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Billet de blog 22 octobre 2015

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Carte scolaire, le problème n’est pas où on le situe.

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Le problème de la carte scolaire, tel il a toujours été traité, peut se résumer ainsi :

Il faut fourrer quelque part quelques millions d’enfants à qui est imposé d’aller à l’école. A l’origine, l’école était communale : les communes devaient fournir les locaux et le matériel, l’État fournissant les enseignants, imposant et uniformisant le contenu de l’enseignement. Dans une France rurale, géographiquement, dans la proximité, cela ne posait pas de problème.

Puis, modification de la répartition des populations, recherche d’économies d’échelle pour l’État, communautés de communes, regroupements pédagogiques… une carte détermine les secteurs et il suffit de déplacer les enfants… avec toutes les conséquences que l’on connaît.

De cette façon, c’était administrativement parfaitement gérable, personne ne disait rien vu que de toute façon l’enseignement était identique partout. L’égalité des chances est prise en France comme l’uniformisation de la « potion à distribuer ».

Cela s’est compliqué lorsque le constat a été fait que les « résultats » n’étaient pas identiques partout. On le savait depuis tout temps, mais cela n’avait pas d’importance, les petits campagnards étaient voués à rester dans l’économie rurale, ceux des cités ouvrières à alimenter les usines, pas besoin d’avoir des « résultats scolaires » mirobolants. L’école est prise aujourd’hui comme le seul moyen d’avoir une chance d’avoir un emploi, d’où l’incantation « pas de sortie du système éducatif sans un diplôme ». D’où aussi l’attention parfois exacerbée, souvent angoissée, que les parents portent aujourd’hui à l’école.

Lorsque la carte scolaire a été écornée, ceux qui le pouvaient ont donc cherché les établissements à « bons résultats », c'est-à-dire où il y avait de « bons élèves ». Ce n’étaient pas les établissements qui faisaient les « bons élèves » mais les « bons élèves » qui faisaient les « bons établissements » puisque l’enseignement est identique partout. Comme par hasard les « bons élèves » provenant de « bons milieux sociaux ».

Ce choix de quelques familles est quelque peu gênant : il n’est pas question que, face à l’obligation, des citoyens décident d’eux-mêmes où doivent aller leurs enfants. « Les enfants appartiennent à la République avant que d’appartenir à leurs parents » disait Danton (séance du 2 Fructose, An II). D’où l’idée qui se répand et que notre Ministre veut essayer : puisque ce sont les « bons élèves » qui font les « bons établissements », déplaçons des « bons élèves » chez les « mauvais élèves » et vice versa ! Après la classe, chacun retournant dans les bonnes ou les mauvaises conditions des situations sociales géographiquement disposées sur le territoire.

Ce qui a changé, c’est qu’un nombre grandissant de parents se mettent à penser ! De plus en plus savent que l’école pourrait être autrement, s’informent, cherchent une école différente, le développement des écoles alternatives n’étant freiné que par leur coût puisqu’elles sont hors Education nationale. D’autre part il apparaît comme de plus en plus insupportable et anti-démocratique que l’État décide ce qu’est le « bien » des enfants, ce qu’ils doivent faire, qu’il les capture sans que les parents-citoyens ne puissent faire un choix, avoir un avis, alors que le même État leur renvoie sans cesse leurs responsabilités. Les parents sont des emmerdeurs.

C’est bien là qu’est le problème, ce d’autant que manifestement les choix de l’État par rapport à son école sont dans une impasse depuis longtemps. La transformer globalement est de plus en plus une vue de l’esprit et ne fait que déclencher d’interminables polémiques.

Alors, ce qui devrait apparaître le plus raisonnable, c’est que l’offre scolaire, sur un même territoire ou secteur, soit diversifiée et permette le choix aux familles (comme aux enseignants) entre les deux grandes approches pédagogiques reconnues aujourd’hui : l’approche classique ou traditionnelle d’un côté, celle des pédagogies modernes de l’autre (Freinet, Montessori, Decroly, actives…). D’une part ces dernières pourraient enfin se développer dans des établissements cohérents, d’autre part, contrairement à ce que l’on croit les choix ne dépendent pas des conditions sociales des parents, surtout quand on leur explique ce que sont ces pédagogies. En Belgique, à Gand, depuis plus de trente ans le choix parmi la quarantaine d’écoles communales est proposé entre pédagogie classique et pédagogie Freinet : la mixité sociale y est parfaite dans les secondes.

Techniquement cela ne pose pas de problème : il y a des demandes aussi bien du côté des parents que du côté des enseignants, la gestion avec les moyens numériques ne serait pas plus difficile que celle des lycées où cette possibilité existe.

Alors ? Près de 20 000 parents et enseignants le demandent déjà dans cet appel : http://appelecolesdifferentes.blogspot.fr/ et fait rare dans une pétition il y a autant de commentaires justifiant les signatures.

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