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Billet de blog 29 mars 2018

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Intelligence arificielle, danger réel , nouvel Eldorado ?

C.Villani a donc présenté son rapport au Gouvernement. La brève de l'agence Reuters relevée aujourd'hui dans Médiapart en reprend les grandes lignes. Mais la question de l'éthique ne sera pas abordée

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C.Villani a donc présenté son rapport au Gouvernement. La brève de l'agence Reuters relevée aujourd'hui dans Médiapart en reprend les grandes lignes:

" La France doit mettre en place un "écosystème de la donnée", se concentrer sur des secteurs stratégiques et endiguer la fuite des cerveaux si elle veut faire entendre sa voix en matière d'intelligence artificielle face à Pékin et Washington.... le rapport recommande d'éviter les logiques de saupoudrage" et de se concentrer sur quatre secteurs : la santé, l’écologie, les transports-mobilités et la défense-sécurité..... Tous représentent un défi majeur du point de vue de l’intérêt général, tous requièrent une impulsion importante de l’État et tous sont susceptibles de cristalliser l’intérêt et l’implication continue des acteurs publics et privés...." Les pistes et moyens sont listés dans les grandes lignes afin que la France mais également l'UE ne se fassent pas distancer dans ce domaine par les Etats-Unis et la Chine principalement. Les enjeux touchant à notre indépendance économique voire politique sont à l'évidence primordiaux. Laisser passer le train Intelligence Artificielle aurait donc des conséquences cataclysmiques. Bien. Tout cela ressort de la logique, du "sensé". On ne peut qu'approuver et applaudir des 2 mains.

Mais une question liée à la recherche sur l'I.A et ses applications ne sera pas abordée: celle de l'éthique. Le politique, le scientifique, le monde des affaires ne se la poseront pas. Au mieux, ils "botteront " en touche, utiliseront de formules toutes faites, reporteront le problème à plus tard car  " le moment n'est pas venu ", affirmeront avec un certain cynisme que ce n'est pas leur problème ( les scientifiques ) et que c'est à la société civile de répondre aux questions posées, de mettre des garde-fous et d'imposer le vote de lois pour se préserver des dérives et autres dangers pour le citoyen libre et informé ( évidemment ), citoyen capable d'agir sur son destin en toute connaissance de cause. On lui reconnaîtrait ainsi la faculté de se servir de son libre-arbitre pour prendre les bonnes décisions et surtout les imposer aux décideurs finaux, dans un régime démocratique, le Parlement. Or cet argument est fallacieux pour plusieurs raisons. 

Dans la compétition engagée par les Etats, la capacité d'action des citoyens malgré les réseaux sociaux est limitée par la pression économique et financière. Celle-ci s'exerce au nom d' arguments-massues, l'indépendance et l'emploi. La recherche du profit ne sera jamais citée mais le profit est bien sûr indissociable de la compétition. Le profit en lui-même n'est pas un mal, tout dépend ce qu'on en fait. Question du partage à laquelle les libéraux ont répondu depuis plus de 30 ans : d'abord l'actionnaire et les hauts managers. Les miettes pour la piétaille. Le poids politique des géants économiques comme les GAFA par exemple impacte directement la capacité des sociétés à réagir et tend à leur donner un avantage "comparatif" indéniable dans la prise de décision qui affectera le citoyen au quotidien. Par ailleurs, s'il existe encore des Etats démocratiques dans toute l'acception du terme (les pays nordiques par exemple), qu'en est-il du reste du Monde ? Dictatures, démocratures, ploutocraties ( comme les Etats-Unis ) constituent aujourd'hui la majorité des régimes politiques. Comment dans tous ces pays les citoyens pourraient-ils imposer des lois adaptées au Bien commun ? Ainsi les pays démocratiques n'ont d'autres possibilités que de participer à la compétition. Il n'y a plus le choix. Le rapport Villani confirme cette version du TINA: il n'y a pas d'alternative.

Les découvertes en Science ne peuvent être cataloguées de bonnes ou de mauvaises. Ce sont bien sûr les applications qui deviennent bonnes ou mauvaises pour l'Humanité. L'I.A dans le domaine de la Santé, de l' Ecologie, bravo. Allons-y ! Ce sont 2 domaines qui selon les solutions apportées par l' I.A. peuvent procurer du mieux-être pour tous, créer un environnement bénéfique au développement de chacun. Si l'I.A peut résoudre la Question du réchauffement climatique et faire en sorte que dans 100 ans la Terre reste habitable dans de bonnes conditions, alors banco ! Et vite, même très vite. Nous sommes  "à la bourre", le retard s'accumule, la "dead-line" comme on dit est peut-être déjà atteinte. Mais l'I.A. dans le secteur de la Sécurité, qu'en attendre de bénéfique ? Sécurité-surveillance-contrôle-punition-adaptation des comportements individuels à un comportement obéissant standardisé voulu par les régimes autoritaires en place. Oui, certainement. La sophistication et l'ensemble des moyens qui seront mis à disposition par l' I.A. ( mais pas seulement ) renforceront les Etats autoritaires et par effet de capillarité le nombre d' Etats qui deviendront à leur tour autoritaires c'est à dire en réalité totalitaires.

Avenir proche ? Les capacités-mémoires des machines ne progressent pas de façon linéaire ou arithmétique mais de façon quasi exponentielle. Supposons un coefficient multiplicateur de 2 en 10 ans dans les années 1970, il sera de 3 en 5 ans aujourd'hui. Je ne connais pas les chiffres mais  le phénomène est réel. Ce coefficient est de plus en plus élevé dans un temps donc de plus en plus court. Chaque progression en capacités contient en elle-même une potentialité non prédictible ce qui signifie que les impacts sur la Société deviennent de plus en plus difficiles à mesurer donc à contrôler. La recherche scientifique devient une fuite en avant qui ignore les signaux d'alarme. Le déterminisme des sciences s'impose à notre libre-arbitre.

Nous pouvons nous rassurer ( consoler ?) en constatant que les machines, les robots n'ont et n'auront probablement pas de conscience ( âme ). Ils ne pourront pas s'exclamer "Eureka". L'intuition n'est pas un composant chargeable dans des mémoires. Mais nous savons que les programmeurs leur donnent des capacités d'apprentissage et donc d'autonomie dans la réalisation de leurs tâches. Les robots peuvent battre les champions du monde d'échecs ou du jeu de Go mais ils ne savent pas qu'ils jouent aux échecs ou au jeu de Go. Ils peuvent "reconnaître" un chien ou une fleur mais ils ne peuvent ressentir ce qu'est un chien ou une fleur, ce que ces 2 images suscitent chez l' Homme comme émotions, associations d'images, ou idées qui sont en relation avec l'histoire de l'individu. La machine n'a pas de vécu. Cependant, l' I.A .pourra donner à la machine les moyens techniques pour la prise de décision et des fonctionnalités qu'elle "jugera utiles " de mettre en action pour se - protéger - de l'homme par exemple ou de se réparer de façon autonome et d'acquérir ainsi un pouvoir sur la Collectivité. La littérature est riche d'hypothèses et d'exemples en la matière....

Dernier point et non des moindres. Quel sera l'impact de l' I.A  ( et des nouvelles technologies en général ) sur les emplois et sur la structure de ces emplois. Renforcement de la domination d' élites " professionnelles très diplômées et bien rémunérés versus un nouveau prolétariat de plus en plus important et une classe moyenne inexistante ? Quel niveau de compétence requise ? Quelle formation et pour qui ? Quels seront les gagnants et les perdants ? Combien d'emplois créés et combien d'emplois détruits ? Quel impact sur le temps de travail dans les entreprises et les administrations publiques ? Des questions parmi d'autres qui seront effleurées par les décideurs politiques car ils ont conscience que le devenir de l' Humanité échappe à leur compétence et à leur pouvoir. La question de l' I.A. est un exemple qui illustre la problématique essentielle du rôle de la Science dans nos Sociétés et de son impact sur nos vies. Si nous prenons l'exemple de l'énergie nucléaire il n'est guère rassurant de constater que les tenants de cette énergie issus de toutes nos grandes écoles sont incapables de résoudre les problèmes, dont celui du traitement des déchets, qu'ils ont créés eux-mêmes. L'Homme a façonné la Nature à sa convenance avec les conséquences que nous connaissons, la Science façonne aujourd'hui l'Homme sans que les consciences ne s'éveillent puissamment. Tout ça Pour Quoi ?

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