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Texte d'une chronique lue sur le plateau de l'Émission Populaire le 9 décembre dernier.
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Vous l’avez peut-être vu sur les réseaux sociaux : À la fin de son meeting, dimanche à Villepinte, Zemmour a eu un mot de conclusion… et Mélenchon en a eu un autre..
Tout ça pourrait paraître anecdotique après tout. On pourrait n’y voir qu’un échange sémantique presque futile entre deux candidats qui, chacun dans leur ligne, tiennent des positions électoralistes… Il n’en est rien ! En vérité, cet échange fait appel à la grande Histoire politique française et symbolise les deux visions qui s’affrontent depuis toujours.
Alors, “vive la République” ou “vive la France” ?
Eh bien tout dépend de votre conception de la Nation.
Pour Jean-Luc Mélenchon, le candidat de l’Union Populaire, on est sur une conception républicaine : c’est la République qui fonde la Nation. Zemmour, lui, s’inscrit dans une conception anti-Républicaine qui glorifie la France sans vraiment la définir historiquement ni politiquement, autrement que par un non-sens absolu.
J’en vois déjà froncer les sourcils du côté de Zemmour, Le Pen, Ciotti, Pécresse (ça en fait du monde). Bref, ils froncent les sourcils : “Quoi ? Mais que raconte ce chroniqueur islamogauchiste bourgeois et féministe des Jours Heureux, ce média au service des trotskystes insoumis qui veulent détruire la France en la plongeant dans le matriarcat islamiste ?”
Tout doux, facho, tout doux. Je suis certes féministe, mais pas bourgeois. Et surtout, je vais t’expliquer.
Oui, ce que dit Jean-Luc Mélenchon fait sens. Réfléchissez : quand on dit “vive la France”, de quoi parle-t-on ?
On parle de la Nation Française. On parle de démocratie. On parle de valeurs. Et ces valeurs sont connues : Liberté, Égalité, Fraternité. Elles sont l’objectif auquel notre société tout entière travaille. Cet équilibre idéal vers lequel nous avons affirmé vouloir tendre. Sorte de boussole immuable de notre République. C’est dans ce sillage que notre histoire collective s’écrit, que notre Nation se construit. Ces valeurs sont affichées sur le fronton de nos mairies et ornent les bâtiments administratifs de notre pays. Et tenez-vous bien : elles ne sortent pas de nulle part.
1789, ça vous parle ? La Grande Révolution ! Robespierre, la Bastille, le jeu de paume, et la naissance… de la République Française. C’est là que tout commence. Lorsque le Peuple s’en mêle et décide de conquérir ses droits les plus fondamentaux, mettant un terme à la Monarchie et son absurde droit divin.
Voilà alors que les sujets du Roi de France deviennent les citoyens de la République Française. Celle-ci se met à écrire le destin commun du Peuple Français. Elle lui donne une langue partagée sur tout le territoire, ce qui n’était pas le cas jusqu’alors. Elle lui apporte le concept de laïcité, incontournable socle de notre société. Le calendrier change. Les droits et les lois avec. Voilà que chacun accède au vote, chacun prend sa part dans la décision, si bien que le destin de la France n’appartient plus à quelques Rois bien-nés et à leurs proches relations, mais à l’intégralité des citoyens qui forment son Peuple.
Bien sûr; il a fallu attendre encore longtemps pour que les femmes puissent voter. Mais comprenez ici que je parle de l’arrivée du suffrage universel dans notre pays. La République est née imparfaite, elle l’est d’ailleurs toujours aujourd’hui, mais elle symbolise un combat permanent pour l’idéal qu’elle proclame.
Ainsi, quoi d’autre que la République, pour rendre la France possible ? Rien, puisque c’est la République qui fonde notre Nation… et non l’inverse.
Ce qui nous amène à la question suivante : en affirmant “Vive la République, mais surtout vive la France”, de quoi Zemmour peut-il bien vouloir parler ? De quoi veut-il se réclamer ?
Peut-être le royaume de France, qui précède la naissance de la République ? Le candidat d’extrême-droite se complairait alors dans une Monarchie de droit divin, où le fils du roi gouverne de génération en génération ? Mais ça, c’est tout, sauf la France à laquelle nous rendons hommage !
Quoi d’autre ? La France de Napoléon, peut-être ? Après tout, l’homme est vénéré par l’extrême-droite, qui ne voit que sa légende dorée et veut en permanence rendre hommage à l’Empereur… c’est à dire rendre hommage à une époque où la puissance militaire de la France a causé la morts de centaines de milliers de personne partout en Europe, et où la folie d’un tyran, aussi brillant puisse-t-il être sur certains sujets, a mené le pays à la dévastation et à un régime totalitaire violent et ennemi des Lumières ?
Calme toi facho, calme toi. Non, ce n’est pas de la cancel culture. Ça s’appelle regarder l’Histoire en face, et l’analyser avec ce que le temps nous a permis d’ajouter à notre grille de lecture.
Ou alors, peut-être Zemmour parle-t-il du régime de Vichy ? Après tout, Pétain détestait la République… et a tout fait pour la détruire ! Oust, Liberté, Égalité, Fraternité ! À nous Travail, Famille, Patrie. La collaboration avec le régime nazi, l’antisémitisme et la xénophobie en lame de fond. La honte sur notre pays, à jamais. Une tâche sombre, indélébile, de quelques années où les fascistes ont pris le pouvoir et ont déroulé leur triste vision du monde, poignardant la France et ses valeurs en plein coeur.
Nous en sommes revenus, heureusement. Comment ? En ré-instaurant la République, précisément. Parce que seule la recherche constante du point d’équilibre entre la liberté et la fraternité a su façonner notre Nation, la faire grandir, l’améliorer, la renforcer. N’en déplaise à Zemmour, et n’en déplaise aux fachos qui l’écoutent et l’adorent.
Et j’en profite pour dire à d’autres (bonjour, Valérie !) : l’heure n’est pas à la débandade. L’heure n’est pas à courir derrière les fachos en reprenant leurs mots, leurs tactiques et jusqu’à leurs idées pour espérer gagner leur voix. Tout au contraire : l’heure est à la bataille pour tenir la ligne républicaine coûte que coûte, sans compromis ni renoncement.
Voilà, j’ai dit. Et laisse moi Raquel conclure par ces mots.
Vous savez maintenant pourquoi : Vive la France, et surtout Vive la République !
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Bastien PARISOT