Alexandre Anizy a publié un article, sur son blog de Médiapart, concernant l’ouvrage « écrits libertaires » d’Albert Camus récemment publié.
Voir http: //blogs.mediapart.fr/blog/alexandre-anizy/300813/la-touche-libertaire-dalbert-camus
Un article bienvenu sur un livre qui a embelli mes vacances et que je me permets de compléter. J’espère que son auteur ne m’en tiendra pas rigueur.
Lecteur du Combat des années 60, je connaissais le Camus journaliste des années 45/47, mais pas le Camus ami des libertaires ni ses écrits dans leurs revues.
Une belle découverte qui, du coup, place à mes yeux camus au dessus de bien des intellectuels d’hier et d’aujourd’hui. J’entends les intellectuels médiatisés.
Comme le dit l’introduction : « les liens de Camus avec les antiautoritaires, ses amitiés avec la mouvance anarchiste, les conséquences de son œuvre pour la pensée sociale ont été oubliés, marginalisés, mis à l’écart ». Voilà une chose de réparée.
L’ouvrage, publié par Indigène et Egregores, regroupe les articles selon les revues ou les ‘libertaires’ pour qui ils ont été écrits. Louis Lecoin et ses amis. (Oui le Lecoin qui a dénoncé la torture en Algérie) ; Fontenis, Leval, et Joyeux ; Samson, Proix et Maitrejean ; Monatte enfin. Des noms bien oubliés.
Et on sera surpris par cet engagement entier de Camus, mais équilibré par cet humanisme qui l’a rendu supérieur aux Sartre and Co.
Camus représente nous dit Lou Marin, « une conceptions mesurée de la révolte, pensée jusque dans ses limites », et « son refus de sacrifier des êtres humains pour un avenir hypothétique définit toujours les contours d’une éthique révolutionnaire acceptable ».
Dés lors on appréciera (ou pas), ses positions face à Breton ou à Sartre, son commentaire de Bakounine, sa prise de position lors des émeutes de Berlin où il n’a pas peur d’affirmer lors d’une réunion publique que « nous sommes ici parce que les ouvriers de Berlin risquent d’être trahis après avoir été tués, et d’être trahis par ceux-là mêmes dont il pouvait espérer la solidarité », entendez ‘les communistes’ et particulièrement les communistes français et leur organe, l’Humanité, qui nous ont fait vivre dit Camus « la double mystification qui prostitue jusqu’à notre langage ».
Il y a beaucoup à garder de cette lecture. Ce que pense Camus des intellectuels, le poids des mots dont René Char a témoigné. Mais aussi à découvrir, comme ce qui a opposé Camus à Domenach, le directeur de la revue Esprit, dont on avait un meilleur souvenir ; ce qu’il pensait de « la déchéance de la gauche » ; ou encore son intervention pour que soit publiée une lettre de Simone Weil à Bernanos dont les propos sur les exactions des partisans de Franco provoquent de sa part un témoignage en miroir sur les exactions des républicains.
Ce qui anime la pensée de Camus en permanence (comme celle de Bernanos et de Simone Weil) est le refus des mystifications. Nous sommes en présence, a écrit, dans un texte repris dans l’ouvrage Lazarévitch, en 1957, d’un des rares écrivains qui n’acceptent pas de se laisser corrompre.
Il y a bien plus encore. Il faut aller y voir, comme on dit.
Je ne retiendrai pour terminer qu’une seule phrase de Camus. « Oter au mensonge son droit de cité ».Un programme de rentrée 2013.