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Psychologue dans écoles. Parfois j'enseigne à l'Université.

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Billet de blog 18 avril 2022

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Hier encore, nous avions vingt ans.

Retour en 2002. La vie devant soi, et un monde à prendre, à faire voltiger, à révolutionner. Il y a vingt ans, nous étions dans la rue, à hurler notre amour pour l’Humanité, les gens. La Haine ne passerait pas, sous aucun prétexte.

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Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

Aujourd’hui, nous avons 40 ans et la rue nous appelle, en vain. Fatigués, nous sommes. Lassés, quelque peu. En lieu et place d’un 2002 qui résonne encore comme un trauma collectif, nous récoltons ce 2022 bancal. Qui n’a d’humain que nos cœurs qui battent la mesure d’un chaos qui s’annonce. Il arrive vite. Il arrive fort. Que mes congénères aient oublié le temps de la révolte, je ne m’en remets pas. La fille de son père est arrivée en tête dans ma tranche d’âge. Et moi j’ai chuté de dix étages. Il y a vingt ans, la jeunesse emmerdait le Front National. Les quadras que nous sommes devenus le plébiscitent. Que s’est-il donc passé? Qu’avons-nous raté pour en arriver à ce point rêche de non retour? Alors je sais bien que nos dernières années de citoyens ont été malmenées, remises en cause, insultées, même. On est clairement bercés par la maltraitance étatique depuis cinq ans. Mais en 2002, nous étions 80% à être d’accord sur le fait qu’on est tous des êtres humains. Sans exception. Nous étions dans les rues, à hurler notre amour pour le Vivant quel qu’il soit. C’était nécessaire. C’était vital. C’était urgent.

Aujourd’hui n’est pas le même qu’il y a vingt ans. Ça et là j’entends parler de peste, de choléra. Je croyais qu’on était en plein covid. J’entends des hallucinants “on n’a pas essayé” et direct je vomis. Sang + bile + yeux révulsés. A croire que l’Histoire ne suffit plus à ramener les consciences au bon endroit de la raison. Qu’est-ce qu’on n’a pas essayé, au juste? Le pire? On dirait qu’on a plusieurs vies, qu’on est dans un jeu vidéo où si cela ne nous plaît pas, si on meurt, bah on refait le film. Incroyable argument au sens propre du terme. Je ne crois pas qu’on puisse revenir en arrière et gommer un tel choix. Je ne crois pas qu’un peuple puisse se remettre d’avoir mis en présidence la représentante de l’anti-humain. Ça n’est pas possible, alors je répète. Ça n’est pas possible qu’on se remette d'avoir mis l'extrême droite en présidence. On devrait donc cesser cette nonchalance, balayer le “qu’ils se débrouillent” d’un revers franc  Parce qu’il y a un élément qui ne se négocie pas, qui jamais devrait se négocier.

Je n’aime ni la peste, ni le choléra, ni le covid. Que les choses soient claires : je ne porte pas dans mon cœur celui d’en face. Je déteste ce qu’il a fait depuis cinq ans : écoles, social, universités, gilets jaunes, les sous, les sous, les sous. Je hais d’avance ce qu’il programme pour le futur. Mais aujourd’hui, je ne me pose pas la question. Je n’ai pas oublié mes vingt ans. Je n’ai pas à réfléchir, pour savoir si je vais aller voter ou pas. Le nom de famille d’en face suffit. Je n’ai pas de choix à faire. J’ai un devoir à accomplir.

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