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Billet de blog 27 octobre 2014

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Valls écrit ‘’À la recherche temps perdu’’. Pour se faire un avenir.

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Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

Ce qui caractérise Valls comme Hollande, les gauches comme les droites, hier comme aujourd’hui, c’est tout à la fois le désir de remonter le temps perdu ; l’oubli des principes et des valeurs qui les caractérisaient et les différenciaient ; la complicité active ou passive avec les puissances de l’argent.

Machine à remonter le temps. Valls n’est pas Wells.

En 2012, Hollande avait la possibilité de se montrer rassembleur en faisant alliance au centre, avec Bayrou, qui avait fait une campagne anti Sarkozy très axée sur le thème de la moralisation de la vie publique. Après avoir annoncé voter Hollande au second tour, contribuant à le faire élire avec des voix du centre, Bayrou, qui bêtement n’avait rien négocié, a fait le pied de grue durant des mois à la porte de l’Elysée dans l’espoir d’un tour de danse. En vain. Il ne lui restait plus qu’à retourner vers ses amis de droite. On eut Bayrou-Borloo, Bayrou-UDI, Bayrou-Alternative, Bayrou-Juppé. Depuis, le retour de Sarkozy lui redessine, croit-il, un futur. Il nous l’a joué hier Bayrou-Valls.

Car Valls, tout à sa stratégie post Hollande, a cru pertinent de lui faire du pied. On ne sait trop pourquoi. Il veut à son tout rassembler, (le rassemblement  a toujours été mode. Voir Sarko2 le retour, Bayrou 22 l’immuable). Mais voir un chef de gouvernement qui a du mal à rassembler sa gauche, qui donne tous les jours des gages au Medef, finir par imaginer un centre prenable, c’est vouloir revenir 30 mois en arrière. Sauf que 30 mois de Hollande ont plombé la gauche pour longtemps, et Valls par la même occasion. Lorsqu’on voit des municipalités, qui en temps normal auraient du été prises d’évidence par la gauche, être retombées dans les mains des plus discutables Balkany, Ceccaldi-Raynaud, Santini, etc. on voit à quel point Valls a perdu le sens de la réalité. Ce ne sont pas les Le-Foll ni les Le-Guen qui le lui rendront.

Bayrou veut la dissolution.

Mais proposer une danse à Bayrou, c’est offrir à bas prix l’occasion unique à ce dernier d’envoyer à Hollande ‘’le coup de pied d’âne’’ de l’humilié. Et Bayrou n’a pas perdu de temps, puisqu’il a aussitôt relancé l’idée de la dissolution, se disant « prêt à travailler aussi bien avec Juppé qu’avec Valls ». Sauf qu’en cas de dissolution, Valls disparaitrait corps et âme dans la tourmente électorale. Comme la majorité des élus du PS. Bayrou le sait bien.

A vouloir jouer fin guidon Valls se prépare donc une sortie de virage prévisible. On le croyait meilleur pistard. 

L’oubli des principes et des valeurs.

L’oubli des valeurs, des principes, des ancrages originaires, est le point le plus partagé par les hommes et les partis politiques aujourd’hui.

Le vieux parti gaullien ‘’de la France indépendante’’ est devenu ce parti de boutiquiers qui se battent à coup de comptes truqués, en attendant de se vendre à un président déchu qui, n’arrivant pas lui même à rendre ses discours attractifs, est contraint de demander à Guaino de revenir.

Le centre, qui ne se croit jamais plus central que lorsque ses composantes sont mal unies, est depuis des années à mille lieux des valeurs qui l’ont fondé : Catholicisme progressiste de Marc Sangnier, Démocratie chrétienne, éducation populaire du personnalisme. Et depuis que Bayrou a soutenu aux dernières municipales André Santini à Issy les Moulineaux, lui même élu par des militants, pas gênés, à la présidence du parti UDI dans les Hauts-de-Seine, on n’attend plus que le centre nous reparle de moralisation de la vie publique.

Quant au PS, est il encore utile de tirer sur l’ambulance ? Mais à lire Jacques Julliard, dans Marianne, pour qui « Hollande est l’ultime maillon de la chaine du renoncement », et  Jean-Claude Michéa, dans le dialogue engagé avec celui ci dans « La gauche et le peuple » où il  pointe « l’abandon progressiste de toute référence de la gauche moderne aux idéaux fondateurs du socialisme », on s’explique l’hémorragie des militants et le désaveu d’un peuple désormais sans boussole. Il ne semble pas qu’on trouvera la boussole dans le sac de voyage de manuel Valls, ni dans celui d’aucun des éléphants dont les textes pour les états généraux lancés par Cambadélis sont d’un convenu hors de saison.

Les amis de la finance. Et de la criminalité financière ?

La conséquence de l’oubli des principes et des valeurs est avant tout illustrée par deux points.

La soumission à la finance et aux banques d’abord.

Il suffit de lire à ce sujet l’économiste Gaël Giraud dont on ne retiendra que sa dénonciation de la loi dite de « séparation et de régulation des activités bancaires ». Il n’hésite pas à traiter d’allégations mensongères le communiqué de presse de la rapporteuse du projet de loi, Karine Berger. (Dans sa préface à ‘’Mon amie c’est la finance !’’ de Tricornot, Thépot, et Dedieu).

La  complaisance pour la corruption, la fraude, la tricherie, l’évasion fiscale et, on peut le dire, la criminalité financière, ensuite.

La multiplication des affaires le prouve amplement. Et l’OCDE, qui n’est pas un repaire de gauchistes, le dit ouvertement, ainsi que le rapporte le site « Acteurs publics » : « Le groupe de travail de l'OCDE dédié à ce sujet, (la corruption), a exprimé "d'importantes préoccupations quant au caractère limité des efforts" de la France en la matière ».

D’où l’importance de l’appel lancé dans Mediapart : « Nous, citoyens contre la corruption ». Il a déjà reçu plus de 4000 signatures.

« La corruption met l’Etat de droit en péril et installe une insupportable fatigue démocratique » y est il écrit, avant « d’appeler les citoyens de notre pays à une mobilisation civique pour faire sauter les verrous institutionnels, culturels, politiques et judiciaires qui empêchent l’efficacité et autorisent le pire. Il est urgent de s’opposer réellement à la corruption ».

Que faire ? Redonner à l’Etat les moyens de sa politique. C’est possible.

Comme le disent des jacques Julliard, Pierre Larrouturou, Gaël Giraud, et bien d’autres, « Oui, on peut s’en sortir ». (C’est le titre de couverture du magazine Marianne de 24 octobre).

Jacques Julliard : «  Il ne faut pas compter sur les partis politiques ou les syndicats pour sauver le pays, mais sur le peuple ».

Edwy Plenel, dans son livre « Dire non » : « La nouvelle donne française suppose un peuple qui adhère, s’active et se mobilise ».

Pierre Larrouturou : « En 1989, ce sont des hommes et des femmes sans « la moindre importance » qui ont changé le monde. Aujourd’hui, alors que le système néolibéral s’effondre, c’est à nous citoyens, de dire dans quelle société nous voulons vivre. Elle est à notre portée ». (Dans son livre ‘’C’est plus gave que ce qu’on nous dit’’).

Et pour s’en sortir, il faut redonner à l’Etat les moyens de sa politique. Ils sont à portée de main. Il faut « Reprendre la main » comme le dit « Nouvelle Donne ».

Cela passe par la lutte contre l’évasion fiscale, contre la fraude, par la confiscation des biens appartenant à la criminalité financière, etc.

Quelques pistes d’action :

Donner à l’administration fiscale les moyens de récupérer 10 milliards d’euros/an, en mettant fin aux escroqueries à la TVA par des sociétés créées dans le seul objectif de siphonner l’argent public (Marianne du 24 octobre).

S’inspirer des italiens qui grâce à leurs lois sur la confiscation des patrimoines des corrompus et des mafieux a pu saisir des dizaines de milliards d’euros pour les restituer à la collectivité.

Interdire aux institutions françaises d’être liées à des entreprises installées dans des paradis fiscaux. Un exemple : La Caisse Des Dépôts signalée en 2012 comme ayant investi dans une société (agréé par l’AMF) gérant un hedge fund aux Iles Vierges Britanniques.

Donner au Parquet financier les moyens de ne plus dépendre du bon vouloir de Bercy.

Rendre les douaniers et les policiers, requis par la justice financière, indépendants de leur hiérarchie.

Faire voter une loi française copiée sur la loi américaine Facta contre l’évasion fiscale.

Donner à la justice financière les moyens de traquer l’évasion fiscale qui, d'après le syndicat Solidaires-Finances publiques se monte en  France  entre 60 et 80 milliards d'euros chaque année.

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