Les mots de Hollande dans son interview au Monde étaient ceux d’un insuccès qui tourne en rond depuis 26 mois. Mais le camp des frondeurs du PS, grossi désormais des Montebourg et Hamon, peut être bientôt de Aubry et de quelques autres, tient-il des propos qui aient une chance de convaincre, sinon le Président ou son Premier ministre, tout au moins les citoyens ? La question mérite d’être posée.
Car, à se contenter de prôner la relance par la demande en place ou en complément de la relance par l’offre, dont il est évident que celle ci ne suffit pas, n’est ce pas, une fois de plus, aligner un concept dont l’abstraction ne parle pas, ou peu, à ceux à qui on s’adresse.
Et ceux à qui on s’adresse, qui se sentent trahis, et par les mots de Hollande, et par ce qu’il fait ou ne fait pas, qu’attendent ils ? A lire les analystes, ce serait « l’exigence de changement », un « autre modèle », ou encore « carrément un changement de régime », comme l’a écrit Libération dans son édition du 25 aout.
A lire Montebourg et Hamon, il faut « questionner l’usage des 50 milliards d’économies dans les dépenses publiques, et leur corollaire de 30 milliards pour les entreprises ». Certes, mais ensuite ? Quelles précisions apportent ils sur un contenu, sur un éventuel changement d’action ? Rien de vraiment précis.
Car en politique comme dans la guerre, le nerf, c’est l’argent. Et l’argent de leur politique mal précisée, où le prennent ils ?
Alors, les citoyens, qui ne sont pas nés de la dernière pluie, pourquoi les suivraient ils ?
Ils ont élu l’ennemi de la finance à l’Elysée. Pour être ensuite trahis, car l’ennemi n’est jamais entré rue du Faubourg Saint Honoré. C’est le Hollande copinant avec Gattaz qu’ils y ont trouvé, celui qui n’a pas tenu sa promesse d’une vraie réforme bancaire, celui qui n’a plus envisagé de grande réforme fiscale, qui au lieu de mettre en place un plan de lutte contre l’évasion fiscale et la criminalité financière, de certaines banques, de certaines entreprises, a toléré durant trop longtemps un ministre des finances, Cahuzac, dont le sport caché était d’avoir des comptes secrets en Suisse ou à Singapour.
Donc, au delà des concepts mis en concurrence pour la relance, offre contre consommation, il serait bon d’apporter aux citoyens quelque chose de bien réel, avec un soupçon de symbole de gauche en plus.
Par exemple leur dire que l’Etat, qui n’a plus les moyens de sa politique, pourrait les retrouver en s’en prenant à tous ceux qui trichent et qui fraudent, en faisant rendre gorge aux évadés fiscaux, en votant des lois destinées à empêcher que les entreprises s’organisent, ce que font exactement celles du CAC 40 aujourd’hui, pour ne pas payer les impôts qu’elles doivent au pays, juste contribution au projet commun. Annoncer que l’urgence est d’engager la voie de la réforme fiscale afin que ce ne soit plus les privilégiés de la rente qui s’adjugent les résultats du travail.
A l’heure où Mélenchon nous reparle de changer de République, il serait bon de montrer que dans celle ci, dès aujourd’hui, il est possible de vouloir.
Notre époque aux mille risques et aux mille crises demande aux politiques de retrouver leur force et leur courage, oubliés dans les années de la folie financière.
Il faut ouvrir notre monde aux idées novatrices et concrètes. C’est désormais le crédo dans l’économie. Il faut que ça le devienne dans la politique.