Dans le précédent billet https://blogs.mediapart.fr/berthe-dominique-henri/blog/101118/dette-publique-faut-il-sinquieter-partie-1, nous avons vu comment s' était constitué la dette publique. Mais qui la détient ? la Banque de France : 20%, les compagnies d'assurances : 18%, les banques : 7%, les fonds d'investissements: 1% ; la Banque centrale européenne: 18%, les non-résidents: 56%. A noter que du fait de ses excédents budgétaires, l'Allemagne " rembourse sa dette ancienne sans en créer de nouvelle... les investisseurs en quête de placement sans risque en Europe " devraient, faute de dette allemande à financer, se tourner vers la dette française. A quoi a servi la dette française ? L'argent a-t-il été utilisé n'importe comment ? Pour le savoir, il faut utiliser un indicateur simple; " Il suffit de recalculer le déficit budgétaire hors dépenses d'investissements publics. Si le déficit persiste, cela signifie qu'il est dû à un surcroît de dépenses de fonctionnement et de remboursement de la dette par rapport aux recettes fiscales. Sur la période 1978-2017, le solde budgétaire hors investissements publics a été excédentaire de 0,8 % du PIB. La dette de l'Etat a donc à peu près servi à financer intégralement de l'investissement hors les années de fort ralentissement de l'activité ( le début des années 1990 ) et la période de crise des subprime et de la zone euro ". Intéressant non ? Doit-on s'inquiéter du coût ? Une remarque concernant le calcul de la dette, est-il logique de le faire en utilisant le ratio montant de la dette qui est un stock accumulé sur plusieurs exercices avec la production d'une seule année, le PIB ? " De manière plus pertinente, on peut s'intéresser au coût de la dette. Les intérêts payés chaque année en pourcentage de PIB ramènent un flux ( de paiement ) à un flux ( de production ). Et une rapide montée du ratio signale un problème certain…la France ne paie pas plus aujourd'hui que ce qu'elle payait quand sa dette ne représentait que 20 % de son PIB ( ! ). Lorsque les banques centrales ...se sont engagées dans des politiques monétaires restrictives pour lutter contre l'inflation ( note perso: la terreur des rentiers ), les taux d'intérêt ont beaucoup monté ". Résultat, en 1997, " les intérêts à payer sur la dette publique ont culminé à l'équivalent de 3,5 % du PIB " . Depuis " l'épargne mondiale disponible pour s'investir s'est retrouvée à un niveau plus élevé que ce que les entreprises et les administrations publiques étaient prêtes à investir poussant le loyer de l'argent - les taux d'intérêt - à la baisse ". S'est ajouté les politiques monétaires des banques centrales, suite à la crise financière et celle de la zone euro, " qui ont maintenu les taux d'intérêt à un niveau faible ". A ce sujet, la BCE a indiqué qu'elle " ne recommencerait à remonter graduellement ses taux d'intérêt qu'après 2019. Enfin la baisse du volume de la dette allemande...devrait inciter les investisseurs à vouloir acheter de la dette française, ce qui contribuera également à en maintenir le coût à un niveau faible ". Il y a cependant 3 sujets d'inquiétude. " Une nouvelle crise importante - par exemple des tensions dans la zone euro dues aux problèmes budgétaires italiens, à un Brexit dur, à la faillite retentissante d'un Deutsche Bank mal en point etc, - emmènerait la dette vers de niveaux plus risqués et moins contrôlables...ensuite, la tendance structurelle de la montée de la dette française résulte pour une partie significative de l'idéologie anti-impôt des gouvernements de tous bords qui se sont succédé au cours des vingt dernières années. La présidence Macron poursuit la même trajectoire et adopte le même discours volontaire de réduction de la dette...enfin s'il faut s'inquiéter d'une dette, c'est aujourd'hui plutôt celle des entreprises privées qui suscite des craintes...on constate une montée rapide de l'endettement des entreprises françaises, une utilisation d'une partie des fonds empruntés pour la spéculation financière… en incluant les prêts entre entreprises, qu'elles soient d'un même groupe ou étrangères l'une à l'autre, la Banque des règlements internationaux ( BRI )... constate un taux d'endettement de 134,1 % du PIB. Un niveau bien plus élevé que celui de la dette publique . "
Remarques personnelles : les gouvernements qui se succèdent brandissent la menace d'une dette incontrôlable que les générations futures devront payer ( il ferait mieux de s'occuper de la dette environnementale, celle-là réelle, incommensurablement plus élevée, et aux conséquences dramatiques pour l'Humanité. Il ne s'agit pas d'une dette comptable que l'on peut rayer d'un coup de crayon, elle ! ). Ils cachent le fait que celle-ci augmente au fur et à mesure des crises financières et des politiques fiscales iniques qui favorisent les inégalités sociales avec ses conséquences sur la cohésion sociale et qui creusent les déficits. Leur discours permanent sur des impôts qu'il faut absolument baisser à une conséquence délétère: le non-consentement à l'impôt devient un comportement partagé par une majorité de citoyens qui ne se rendent pas compte qu'ils se titrent une balle dans le pied. Un impôt progressif sur les revenus dont les taux augmentent par tranches selon le revenu imposable est le seul impôt juste. Il assure la solidarité nationale, chacun " participant selon ses capacités contributives ". Les néolibéraux haïssent la solidarité. Toute baisse d'impôt bénéficie en premier lieu aux plus fortunés qui en ramassent la plus grosse part. Chacun devrait s'en rendre compte plutôt que prendre pour argent comptant les slogans d'idéologues fanatisées par des vieilles lunes, celles du libéralisme économique qui nous ont amené aujourd'hui au bord du gouffre !
Je vous conseille de lire l'article complet de C.Chavagneux dans Alternatives Economiques.