olivier tonneau , qui a pris ses distances avec lfi depuis quelques années mais qui reste lucide
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Laurent Wauquiez, politiquement, ne pèse rien. Cependant il représente quelque chose: l'expression la plus pure du pari sur la bêtise des gens. Aucun cliché n'est trop gros pour lui, aucune platitude n'est assez plate. Dans le débat, tout y est passé, Corée du Nord, Venezuela, vous reprendrez bien une louche de Hamas? Et quelques perles sur la gauche qui ne défend plus le travail mais l'assistanat ou la fortune personnelle de Mélenchon. Le jour où un tel olibrius arriverait au pouvoir marquerait le point de non-retour de la crétinisation française - mais je crois qu'on n'en est pas encore là.
En face, Bompard comme toujours excellent. Le débat, refusé par un Wauquiez réduit à couvrir incessamment la voix de son adversaire en répétant trois fois d'affilée ses formules toutes faites, donnait l'impression d'un match de foot où l'on bouge, sans trop savoir comment, d'un but à l'autre: au moins trois fois - Vencorex, RSA, Netanyahou - Bompard a marqué. 3-0, score final d'un match pourri qu'on regardait sans plaisir.
Reste un fait: de l'extrême-droite à l'extrême-centre, la synthèse est presque faite. Mais n'ayant strictement plus aucun argument, aucune idée à défendre alors qu'ils ne veulent que prolonger les politiques mises en oeuvre depuis trente ans, les Wauquiez, Retailleau, Attal et Bayrou n'ont plus qu'une seule cartouche: la peur de la France Insoumise. Jamais le slogan "Plutôt Hitler que le Front populaire" n'a autant structuré le débat politique et médiatique.
Dans cette circonstance, la France Insoumise se trouve paradoxalement au centre du jeu. Tout tourne autour d'elle, et la gauche timide, la gauche de compromission, la gauche d'accompagnement fera systématiquement face à la question: "Romprez-vous avec Mélenchon?"
On posera la question sous plusieurs angles: rompez-vous parce qu'il est un dictateur? Parce qu'il est un islamiste? Parce qu'il veut ruiner la France? Mais quel que soit l'implicite, se résoudre à rompre signifiera toujours la même chose: qu'on n'est prêt à lâcher du lest sur l'islamophobie, sur la Palestine, sur le partage des richesses, et surtout prêt à admettre l'inversion accusatoire selon laquelle la violence qui traverse la société serait le fait de la France Insoumise et non du bloc bourgeois toujours plus désinhibé dans son recours à la violence raciale, sociale et policière.
Dans ces conditions, quiconque accepte de participer au haro sur LFI contribue à l'opération d'atténuation de la violence du capital et de l'Etat. Or sans taper sur LFI, comment les autres partis de gauche pourraient-ils exister?
Que ce soit frustrant pour certains, je peux l'entendre. Mais LFI a mérité sa prééminence par le travail accompli. Quel autre parti peut se vanter de n'avoir jamais cédé, ni sur le racisme, ni sur l'immigration, ni sur la régularisation des sans-papiers, ni sur les retraites, ni sur la police? L'intransigeance de LFI a agi comme un pôle magnétique sur les autres partis de gauche dont je n'ai aucun doute que, laissés à eux-mêmes, à leur court-termisme fébrile, ils auraient dérivé bien plus à droite qu'ils ne l'ont fait, ce qui n'est pas peu dire.
La France Insoumise, comme son leader, a les défauts de ses qualités. Ceux qui n'ont pas ces défauts ne montrent aujourd'hui guère de qualité.
Il y a une certaine injustice dans la situation actuelle, car on a le droit d'être de gauche, de ne pas aimer LFI, de vouloir créer autre chose et de défendre sa différence. Mais cette injustice est aujourd'hui structurelle, indépassable. Jusqu'en 2027 au moins, la gauche, c'est LFI et rien d'autre.