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Billet de blog 12 mars 2013

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Ces réseaux qui ont pris le pouvoir

Le Figaro Magazine du 1er mars titrait : « ces réseaux qui ont pris le pouvoir ». En clair, les élus ont perdu le pouvoir réel, et notre démocratie a dérivé vers un système oligarchique. Ce constat vaut pour la plupart des pays du monde. Pour redresser cette situation, il faut d’une part déclarer la guerre à la corruption, d’autre part encadrer le lobbying, et enfin instaurer des procédures rigoureuses dans le travail parlementaire.

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Le Figaro Magazine du 1er mars titrait : « ces réseaux qui ont pris le pouvoir ». En clair, les élus ont perdu le pouvoir réel, et notre démocratie a dérivé vers un système oligarchique. Ce constat vaut pour la plupart des pays du monde. 

Pour redresser cette situation, il faut d’une part déclarer la guerre à la corruption, d’autre part encadrer le lobbying, et enfin instaurer des procédures rigoureuses dans le travail parlementaire.

 Déclarer la guerre à la corruption. Dans ce domaine, nous sommes très mal classés sur la planète selon le classement de l’ONG Transparency International. (25ème place en 2011). A l’inverse, depuis plus de dix ans le Danemark est le pays du monde qui a la meilleure note. Fixons–nous l’objectif de nous hisser au même niveau que le Danemark à la fin du présent quinquennat. C’est le minimum. Chaque année, Transparency International explique les raisons du classement de chaque pays (dont la France), en pointant ses bonnes et ses mauvaises pratiques (instructif !). Les solutions sont donc connues.

 Encadrer le lobbying.  Avant de voter une Loi, il est normal que les responsables politiques recueillent les avis de toutes les personnes éventuellement concernées par le projet. Cela implique qu’ils sachent aussi résister aux pressions des lobbies les plus puissants. Le titre du Figaro Magazine : « ces réseaux qui ont pris le pouvoir », montre qu’ils ne savent plus résister. Or, il y a des solutions. Outre la guerre à la corruption, il faut créer ce que l’on dénomme habituellement « la traçabilité de la décision  publique ». Il s’agit principalement de rendre publique la liste de toutes les personnes rencontrées lors de la préparation d’une Loi, et tous les arguments avancés lors de ces rencontres, et de responsabiliser fortement les ministres, les parlementaires et leurs collaborateurs, en instituant des règles strictes. Un débat passionnant sur ce sujet a eu lieu à l’Assemblée Nationale il y a quelques mois, avec l’intervention d’un représentant du Québec, l’un des pays les plus avancés dans ce domaine. Bref, on sait ce qu’il faut faire. Le Bureau de l’Assemblée Nationale vient d’ailleurs d’adopter plusieurs propositions dans cette direction. Il faut encore les enrichir, mais c’est un vrai pas en avant, sous réserve de les transcrire dans la Loi.

 Instaurer des procédures rigoureuses dans le travail parlementaire.

Le traitement qui fut donné à la Tva sociale et l’exemple typique de ce qu’il ne faut plus faire.

A quelques mois de la fin de son mandat, l’ancien Président de la République fit voter la mesure en urgence, sans chiffrer les résultats à en attendre, ni prévoir d’en dresser un bilan chaque année pendant trois ans. Impossible donc, de vérifier les conséquences exactes de la Loi, ni d’identifier ses éventuels effets indésirables, pour y remédier.

 Le nouveau président élu, adopta exactement la même démarche. Quelques mois après son élection, il fit supprimer cette Loi, sans chiffrer ce que la France allait gagner grâce à cette suppression, et sans prévoir de dresser un bilan de cette suppression pour vérifier que sa décision était la bonne.

 L’un comme l’autre estimaient sans doute qu’il était suffisant de les croire  sur parole. Du coup, les français ne sauront jamais si la Tva sociale était ou non une bonne idée.

 Comment éviter de tels errements ? Il faut décider qu’à l’avenir aucun projet de loi ne puisse plus être voté sans être précédé d’un exposé des motifs contenant : 

 -         une étude d’impact décrivant et mesurant l’effet attendu du projet de Loi sur chacun des trois piliers du développement durable (économique, social et environnemental) 

-         la date et les outils de mesure qui permettront de vérifier les effets de la loi projetée dans les trois domaines économique, environnemental et social, notamment son effet sur la baisse de la pauvreté en commençant par les plus fragiles et les exclus.

Avec une telle mesure, les Lois seront mieux pensées. Leurs défauts éventuels seront identifiés sans contestation, et pourront être corrigés en évitant les guerres stériles entre majorité et opposition. Si par malheur, s’étant laissé convaincre par un lobby très puissant, le législateur votait une Loi qui favoriserait un intérêt particulier au détriment de l’intérêt général, ce système objectif permettra de mettre en évidence cet effet non souhaité, et de le corriger sereinement. Le projet de Loi sur la séparation des banques aurait mérité une approche de ce type. Il n’est pas trop tard.

 Il me semble que les politiques peuvent reprendre le pouvoir, s’ils agissent au moins dans les trois directions suggérées ci-dessus, et, bien sur, s’ils mettent fin au cumul des mandats, sans reporter ces réformes aux calendes grecques…. sous la pression amicale des intérêts particuliers.

 Bertrand de Kermel

Président du Comité Pauvreté et Politique

www.pauvrete-politique.com

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