Bastien Parisot (avatar)

Bastien Parisot

Responsable des campagnes numériques de la France insoumise

Abonné·e de Mediapart

59 Billets

0 Édition

Billet de blog 26 août 2022

Bastien Parisot (avatar)

Bastien Parisot

Responsable des campagnes numériques de la France insoumise

Abonné·e de Mediapart

« Insouciance »? Macron a raison

Emmanuel Macron a fait réagir l'opposition en utilisant les termes d' « abondance » et d'« insouciance» en parlant des Français... Et pourtant, dans un sens, il a raison.

Bastien Parisot (avatar)

Bastien Parisot

Responsable des campagnes numériques de la France insoumise

Abonné·e de Mediapart

Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

Illustration 1

Texte d'une chronique lue sur le plateau de l'Émission Populaire le 25 août dernier.

------

C’est la rentrée ! Pour l’occasion, revenons sur la déclaration d’Emmanuel Macron qui clamait hier qu’il en est maintenant fini de l’”abondance” et de “l’insouciance”...  Arrêtons-nous un instant sur ce dernier terme, qui en dit tant sur la façon dont le président voit le monde qui l’entoure.

Quelle “insouciance” pourrait-il y avoir chez un peuple confiné, déconfiné, "couvre-feuisé" puis reconfiné pendant la moitié des deux dernières années ? Quelle insouciance alors que chacun a pu observer, déconfit, l’effondrement de l’hôpital public de notre pays, jadis vanté et jalousé partout dans le monde, et les conditions de travail honteuses de celles et ceux qui y sauvent des vies ?

Quelle “insouciance” alors que la prise de conscience écologique frappe les esprits depuis de longues années déjà, et que chacun observe, horrifié, les sécheresses, les incendies, les pénuries d’eau, les estinctions d’espèces vivantes et l’avancée, inéluctable, du jour du dépassement dans notre calendrier ? Quelle “insouciance” alors que ce sinistre spectacle nous ramène toutes et tous à notre impuissance face à cette crise écologique et au changement climatique déjà commencé ?

Non vraiment, rien ne va avec l’utilisation de ce terme. 

Quelle insouciance pour un peuple qui a franchi la barre des 10 millions de pauvres ?
Quelle insouciance pour les plus de 5 millions de chômeurs et pour les 4 millions de mal-logés  ? 
Quelle insouciance pour les parents des 40% de mômes privés de vacances cet été ?
Quelle insouciance pour les dizaines, les centaines d’étudiants amassés dans les files d’aides alimentaires, trop précaires pour étudier dans des conditions correctes, mais aussi et surtout pour vivre dignement ?
Quelle insouciance pour les personnes âgées enfermées dans des EHPADS qui les traitent sans plus de dignité mais s’enrichissent sur leur dos et celles de leurs familles ?
Quelle insouciance pour les essentielles, vendeuses, femmes de ménages, éboueurs, personnel soignants, si maltraités et si peu respectés alors qu’elles et ils portent sur leur dos le fonctionnement de notre société ?
Quelle insouciance pour cette grande majorité de la classe moyenne, qui se voit lentement précarisée et craint plus que jamais le déclassement, la bascule dans la précarité menaçante ?
Quelle insouciance pour un peuple qui paye depuis des décennies la désindustrialisation massive et la compétitivité reine, à coups de délocalisation, de démentèlements, de restructurations et autres plans de licenciement, et observe la disparition des savoir-faires et des trésors nationaux qu’il avait pourtant su batir et développer par ses mains et par son esprit ?

Non vraiment, quelle “insouciance” ? Je vois d’ici les sbires du monarques et autres commentateurs sympatiques qui se lamentent déjà en me lisant. Pour eux, déblatérer comme je le fais sur un mot, un seul, du Président, c’est faire de la petite chamaillerie à deux balles et chercher le buz facile mais inutile. 

En fait, non. Au contraire : ça veut dire beaucoup. L’utilisation de ce terme dans la bouche de Macron montre toute sa déconnexion avec les Français, et plus encore le camp auquel il appartient. C’est pourquoi j’ai tiré le fil, tout simplement.

L’heure à la confession : je veux bien croire à l’insouciance. Oui, je fais un pas vers notre cher Président Macron et je le dis : Je veux croire à l’insouciance !

Celle des grands groupes Français ayant versé 44 milliards d’euros de dividendes au deuxième trimestre en France, et celle des actionnaires qui les touchent.
Je veux bien croire à l’insouciance des joueurs de golf ayant réclamé, en pleine sécheresse, le droit d’arroser leurs pelouses pour continuer à pousser tranquillement leurs baballes dans les troutrous bien entretenus de leur clubs de sport réservés aux riches, pendant que les autres crêvent de chaud et se voient demandés d’uriner sous la douche.
Je veux croire à l’insouciance, celle des milliardaires dont la fortune a augmenté de 439% en 10 ans. Celle des heureux propriétaires de jet-privés, qui bousillent la planète pour leur trop bon plaisir. Celle des fraudeurs fiscaux qui fraudent l’État chaque année, sans être vraiment inquiétés, de 80 à 100 milliards d’euros par an, si l’on en croit les différentes études menées sur le sujet.

Cette insouciance là, alors là, oui, je veux bien y croire. D’autant qu’avec Macron, elle ne risque pas tellement de disparaitre… et c’est là tout le problème ! Car avec elle viennent l’égoïsme et l’inconscience de la petite caste qui écrase les autres, concentre les pouvoirs et jouit de ses petits bonheurs destructeurs. Un tableau assez classique de lutte des classes finalement… comme quoi, tout ça est d’une banalité confondante. L’éternelle Histoire ne fait que se répéter devant nous, adaptée à notre monde moderne.

Et ça tombe bien, car la lutte des classes, c’est pour ça qu’on est là. Je conclus ici : pour mettre fin à l’insouciance, la leur, et à tout ce qu’elle nous crache au visage, il existe une solution que nous, Insoumis et autres indignés, nous évertuons à chercher : le réveil des consciences, cet incontournable premier pas de la révolte, ce moment où l’on dit “stop”, où la fin de la récré est sifflée, et où toutes et tous ensemble nous partons à l’aventure d’un monde plus juste, enfin.

C’est la rentrée et j’ai une bonne nouvelle : un autre monde est possible.

--

Vous avez aimé cet article ? Abonnez-vous au carnet de campagne de l’auteur en cliquant ici !

Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.