Serait-ce la tactique du silence médiatique employée pour faire sombrer l’affaire de l’agent double dans l’oubli ? Depuis trois jours, silence radio ici même sur le sort du « souffleur de sifflet » (whistleblower, lanceur d’alerte) qui ne s’attendait peut-être pas à être désavoué par ceux-là même auxquels il livrait ses informations (France entre autres).
Pas de dépêche de Moscou, n’empêche : on est capable de rédiger des pages entières sur des broutilles sans données pendant des semaines (scandale de la viande de cheval, sort de Depardieu, que sais-je encore…) et là, plus rien, circulez il n’y a rien à voir. Il n’a quand même pas disparu, si ? Ok, il est supposé ne pas nuire (davantage) aux intérêts étasuniens en utilisant une « tribune de propagande » que lui fourniraient les journalistes que l’on suppose à l’affût d’un scoop là-bas à Sheremetyevo, l’aéroport de Moscou. Mais tout de même, rien n’empêche de continuer à gloser sur son sort et surtout sur les conséquences de ses révélations. Car enfin, si tout le monde s’en fout de savoir que ses méls sont scannés par le NSA ou tout autre administration du big brother ce qui est peu probable, logiquement l’Etat français ne devrait pas rester indifférent. Et qu’apprend-on ? Que la France se solidarise avec les USA pour si ce n’est museler l’empêcheur de tourner en rond du moins lui refuser l’asile.
Rester silencieux, c’est faire le jeu du pouvoir qui abhorre la transparence et le buzz autour de ce qui est pour lui plus qu’une épine dans le pied : une accusation de négligence dans le cas de la France, un témoignage accablant dans le cas des Etats Unis, alors : allons-nous nous taire ? Allons-nous encore nous indigner sur le sujet qu’il plaira à David Pujadas et son équipe de nous offrir en pâture ? La scandaleuse censure de Mediapart doit-elle faire passer à la trappe un sujet aussi sensible que celui-ci ? Lecteur de ce journal, Mediapart, j’y projette logiquement mes attentes qui ne sont pas forcément en symbiose avec les choix éditoriaux de l’équipe de rédaction : je déplore par exemple une part trop importante donnée à la politique politicienne au détriment des sujets de société ou de l’étranger, les Roms et la Syrie certes sont traités et l’on peut se réjouir des articles de fond sur la Birmanie, mais que savons-nous des exactions en RDC ou des conditions de travail de la délocalisation ? Quelles sont les suites du désastre du Rana Plaza ?
Pour en revenir à Snowden, l’imbroglio diplomatique et les doutes quant à la stratégie de dévoilement suivie permettent d’occuper le terrain médiatique, alors pourquoi ce silence ? Comment se fait-il que l’on ignore tout de ses conditions de vie à Sheremetyevo : c’est anecdotique peut-être, mais l’actualité s’en nourrit. Non, décidément les lanceurs d’alerte vont à leur perte, c’est probablement le message que l’on veut faire passer.
pétition avaaz: https://secure.avaaz.org/en/stop_prism_global/
pétition Ligue des Droits des Hommes: http://www.ldh-france.org/Une-petition-pour-que-la-France.html