par le démarrage du réacteur de Flamanville 3 tant qu’EDF n’aura pas transmis un dossier technique sur le « retour d’expérience » Taishan.

En attendant, EDF s’efforce de banaliser les conséquences et de laisser croire que tout est sous contrôle. Dans un communiqué du 12 janvier 2022 concernant Flamanville 3, EDF indique de nouveaux retards mais ne traite pas explicitement la question des vibrations. Elle affirme notamment que « L’ensemble des assemblages qui seront exploités dans le premier cycle de fonctionnement du réacteur est stocké dans le bâtiment combustible ».

Or, selon les informations transmises à la CRIIRAD, EDF aurait commandé à Framatome un nouveau combustible incluant des grilles renforcées (permettant de mieux supporter les vibrations), mais aussi une modification de l’alliage M5 utilisé pour les gaines (afin de tenter de résoudre des problèmes de corrosion). Elle devrait remplacer les assemblages neufs, déjà présents sur site et qui ne seraient donc jamais utilisés. Mettre ainsi pratiquement au rebut un cœur neuf de réacteur nucléaire pourrait représenter un coût de l’ordre de 250 millions d’Euros.

Où est la vérité ? Que penser lorsque EDF affirme que les assemblages entreposés dans la piscine du bâtiment combustible de Flamanville seront effectivement utilisés ? Afin de vérifier tous ces éléments, la CRIIRAD a interpellé monsieur Xavier Ursat, Directeur Exécutif Groupe EDF, en charge de la direction Ingénierie et Projets Nouveau Nucléaire.

Tant que toute la lumière n’a pas été faite sur ce qui s’est passé à Taishan, est-il bien raisonnable de poursuivre, à travers le programme des EPR2, cette course en avant désespérée avec une technologie non maîtrisée et donc dangereuse ?

Pour en savoir plus :

Visionnez notre vidéo "EPR de Flamanville : quelles conséquences après l'incident à Taishan 1 ?"

C o n t a c t :  B r u n o  C H A R E Y R O N ,  D i r e c t e u r  d u  l a b o r a t o i r e  d e  l a  C R I I R A D
+ 3 3 6  2 7  2 7  5 0  3 7  •  b r u n o . c h a r e y r o n @ c r i i r a d . o r g 

TRADUCTION EN ANGLAIS :

Wednesday, February 23

EPR under construction in Flamanville: the continuation of the fiasco?

Will the 245 new nuclear fuel assemblies, transported by truck between October 2020 and summer 2021 from the Framatome plant in Romans-sur-Isère, have to be replaced before they are even used?

The CRIIRAD revealed last year that the serious incidents that affected the EPR reactor at the Taishan power plant in China could affect other EPRs under construction around the world, in particular the one built by EDF in Flamanville (Flamanville 3).

The industrialists concerned and many specialized institutes are trying to minimize what happened in Taishan, insisting on the fact that fuel rod failures had already affected other reactors. But the damage to the nuclear fuel at Taishan 1 goes far beyond that. Information sent to CRIIRAD by a whistleblower who works in the nuclear industry indicates that very abnormal vibrations have affected this reactor. They have seriously damaged the structure of the assemblies, including the grids holding the fuel rods. This obviously poses problems for nuclear safety and radiation protection. The Taishan 1 reactor has already been shut down for more than six months and it is likely that it will not be able to restart for several months. These vibrations would be due in particular to a generic design flaw affecting the hydraulics in the EPR vessel.

Questioned by the CRIIRAD on 27 November 2021 about this matter and the consequences for the Flamanville EPR, the ASN indicated on 15 December that it did not have precise information, but that it would not authorize the start-up of the Flamanville 3 reactor until EDF had transmitted a technical dossier on the Taishan "feedback".

In the meantime, EDF is trying to trivialize the consequences and to let people believe that everything is under control. In a press release of January 12, 2022 concerning Flamanville 3, EDF indicates new delays but does not explicitly address the issue of vibrations. In particular, it states that "all the assemblies that will be used in the first operating cycle of the reactor are stored in the fuel building".

However, according to information transmitted to CRIIRAD, EDF has ordered from Framatome new fuel assemblies including reinforced grids (to better withstand vibrations), but also a modification of the M5 alloy used for the cladding (in an attempt to solve corrosion problems). It should replace the former new assemblies, which are already on site and will therefore never be used. To practically scrap a new nuclear reactor core in this way could represent a cost of around 250 million Euros.

Where is the truth? What are we to think when EDF claims that the assemblies stored in the pool of the Flamanville fuel building will actually be used? In order to verify all these elements, the CRIIRAD questioned Mr. Xavier Ursat, Executive Director of the EDF Group, in charge of the Engineering and New Nuclear Projects Department.

As long as all the light has not been shed on what happened in Taishan, is it really reasonable to continue, through the EPR2 program, this desperate race to the front with an uncontrolled and therefore dangerous technology?

To know more about it:

Watch our video "Flamanville EPR: what consequences after the incident at Taishan 1?"

Contact : bruno.chareyron@criirad.org , Nuclear physics Engineer, Director of the CRIIRAD laboratory

Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.