Ils représentent moins de 20% de la population mais le moins qu'on puisse dire, c'est qu'ils font parler d'eux. Les indépendantistes catalans ont présenté mercredi au Parlement de cette Communauté Autonome une proposition de loi visant à déclarer l'indépendance. Elle a été rejetée sans surprise mais elle a retenu l'attention des médias grâce aux trois députés qui voulaient camper devant le Parlement jusqu'au jour du vote. Trois jours plus tôt avait lieu à Barcelone un référendum sur l'indépendance, le dernier d'une longue série engagée il y a un an et demi.
Ce n'est pas à une guerre de chiffres qu'on a eu droit, mais à une guerre des interprétations. C'est bien connu, on peut faire dire aux chiffres ce que l'on veut. Mais qualifier une participation de 18% de succès comme l'ont fait les organisateurs et la presse nationaliste, est-ce bien raisonnable?
Il faut dire que les organisateurs avaient tout mis de leur côté pour cette enquête grandeur nature sans valeur légale: un vote anticipé était possible depuis plusieurs mois, la captation d'électeurs se faisait dans la rue où des dizaines de bureaux de vote avaient été installés. Par ailleurs, l'objectif fixé, de 10%, était très modeste. Evidemment, le nombre de oui a dépassé les 90%. Il n'en reste pas moins que le nombre de partisans de l'indépendance à Barcelone tournent seulement autour des 15%. Autrement dit, près de 85% des barcelonais n'ont aucun intérêt pour l'indépendance.
Les chiffres dans le reste de la Catalogne diffèrent très peu, et il ne faut pas oublier le fait que certaines grandes villes de la banlieue barcelonaise n'ont pas participé au référendum. Celles-ci étant peuplées majoritairement d'Andalous venus dans les années 50-60 et de leurs enfants, généralement attachés à l'Espagne, on peut supposer sans risque de se tromper que la participation aurait été minime.
Il n'en reste pas moins que le mouvement indépendentiste est plus vigoureux que jamais. L'organisation de ces référendums, avec toute la complexité logistique qu'elle implique, en est une preuve. Depuis les conflits avec Madrid concernant l'adoption en 2006 du nouveau Statut d'Autonomie de la Catalogne, le paysage indépendantiste s'est reconfiguré puisque de nouveaux partis ont vu le jour. L'ancien président catalan Jordi Pujol, certes nationaliste mais qui n'avait jamais voulu couper les ponts avec l'Espagne, a récemment déclaré qu'il ne voyait plus aucune raison de s'opposer à l'indépendance. Le président actuel, Artur Mas, s'est également prononcé en faveur de la séparation.
La nouveauté est que l'indépendantisme n'est plus seulement une idée défendue par des formations de gauche. La bourgeoisie catalane, nationaliste mais modérée, commence à radicaliser son discours. Mais l'idée d'indépendance n'étant partagée que par une minorité des catalans, il est fort à parier que ce discours provoque avant tout une hausse de l'abstention.