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Billet de blog 11 novembre 2022

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“C’est partout le bruit des bottes”

Débat public, médias, actualités politiques... L'extrême-droite et ses idées semblent partout. Pour autant, l’heure n’est pas à la panique : oui, le camp des Lumières et de la République peut l'emporter.

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Illustration 1

Texte d'une chronique lue sur le plateau de l'Émission Populaire le 8 novembre dernier.

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J'ai eu envie aujourd'hui de vous parler de la Team Ouin-Ouin.
Ouin-Ouin, comme le doux bruit de votre enfant qui vous réveille pour un biberon à 4 heures du matin, ou celui de votre pote qui s’est cogné l’orteil dans le meuble-télé.

Je vous parle donc de la team Ouin-Ouin (vous avez compris l'expression) : celle qui d’ordinaire joue aux durs, aux forts, aux virilistes et fiers de l’être, et qui depuis la semaine dernière se répand sur les réseaux sociaux sur le thème : “on a même plus le droit de dire des trucs racistes sans qu’on nous le reproche !”.

La médaille d’or du “Ouin-Ouin” allant à Julien Odoul, député du RN, qui a déclaré que dire à un député “Retourne en Afrique” était une "maladresse", mais "qu’on doit pouvoir s'exprimer sur la politique migratoire et dire que les bateaux de migrants doivent retourner en Afrique". C’est-à-dire, pour simplifier : “on a quand même bien le droit de dire un truc raciste sur les bancs de l’Assemblée, sans se faire traiter de raciste pour autant” !

Merde alors ! Ce n’est quand même pas normal que nos députés ne puissent pas dire, à propos de gens qui risquent de se noyer par milliers sur la mer méditerrannée, qu’ils n’ont qu’à retourner en Afrique, parce que c’est bien connu, "on ne peut pas accueillir tout le monde et puis quand même c’est dangereux parce qu’ils vont nous voler notre travail, nos femmes, notre culture, nos enfants" !

Mais dans quel monde vit-on, franchement ?

Il faut dire qu’on se croirait dans une chanson de Jean Ferrat… ce qui n’a pas tellement pour habitude de me déplaire, lorsqu’il chante la Montagne ou sa France, si belle et si forte. Mais là, on est plutôt sur un autre registre : 

“C'est partout le bruit des bottes, c'est partout l'ordre en kaki,
En Espagne on vous garotte, on vous étripe au Chili,
On a beau me dire qu'en France, on peut dormir à l'abri,
Des Pinochet en puissance travaillent aussi du képi,
Quand un Pinochet rapplique, c'est toujours en général,
Pour sauver la République, pour sauver l'Ordre moral,
On sait comment ils opèrent pour transformer les esprits,
Les citoyens bien pépères en citoyens vert-de-gris”

Ambiance. Ce texte ("Le bruit des bottes") a été écrit en 1975, on le croit rédigé pour aujourd’hui.

Parce que c’est vrai, on pourrait avoir l’impression que le bruit de bottes est partout.

Dans les médias, déjà, où j’ai observé ce week-end, circonspect, un sujet sur l’élection de Bardella à la tête du RN qui se fermait sur un clin d’oeil du concerné, dont on sait qu’il est considéré comme la frange radicale du parti d’extrême-droite. Bah oui quoi, le petit clin d’oeil du chef de fil d’un parti fondé par un ramassis de fachos, "parce qu’ils sont sympas ces gens-là quand même, on rigole bien" !

Rappelons qu’il y a un an tout pile, les médias nous construisaient la grande mode Zemmour, qui n’avait aucun fondement dans la société, aucune prise, rien, mais auquel tant d’émissions radio, télé, articles de presse et autres tribunes ont offert une surexposition médiatique insolente, presque inquiétante, alors que la France s’apprêtait à envoyer ses électeurs aux urnes.

Bruit de bottes aussi lorsque des chroniqueurs ou journalistes se montrent aux mieux complaisant, au pire militants des idées d’extrême-droite. Je pense ici à Eric Naulleau, larbin du Zemmouristan qui fait la pub de Valeurs Actuelles après avoir fait carrière en tant que “type de gauche” (allez vomir et revenez), à Raphaël “Plutot Hitler que le Front Populaire” Enthoven, qui avait affirmé voter plutôt pour Le Pen que Mélenchon (au sujet duquel il a admis avoir été payé pour dire du mal), à Sonia Mabrouk, sur tous les coups sur Europe 1, où elle avait notamment dit, je cite : “nous luttons contre l’islamisme les mains liées par notre État de droit” interrogeant s’il fallait “sortir de l’État de droit pour lutter contre l’islamisme”. Pensée aussi pour Pascal Praud, qui “ne reconnaît plus la France dans laquelle il a grandi !” et qui prend tous les soirs l’antenne sur une chaîne épinglée par le CSA pour “non-respect du pluralisme politique” en faveur du RN… en 2021.

Bruits de bottes aussi lorsque le pouvoir politique joue la carte de l'inconscience en renvoyant dos à dos l’opposition de gauche et l’extrême-droite. Stratégie politique usée du “nous ou le chaos”, que Napoléon III utilisait déjà, bonjour l’originalité… Bruits de bottes quand Macron est à 2 doigts de réhabiliter Pétain, qu’il court à Rome congratuler Meloni, ou lorsque Darmanin trouve Le Pen “trop molle”. Résultat : il faut attendre l’insulte raciste d’un député d’extrême-droite à l’Assemblée pour que la conscience d’un bloc républicain revienne.
Ça pourrait être pire, c’est vrai, mais c’est déjà grave.

Alors oui, bien sûr que le bruit des bottes résonne. Non, il ne s’agit plus des braillements quasi-inaudibles d’une minorité d’allumés enfermés dans leur haine, mais d’un bruit sourd qui tape avec régularité et insolence sur les pavés de nos vies, partout dans des débats idiots sur l’identité, sur l’immigration ou sur la laïcité. Bien sûr; le venin de ces idées est inquiétant lorsque des gens non-fachos reprennent leurs arguments sans même voir le mal, et affirment les contre-vérités que ces obscurantistes proclament partout sans relâche, sans que jamais, ou presque, ne leur soit apportée la moindre contradiction.

Bien sûr, le bruit des bottes résonne et bien sûr, nous devons l’entendre comme une alarme : ceux dont le rêve est d’abattre la République sont de retour, avec des moyens importants et la complaisance du système.

Pour autant, l’heure n’est pas à la panique.

D’abord parce qu’après Trump, l’extrême-droite a perdu l’un de ses portes-paroles les plus visibles, les plus puissants et les plus entendus dans le monde, j’ai nommé Bolsonaro. Bravo et Merci à Lula et ses camarades pour leur victoire qui fait du bien.

Ensuite, parce que nous le savons depuis des années : cela finira entre eux, et nous. Tout ce qui se trouve entre va s’écrouler politiquement, par la démonstration de leur incapacité à gouverner et à imaginer un autre monde, que celui qui s’essouffle aujourd’hui.

Pas de panique. Notre rôle est de tenir notre ligne politique coûte que coûte et d’organiser notre camp avec méthode. Nous sommes prêts à gouverner. Prêts à battre l’extrême-droite dans les urnes et prêts à changer la vie dans ce pays.

N'oublions pas que les commentateurs et les experts nous disaient largement battus d’avance pour les élections en 2022. Résultat : le bloc populaire s’est renforcé dans la société, devenant la 2ème force à l’Assemblée nationale. N’oublions pas que nous avons réuni 140 000 personnes dans la rue le mois dernier. N’oublions pas que nous sommes nombreux et que nos idées sont majoritaires dans le pays. N’oublions qu’on nous vend que la mère Le Pen “est sûre de gagner le prochain coup” depuis au moins 10 ans, et qu’elle n’y parvient jamais.

Alors, peu importe le bruit des bottes. Peu importe la complaisance des puissants. Peu importe la fable qu’ils racontent, pensant agiter le chiffon rouge qui leur permettra de toujours garder le pouvoir. Dans les faits, nous avançons pas à pas. 

Oui, nous sommes le camp de l’anti-racisme et de l'antifascisme.
Oui, nous sommes le camp des Lumières et de la République.

Et oui, nous ferons taire le bruit des bottes pour construire un monde meilleur.

Bastien PARISOT

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