L'organisation terroriste ETA a annoncé aujourd'hui qu'elle mettait fin définitivement à la violence. Cette décision est l'issue d'un lent processus qui a vu la gauche indépendantiste (dite gauche abertzale), autrefois liée à l'ETA, s'en distancier peu à peu jusqu'à exiger la fin de l'action armée.
L'annonce a été faite dans le journal indépendantiste basque Gara, auquel l'ETA a l'habitude de transmettre ses communiqués. Les trois hommes encagoulés qui réalisent la déclaration affirment que l'engagement de l'organisation est "clair, ferme et définitif". Ils demandent aux gouvernements espagnol et basque "d'ouvrir un processus de dialogue direct" qui permettrait de "résoudre les conséquences du conflit". Cette formulation un peu vague fait référence, semble-t-il, à la demande de transfert des prisonniers de l'ETA vers les centres pénitentiaires du Pays Basque, la stratégie du gouvernement ayant été invariablement de les disperser sur le territoire espagnol.
Les questions de la dissolution effective et de l'abandon des armes ne sont pas abordées, mais la violence de l'ETA, créée en 1958 durant la dictature franquiste et responsable de la mort de 829 personnes, est belle et bien terminée.
La nouvelle satisfera certainement Alfredo Pérez Rubalcaba, candidat socialiste aux élections générales du 20 novembre et qui espérera certainement récupérer un peu de terrain face à Mariano Rajoy -15 points le sépare selon les sondages de son adversaire Mariano Rajoy. Lors de son passage au ministère de l'Intérieur durant les cinq dernières années, il fut l'artisan d'une lutte acharnée de la police espagnole contre l'ETA et réussit à arrêter la plupart de ses dirigeants. Durant les derniers mois, l'affaiblissement de l'ETA était tel que tous les observateurs s'attendaient à une fin proche de l'action armée.
Mais si l'ETA a été contraint de mettre fin à la violence, c'est bel et bien à cause de la perte de son soutien politique, la gauche abertzale. Celle-ci, constamment interdite de participation aux élections à cause de la fameuse Loi de partis, a finalement réussi son entrée dans les institutions lors des élections municipales et régionales basques à travers de la coalition Bildu, qui l'unit à différents partis de la gauche nationaliste.
Arnaldo Otegi, leader historique de la gauche abertzale, avait récemment déclaré que l'hostilité de son courant politique vis-à-vis de l'ETA remontait à décembre 2006, lorsque l'ETA avait rompu la trêve démarrée quelques mois plus tôt et avait fait exploser une bombe dans le parking de l'aéroport de Madrid. Deux équatoriens, qui dormaient dans leur véhicule, avaient été tués.
A un mois de la fin de son mandat, la nouvelle est une victoire pour José Luis Rodríguez Zapatero. En 2006, il avait parié pour la paix, en acceptant de négocier avec l'ETA. L'échec lui avait reproché durement par la droite qui critiquait le fait que le gouvernement "négociait avec des terroristes" (une attitude pour le moins hypocrite quand on sait que José María Aznar avait lui aussi entamé publiquement des négociations avec le groupe séparatiste). Rajoy, fidèle à son discours a fait la fine bouche lorsqu'il a commenté l'annonce de l'ETA: "la tranquilité des espagnols seulement sera complète lorsque l'ETA annoncera qu'elle se dissout", a-t-il déclaré. Mais aujourd'hui, Zapatero, lâché par tout le monde, impopulaire à cause des mesures d'austérité et de la situation dramatique de l'économie espagnole, pourra tout de même passer à l'histoire comme le président qui a mis fin à 50 ans de violence.