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Billet de blog 20 octobre 2011

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Circulation et lutte des classes

Des millions de personnes naviguent chaque jour entre domicile et lieu de travail. Ces déplacements sont au confluent de tout ce qui aujourd'hui fait crise : emploi et logement, énergie et pollution d'où l'acuité des débats idéologiques à leur sujet.

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L'élection en mars 2001 de Bertrand Delanoë à la mairie de Paris a coïncidé avec une prise de conscience de l'impasse dans laquelle bute la circulation dans les grandes villes européennes : entre paralysie et asphyxie. Tandis que Londres réglemente l'accès au centre-ville, Paris entrave la circulation des véhicules individuels motorisés au profit des transports en commun et de la bicyclette. On a d'autant plus de mal à comparer ces politiques que les enquêtes et comptages sont occultés et que les informations publiées sont souvent des impressions promues "statistiques".

Le résultat le plus tangible de la politique parisienne a été le développement de la pratique de la bicyclette mais surtout du scooter. Aux heures chaudes, la circulation parisienne s'énerve. Des automobiles progressant par à-coup, mordant sur des couloirs d'autobus sillonnés de bicyclettes, d'essaims de scooters tourbillonnant et de motos faisant hurler leur moteur à la moindre entrave. 

En matière de Code de la route, on est passé de règles universelles visant la sécurité des usagers comme les limitations de vitesse, voies prioritaires, feux rouges alternés, à des modulations catégorielles favorisant certains modes de transport comme les voies ou sens de circulation réservées aux transports en commun et aux cyclistes. On a multiplié au profit de ces derniers les pistes cyclables, les bandes de circulation sur les trottoirs, les contre-sens dans des rues à sens unique (où on n'a souvent guère la place de se croiser) sous prétexte de raccourcir leur trajet et de "calmer la circulation" (en bon français, gêner les automobilistes). Au pire, cela donne les boulevards Magenta et Barbès où les cyclistes sont invités à rouler sur des trottoirs surchargés de piétons (Barbès !) tandis que les couloirs d'autobus leur sont interdits et que la largeur des voies de circulation y gêne leur coexistence avec les voitures.

Chaque mesure nouvelle est toutefois rapidement dépassée ou contournée par des usagers qui généralisent avec un bel ensemble des exceptions qui leur semblent condamner leur propre être social. On voit par exemple des cyclistes forcer le passage des piétons aux feux rouges et rouler sans retenue sur le trottoir, imités par les scootéristes balayant avec superbe les privilèges catégoriels. Les promoteurs de la politique favorable au vélo s'avouent fascinés par Amsterdam ou Copenhague dont ils rêvent de plaquer l'esprit sur la société parisienne. L'enjeu moral assigné au nouveau Code de la route (favoriser les circulations "propres" ou "douces") se transforme en enjeu social, pollueur de banlieue contre écolo parisien. De ce fait, les couloirs d'autobus sont devenus le lieu d'une guerre civile, le moindre obstacle figurant le blocage social que chacun s'efforce de dynamiter.

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