Ma vie est confinée entre lumière et obscurité mais aussi entre joie et tristesse. Poussières d’étoiles, je mène une guerre intérieure pour vaincre mes démons, et canaliser mes affects.
J’ai mille et une questions qui me taraudent l’esprit.
Qui suis-je ? Qu’est-ce qu’une vie accomplie ? Quelles sont les causes de ma transformation en un homo economicus ? Pourquoi tant d’injustices sociales ? Les inégalités ne cessent de se creuser. Pourquoi l’argent gouverne le monde ? Il fait et défait les relations internationales. De Washington à Riyad - de Pékin à Paris. Pourquoi tiennent-ils autant au mythe de la croissance infinie dans un monde fini ? Pourquoi, malgré la crise sanitaire, et son lot de conséquences néfastes, l’insidieux marché est toujours le roi ?
Pourtant, on sait tous que la santé n’est pas compatible avec l’économie de marché. Les drames s’enchaînent, tristement. Loin de moi l’idée de jouer les Cassandre, la catastrophe écologique est déjà là. Elle est réelle. Les experts du GIEC et d’autres scientifiques très sérieux, eu égard à leurs travaux de recherche sur le sujet, disent qu’il nous reste peu de temps pour réagir face au désastre en cours.
Par conséquent, un changement systémique à la hauteur des enjeux s’impose. Mais au nom du progrès, de l’innovation technologique et de la mondialisation heureuse, les élites politiques et économiques ont choisi de faire fi de la parole des experts. Je crois qu’ils souhaitent à tout prix maintenir le statu quo. L’inaction des dirigeants est un fait politique total. En guise d’exemple, le film satirique "Don’t Look Up" - métaphore puissante sur l’inaction climatique, l’illustre magnifiquement.
C’est la course sans fin au profit, et l’individualisme est à son paroxysme. 246 ans après, la théorie d’Adam Smith est toujours ancrée dans l’imaginaire collectif. Le capitalisme financier dicte sa loi partout. Ce système dévastateur, voire mortifère, a réussi à faire de nos vies des variables d’ajustement, rangées dans des tableurs Excel. Des statistiques.
L’injonction néolibérale est terrible. Peut-être qu'un jour, j’aurai des réponses à mes interrogations existentielles. Mais en attendant, je continue ma quête du bonheur. Ce bonheur que le philosophe de l’absurde, Camus définissait comme « l’accord vrai entre un homme et l’existence qu’il mène ».
Je veux jouir de véritables enchantements. Passer quelques nuits au Mali pour contempler les soleils de minuit du Djoliba. Me lover dans le creux des bras de Madame Aminata Dramane Traoré, femme debout au charisme lumineux et ouverte aux vents féconds du monde, malgré nos quelques désaccords politiques.
Pays de culture et de tolérance, chevillé du beau triptyque : Un peuple, un but, une foi. Mali, terre d’amour et de paix nonobstant l’irruption du djihadisme, et les sempiternels coups d’État. M’ouvrir à l’autre sans contrepartie - ne jamais ériger des bastilles. Semer des graines de partage dans mes bassins de vie, revoir ma façon d’habiter le monde, discuter de politique au sens philosophique et sociologique, in fine, au sens gramscien et bourdieusien. Penser humblement le pays de Senghor, d’Amady Aly Dieng, de Barham Diop, de Julien Jouga, en ces temps de crise démocratique dans toutes ses dimensions. Le Sénégal est en train de basculer vers un État orwellien. Les libertés publiques garanties par la Constitution sont menacées par « big brother ». Les digues cèdent, les unes après les autres…
Dans cette cité des bonheurs simples, là où gît l’horizon des possibles, j’irais à la rencontre des tisseurs d’avenir. Les artistes. Ceux qui décrivent sans fard notre condition humaine. Car à travers l’art, Ils nous offrent, avec un trop-plein de générosité, le tableau de nos joies éphémères et de nos souffrances éternelles, à l’aune de notre finitude. Les mots justes de Gaël Faye, la musique mystique de Baba Maal, les notes de guitare d’Ali Farka Toure, la kora de Toumani Diabaté, la plume affûtée et lucide d’Akhenaton, la voix gracieuse de Fatoumata Diawara, la poésie de Solaar, les clichés élégants d’Omar Victor Diop, libèrent mon corps des chaînes de la mécanique économique.
Ces belles âmes, créatrices de liens et de sens, soignent mes blessures invisibles, me consolent, m’électrisent, et mieux encore, elles m’invitent à aller au fond de ma condition humaine, eu égard aux grandes questions qui se posent aux Hommes, surtout celle-ci : quel est le sens de la vie ?
PBD