Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.
La cigale ayant chanté tout l’été Se découvrit aphone un jour d’hiver fatal. Notre croquenote bat le pavé En quête d’un quidam qui lui paye un cordial. Une fourmi vint à passer. On sait Qu’il en faut beaucoup pour l’intéresser. Qu’on lui pardonne, étant aveugle et sourde, D’avoir le sang de glace et l’âme lourde. La fourmi, rompue aux marches guerrières, Ne sait jouer que de la mandibule. La cigale l’aborde sans manières. Elle dessine dans l’air une bulle Avec une patte et de l’autre pointe Sa gorge. « Il te plairait, mon chant, veut-elle dire, Mais j’ai perdu la voix sur une quinte. » Aucune réaction, pas même un méchant rire. La cigale n’est bête qu’à demi : À penser dans l’épreuve elle met tout son soin. Elle saisit ce qui, chez la fourmi, Fait office à la fois de mâchoire et de main, Et l’approche de son cou fort enflé, De façon que l’insensible ressente Le martyre que c’est de ne pouvoir parler Lorsqu’on a soif et faim, et que la bise vente. Il arriva ce qu’il arrive bien des fois. La mâchoire n’a pas la notion du doigté. La cigale perdit la tête après la voix. Et puisque toute fable a sa moralité : Dans un royaume où les puissants prennent à cœur Non de l’être en amour, mais de l’être en rigueur, On ne touche pas en étant touchant, On n’a son aumône qu’en l’arrachant.
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