La représentation que la moyenne des Français ont des personnes en précarité n'est pas très positive. Le plus souvent, ils voient en elles des personnes écrasées par la pauvreté, incapables de s'en sortir, sinon responsables de leur situation. Bref, pas des gens que l'on va spontanément rejoindre, côtoyer, écouter et soutenir.
Or la réalité est différente. Pour la grande majorité d'entre elles, les personnes confrontées à la pauvreté font tout ce qu'elles peuvent pour en sortir, mais leurs efforts se heurtent à des murs plus hauts que pour le reste de la société, principalement à cause des discriminations dont elles sont victimes.
"Qui aime vivre en étant traité d'assisté, de cas social ? Qui souhaite connaître la honte de pousser la porte d'un service social ou d'une association caritative pour une aide, quand on doit nourrir ses enfants ?", écrit Marie-France Zimmer, qui a participé à la rédaction du livre En finir avec les idées fausses sur les pauvres et la pauvreté avec ATD Quart Monde.
Pour changer de regard sur les personnes en précarité, rien de tel que ce petit livre qui démonte un à un 117 discours simplistes qui les visent.
Rien de tel, surtout, que la vraie rencontre entre milieux différents, autour de projets transformateurs des personnes et de la société.
L'expérience quotidienne d'ATD Quart Monde et d'autres le confirme, tout comme un sondage de 2015 au Québec : plus une personne a des relations avec d'autres confrontées à la pauvreté, plus son attitude à leur égard est positive.
Que peut faire le cinéma dans tout cela ? Proposer au spectateur des histoires de personnes en précarité qui respectent leur dignité et font comprendre ce qu'elles vivent, en usant de toutes les nuances du 7e art : l'émotion, la poésie, le rire, le mystère, l'imaginaire, etc. Des histoires qui montrent les efforts qu'elles font pour s'en sortir et les obstacles qu'elles rencontrent plus fréquemment que les autres.
Quelques rares films ont ce propos, comme par exemple les trois présentés en extraits durant le débat filmé ci-dessous, que nous vous laissons le soin de découvrir dans la vidéo. On peut citer aussi Le Saint de Manhattan, Le cheval venu de la mer, Rosetta, Joseph l'insoumis, Dancing nuage, Moi, Daniel Blake et d'autres films de Ken Loach...
Mais malheureusement, à part ces quelques exceptions, le cinéma en général s'intéresse peu aux personnes en précarité. La vidéo en bas de cet article explique bien pourquoi.
Quand il s'y intéresse, c'est souvent à travers des clichés qui correspondent aux idées reçues du public (le clochard, l'immigré, le Rom...), avec des raccourcis et parfois des caricatures qui ne font pas avancer la compréhension de ce que ces personnes vivent vraiment.
Mesurant qu'il y a là un continent encore largement inexploré, le Mouvement ATD Quart Monde a lancé en 2015 le Prix annuel du film "La misère sans clichés", afin d'encourager le cinéma à mettre en scène des personnages en grande précarité, sans pathos ni misérabilisme.
Le principe : quatre films pré-sélectionnés sont visionnés chaque année par un jury réparti en groupes à travers la France, composés pour la moitié au moins de personnes en précarité. En 2015, le jury présidé par Cyprien Vial, a récompensé le film Spartacus et Cassandra. En 2016, le jury présidé par Marianne Tardieu a élu le film Hector.
ATD Quart Monde propose également à des réalisateurs/trices de mettre leur talent au service de la déconstruction d'idées fausses et de préjugés qui visent les personnes en précarité, à l'aide de courts-métrages de fiction de moins de 5 minutes.
Costa Gavras, Xavier Beauvois, Charles Berling, Lou Bohringer, Abd Al Malick, Valérie Mréjen, Marianne Tardieu, Cyprien Vial ont accepté de participer à ce projet qui est en cours de réalisation.
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jean-christophe.sarrot@atd-quartmonde.org
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