La tragédie du 13 novembre a été suivie d’une profusion de textes qui parfois n’a été que l’occasion pour certains de refourguer la marchandise qui leur tient lieu de pensée. Il en est ainsi de Michel Maffesoli à qui Libération a offert une pleine page pour nous dire que « A l’encontre de la « doxa » dominante, on peut dire que c’est l’intégrisme laïque qui, sans bien sur en être conscient, est le fourrier des positions et des actes extrémistes ».
Nous ne nous étonnons pas des propos de ce sociologue qui justifie tout aux « réactions émotionnelles », comme il dit. Ainsi du terrorisme, qu’il assimilait en 1992 à « une érotique sociale » au même titre que « les effervescences sportives, ludiques, guerrières ». (In préface à « La transfiguration du politique ». collection La petite vermillon, chez La Table Ronde).
Dés lors, Maffesoli n’est pas gêné pour écrire dans Libération « qu’il n’est pas forcément paradoxal de dire que derrière le fanatisme islamique, il y a le retour du refoulé, le besoin de communions émotionnelles que les élites modernes ont durablement, dénié. ».
Tout comme il ne se gène pas pour écrire « que l’on peut mesurer les phénomènes terroristes qui utilisent le prétexte religieux pour exprimer une soif de l’infini que le matérialisme occidental n’a, aucunement, su prendre en compte ».
Les mesurer à quoi ? A « l’intégrisme laïque », comme vu plus haut, à « la laïcité, qui a l’origine était le fait de la tolérance non cléricale qui tend à devenir un autre dogmatisme, en bref, «un laïcisme » intolérant, qui ne peut qu’engendrer les paroxysmes sanguinaires dont l’actualité n’est pas avare ».
Tout ça pour conclure qu’il faut parler de « temps de l’esprit, celui où le besoin religieux retrouve une indéniable force et vigueur… qu’il faut savoir accompagner ».
Si tout ça n’est pas tomber dans une mode qui excuse le pire au prétexte que nos politiques sont critiquables, qu’est-ce d’autre ?
Pour ceux qui ne connaissent pas Maffesoli, ce texte est une bonne introduction à son œuvre qui en a dit d’autres, et à une carrière universitaire qui traine derrière elle quelques moments critiques.
Notre sociologue avait ainsi trouvé que Sarkozy suscitait « une sorte de « participation magique » par sa présence. Rajoutant : « Il faut en effet rapprocher le faire et le dire du président des processus religieux ou magiques pour comprendre ce qui se passe en ce moment. La parole, le verbe, l’attitude ont en quelque sorte une force propre, qu’ils soient ou non suivis de décisions ». Belle sociologie !
Comme n’a pas été comprise son ouverture d’esprit (sic), lorsqu’il a fait passer à Elizabeth Teissier, astrologue réputée pour ses prédictions non advenues, une thèse de doctorat, qu’il avait dirigée, sur « l’ambivalence de la réception sociale de l’astrologie ». Trois cents sociologues avaient signé une pétition adressée au président de l’université Paris-Descartes pour protester. Quatre prix Nobels français avaient également protesté contre le titre de docteur délivré, et, de l’analyse faite par de nombreux scientifiques, la thèse ne pouvait être validée.
« Le temps de la compassion ne doit pas exclure le temps de la réflexion » nous dit Maffesoli en tête de sa chronique. Le mieux serait qu’il s’applique la formule à lui même, car ses livres sont aussi truffés d’à peu près sociologiques et scientifiques que la thèse d’Elizabeth Teissier.
« C’est l’idée même du socialisme, voire de la social-démocratie, qui n’est plus congruente avec l’esprit du temps. In « La crise est dans nos têtes » page 17.
Le contrat social est dépassé. ‘Idem page 19).
Nicolas Sarkozy est postmoderne » (Idem page 55).Il faut savoir que Michel Maffesoli est un grand utilisateur du mot postmodernité. Lui qui ressasse indéfiniment que « nous sommes, actuellement, captifs de mots obsolètes », n’hésite pourtant pas à fatiguer ce mot.
Mais de cela il ne semble pas être conscient. Aussi peu sociologue que doué d’introspection, (la sociologie requière une méthode de travail qui lui est étrangère), il a au moins une excuse, il a une haute idée de lui même. Il faut aller lire « Françounet et Mandounnette », un texte qui s’apparente à une petite nouvelle, dans son livre « la République des bons sentiments ». Il y met en scène un personnage qui lui ressemble comme une goute d’eau, « invité permanent des grands colloques internationaux, titulaire de divers doctorats « Honoris Causa », et, tout à l’avenant, qui « n’avait pas l’heur de plaire au tout petit monde universitaire de son pays. Essentiellement il empêchait de penser en rond. Et à lascience préférait la connaissance. En bref, hétérodoxe, iconoclaste, mauvais sujet, scélérat ! ».
Au final, on ne sait si « La crise est dans nos têtes », titre d’un livre écrit par lui en 2011. A coup sur on se pose la question : Pourquoi une page entière pour un tel penseur « scélérat » dans Libération ?
Le texte de Maffesoli dans Libération:
http://www.liberation.fr/liseuse/publication/07-12-2015/1/#1418658