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Billet de blog 14 février 2023

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Entre mépris de race et mépris de classe.

La semaine dernière, un député macroniste à lancer "retournes-y !", au député insoumis Laurent Alexandre qui évoquait sa condition d'ouvrier à l'usine. Une remarque qui en dit long sur la mentalité macroniste.

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Texte tiré d'une chronique lue sur le plateau de l'Émission Populaire le 8 février 2023.

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Quelques lignes aujourd'hui sur un événement qui s’est produit la semaine dernière, à l’Assemblée nationale, lors du débat sur la réforme des retraites.

Alors que le député Laurent Alexandre, du groupe France insoumise / NUPES, s’adressait au gouvernement pour leur demander de retirer son projet, il a précisé “être ouvrier”, et avoir “travaillé 29 ans en usine”. Une partie de son discours à laquelle un député du groupe macroniste n’a rien trouvé de mieux pour répondre que d’hurler “retournes-y !”. Cet événement en dit long, très long, sur la mentalité des macronistes à l’Assemblée nationale.

Le macronistes rêvent d'une Assemblée... à leur image

Bien sûr, on pourrait d’abord souligner la grossièreté de tels propos et la bassesse de celle ou celui qui les hurle, mais il y a bien plus à voir derrière. Ce n’est certes pas la première fois que les sbires de Macron se montrent méprisants sur les bancs de l’Assemblée, y compris à l’égard de celles et ceux qui représentent le peuple. Après tout, leurs remarques minables sur la tenue des députés de gauche en disaient déjà long. De même que leurs attaques régulières sur les ZAD ou sur la “bordélisation”... dans la tête des députés macronistes, l’Assemblée nationale doit ressembler aux salons qu’ils fréquentent eux-mêmes, c'est-à-dire bourgeois : jolis, feutrés et surtout calmes.

Et tant pis si la violence s’y exerce. Celles des mots, et surtout celle de leurs décisions : par ici, la baisse des APL, par là, le durcissement des conditions pour les chômeurs, là encore les politiques d'austérité, le gel des salaires, la baisse des budgets pour les services publics, le recul de l’âge de départ à la retraite, etc etc… Tant pis si cette violence existe, parce qu’après tout, elle ne les touche pas, eux. Mais de grâce, de grâce, pas de bruit, pas de cris, pas de bazar ! Les macronistes veulent le calme, et le silence.

Le mépris de classe

Et n’osez pas, n’osez surtout pas leur parler du peuple. Car reprenons notre exemple : en convoquant dans l'hémicycle sa condition d’ouvrier pendant 3 décennies, Laurent Alexandre a d’abord et surtout fait entrer le peuple dans l’Assemblée, l’espace d’un instant. Notez que le député insoumis n’a pas dit qu’il “avait été” ouvrier. Non, il a bien dit “je suis ouvrier”, faisant de cette condition la sienne, actuelle. Mais ça, non ! Les macronistes ne le supportent pas. Pas plus qu’un député sans cravate. Pas plus qu’un député avec un maillot de foot. Pas plus qu’un sac de courses représentant ce que l’on peut s’acheter avec 5€. 

C’est bien simple : chaque fois, depuis qu’En Marche ou Renaissance existe, que le peuple et sa condition font irruption dans les débats, les macronistes vocifèrent. Ils moquent. Ils narguent. Ils demandent le respect. Ils aboient telle une meute enragée qui voit ce que l’on ne saurait tolérer dans un endroit si noble. Ce mépris est consubstantiel à la pensée macroniste : car ceux qui ne sont rien, pour reprendre les mots de Macron, ne sauraient être à la hauteur de leur fonction de députés. Ils ne sauraient parler au nom du peuple, ils ne sauraient le représenter, puisqu’ils n’entrent pas dans les critères de réussites futiles, illusoires et bornés des chantres du néolibéralisme. Si bien qu’au final, les macronistes méprisent tout ce qui se rapporte au peuple dans l’Assemblée, traçant comme une ligne imaginaire entre eux, les premiers de cordées, et les autres, les gueux, les ouvriers, les employés, les chômeurs, les précaires, les classes moyennes, bref les 90% des Français restant.

Une ligne imaginaire parfaitement illustrée par ce cri du coeur, hier à l’Assemblée : “retournes y !”. Alors que Laurent Alexandre affiche fièrement sa condition d’ouvrier, sur laquelle il fonde sa démonstration, voilà que la réponse qui lui est faite est l’ordre de retourner dans son monde, à sa place. Car le monde des ouvriers ne peut être celui des députés, leur place ne peut donc pas être à l'Assemblée nationale. Voilà l’expression même du mépris macroniste et voici leur violence. Eux ne supportent pas l’expression populaire... mais les autres doivent supporter leur coups de mentons.

Mépris le classe, méprise de race : la négation de la République

Et pourtant… pourtant, c’est bien le peuple qui est souverain à l’Assemblée nationale. Car, peut-être les macronistes l’oublient-ils un peu trop, les députés ne sont, sur les bancs de l'hémicycle, que les représentants du peuple. Pas même de leurs électeurs uniquement, mais bien de tous les citoyens vivant sur leur circonscription. Si bien que ce statut de député n’en fait pas un citoyen supérieur aux autres, mais bien un citoyen, ou un citoyenne… au service des autres, au service de l’intérêt commun et au service de l’intérêt supérieur de la nation.

Oui, le peuple est souverain dans son pays, et l’Assemblée nationale est le lieu où sa souveraineté s’exerce. En méprisant Laurent Alexandre pour sa condition d’ouvrier, les macronistes ont surtout montré, hier, qu’ils ne comprenaient ni leur rôle, ni le lieu où ils se trouvaient. Car non, le peuple n’est pas une masse prolétaire guidée par une oligarchie éclairée. En France, le Peuple est souverain, le peuple vote, le peuple décide. Ainsi donc, pas plus qu’un député français ne doit “retourner en Afrique” à cause de sa couleur de peau, un député français ne doit pas “retourner à l’usine” parce qu’il est ouvrier.

Élu par les urnes, il est ici à sa place, dans l'hémicycle, pour porter la voix de celles et ceux qui l’ont élu. Et ceux qui le nient par racisme, par bêtise, par mépris de classe ou par inconscience politique ne font, chacun à leur façon, que nier la République et ses principes.

Bastien PARISOT
@BastienParisot

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