"Quand c'est flou, c'est qu'il y a un loup". Avec Macron, l'électeur est servi. Après le 18 juin, progressivement la fumée se dissipera et les ordonnances de septembre réveilleront tout le monde. Ce sera trop tard. Le pro de la com aura réussi son coup d'état libéral et certains macronmaniaques s'en mordront les doigts. Les discussions avec les partenaires sociaux vont entrer dans le vif du sujet. Il s'agit bien de discussions et non de négociations. Une négociation est validée ou non à la toute fin. Dans le cas présent, les demandes des syndicats des salariés seront mises à la poubelle ou au mieux acceptées à la marge car les décisions sont déjà prises.
Les ordonnances vont valider le dogme défendu par le MEDEF et les tenants des théories économiques libérales: "il faut libérer le travail !" Assouplir le code du travail va créer de l'emploi. Il est un frein à l'embauche. Petit rappel: le code du travail fait son poids du fait des jurisprudences et des dérogations voulues par le patronat. Qu'en est-il donc après 30 années de dérégulations ? Commençons par les nouvelles formes de travail qui ont fleuri: auto-entrepreneuriat, portage salarial, intérim, temps partiels, CDD, CDD d'usage...En 2008, mise en place de la rupture conventionnelle (2,4 millions à ce jour). Parlons des CDI, la bête noire des patrons. 1/3 sont rompus la première année, ceux qui interviennent avant 2 ans ne coûtent pas chers à l'employeur. Ce type de contrat est moins protecteur qu'en Allemagne. Quant aux plans sociaux, les licenciements collectifs, la réglementation est moins contraignante qu'en Belgique, en Allemagne, en Suisse, au Luxembourg, en Italie, en Hongrie et en Irlande. Continuons avec les plans de sauvegarde de l'emploi (PSE) qui depuis 2013 sont confiés à l'administration du travail et non plus au juge judiciaire. En 2015 (Rebsamen), les employeurs peuvent à leur initiative regrouper le comité d'entreprise, les délégués du personnel et le CHSCT au sein d'une seule délégation (entreprises de 50 à 300 salariés). En 2015 (Macron), c'est le travail du dimanche qui est "libéré" et en cas de plan social, le groupe n'a plus à financer le plan d'une filiale en redressement ou en liquidation judiciaire. Le financement est à la hauteur des capacités de la filiale en faillite. Bonjour les montants d'indemnisation pour les salariés licenciés! En 2016 (El Khomri), primauté de l'accord d'entreprise sur l'accord de branche pour le temps de travail. Quant au volet sécurité pour le salarié, le compte permanent d'activité (formation, pénibilité) est à peine mis en ouvre que Macron annonce un moratoire ! La flexibilité, tout de suite. La sécurité, plus tard
Macron donc nous prépare une potion encore plus amère: 1- barémisation des indemnités prud'homales pour les licenciements abusifs (sans motifs réels et sérieux). On retire toute confiance aux juges des prud'hommes qui jusqu'à présent prenaient en compte dans leurs décisions l'âge du salarié, son ancienneté, sa situation de famille, ses probabilités de retrouver un travail... Sachant par ailleurs que le coût des indemnités pour les entreprises se situent dans la moyenne européenne. 2- primauté des accords d'entreprises sur les accords de branches pour les salaires. 3- assouplissement des licenciements économiques en prenant en compte les difficultés des entreprises non plus en regard du périmètre international mais du périmètre national. 3- une hausse de la CSG pour permettre la suppression des cotisations chômage et maladie pour les salariés. Très bien, on applaudit. Sauf pour les "riches" retraités qui perçoivent plus de 1200 € mensuel de pension. Ils compenseront la perte pour les caisses de l'Etat par une augmentation de leur CSG et sans contrepartie. 3- fin du paritarisme avec le projet d'étatisation de l'UNEDIC.
Depuis 2004, l'OCDE a démontré qu'il n'y a pas de lien entre dérégulation du marché du travail et baisse du chômage. L'inversion supplémentaire de la hiérarchie des normes qui est prévue débouchera avec les dérogations rendues ainsi possibles au niveau de chaque entreprise, à des accords perdants pour les salariés (voir l'expérience SMART et les 39 travaillées pour 37 heures payées ). Les accords de branches permettent de contrebalancer le rapport de force défavorable du salarié par rapport au chef d'entreprise. Avec ces prétendus accords au niveau entreprises, nous assisteront à une course à l'échalote entre les entreprises d'un même secteur d'activités pour mettre en place le moins-disant social. C'est l'avènement du chantage au licenciement et aux baisses de salaires. La concurrence sauvage entre les salariés. Toutes les raisons seront invoquées pour imposer d'une manière ou une autre, des mesures permettant de payer moins en travaillant plus, de supprimer des RTT, de minorer le taux des heures supplémentaires, de moduler le temps de travail à la convenance de l'employeur... On peut compter sur l'imagination de certains patrons.
Le résultat pratique, hors le stress supplémentaire pour les salariés engendré par toutes ces mesures et la dégradation de leurs conditions de travail est l'amplification de la déflation salariale qui est une cause majeure de la mollesse de la croissance dans la zone euro. Et qu'on nous ne serve pas encore la même petite musique sur le cas allemand. Ce n'est pas la réforme du marché du travail qui a permis à ce Pays de mieux se sortir de la crise de 2008 mais la pratique de la cogestion, l'utilisation des comptes épargnes temps et le chômage partiel qui a évité les licenciements. Mais également sa forte capacité exportatrice grâce à des produits hauts de gamme, à forte valeur ajoutée et d'excellente qualité. La comparaison, hors quelques secteurs, avec les exploits de nos industriels est cruelle. Les coûts salariaux dans l'industrie n'ont rien à voir avec le manque de compétitivité de la France. L'essentiel du problème se situe au niveau du hors- coût.
Alors, pour quelles raisons les salariés vont ils voter pour les représentants de la future majorité présidentielle ? le masochisme ? l'aveuglement ? le battage publicitaire autour du sublime président orchestré par ses équipes avec la complicité des médias et leur comportement moutonnier ? Toutes ces raisons à la fois ? Un mystère qu'il faudra bien un jour élucidé.
Un dernier "mot" sur les -socialistes- dénaturés qui ont rejoint la République en Marche pour les législatives en conservant l'étiquette P.S ( mais sans trop le dire...) : ils seront balayés. Et là, l'expression "dégagez" conviendra parfaitement. (Je conseille à nouveau la lecture du mensuel Alternatives Economiques d'où nombre des informations sur les réformes passée et en cours contenues dans cette article sont issues Voir n° de juin 2017)