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Billet de blog 20 juin 2014

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Chien blanc

Une route la nuit aux États-Unis. Sa voiture heurte un grand chien blanc. La jeune femme le fait soigner et le garde chez elle le temps que ses petites annonces attirent l'attention du propriétaire. Un grand chien, très fort, très doux. Un tueur de noirs.

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Illustration 1
Chien blanc

Dans le chenil auquel elle s'adresse, on lui révèle qu'il a vraisemblablement été dressé dans ce but. On élevait jadis des chiens pour chasser les esclaves en fuite. Dans ce but, on les faisait cruellement maltraiter par des noirs durant leur jeunesse. Certains ont poursuivi la tradition.

En dépit des doutes unanimes, elle entreprend de le déprogrammer avec l'aide d'un employé noir du chenil.

Tourné par Samuel Fuller en 1982, White dog s'inspire d'un roman de Romain Gary, une chronique du couple qu'il forme avec Jean Seberg, comédienne et militante des droits civiques. Nous sommes en 1968, l'année de l'assassinat de Martin Luther King sur fond d'émeutes dans les quartiers noirs.

Un roman sans complaisance envers l'Amérique raciste incarnée notamment par l'ancien propriétaire du chien que l'auteur éconduit avec cynisme : 
- Mon ami est un jeune étudiant africain qui avait obtenu une bourse pour un an à l'UCLA.
   Quand il a rencontré votre chien, c'a été je vous dis, l'amitié instantanée [...]
- Votre ami nègre a emmené le chien en Afrique ?
- Oui dis-je. C'est même moi qui ai payé le billet. Je ne voulais pas les séparer. Il y a des choses qui ne se font pas [...]

Mais surtout les extrémistes noirs. Leur façon de s'approprier la souffrance de leurs ancêtres. D'exploiter le sentiment de culpabilité qu'ils suscitent chez leurs amis blancs, notamment les femmes.

Ce militant encourage ses deux fils à s'engager au Vietnam afin de revenir bien formés militairement pour encadrer la révolution noire. L'un d'eux s'engage par patriotisme américain. L'autre déserte par amour pour une jeune Française.

Et puis les tendances racistes de certains d'entre eux :
[...] Cet antisémitisme est dû en partie à la comédie d'arabisme et d'islamisme que se jouent les extrémistes noirs à la recherche d'un ailleurs spirituel. Quatre-vingt-dix-neuf virgule neuf pour cent ignorent totalement que les conquérants arabes furent les massacreurs acharnés de leur ancêtres [...] Il serait inique et indigne d'en vouloir aux Arabes d'aujourd'hui et de leur faire grief des crimes de leurs ancêtres, lesquels n'étaient pas des crimes à l'époque [...].

Illustration 2
Romain Gary et Jean Seberg

Les intellectuels blancs ne sont pas épargnés. Le couple reconduit des amis en voiture
"tous les trois dans un état de mea culpa absolument effrayant. [...] Le signe distinctif par excellence de l'intellectuel américain, c'est la culpabilité. Se sentir personnellement coupable, c'est témoigner d'un haut standing moral et social [...] Il va sans dire que je ne parle pas ici de sincérité : je parle d'affectation. [...] Derrière chaque noir qui brûle, viole ou assassine, il y a le crime des Blancs, notre crime."

Comme d'habitude avec Romain Gary, une ironie en compagnie de laquelle on ne s'ennuie jamais 

Romain Gary, Chien blanc, 1970, Folio 224p
Samuel Fuller, White dog, 1982.

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