Un train qui file à 300 km heure contre une locomotive poussive qui avertit de sa lente progression passants et animaux ; une carte intelligente qui vous débite à distance le prix du trajet en passant près du lecteur contre un chauffeur de bus dépourvu de direction assistée en sueur avec les tickets coincés entre ses doigts et qui vous rend la monnaie en démarrant...Ou encore le rideau de fer de la boutique qui descend sans un grincement mû par une télécommande contre une porte laborieusement maintenue sur pied pendant qu'un autre employé fait descendre le rouleau noir de graisse en évitant de heurter son aide pour l’emboîter correctement ... les exemples sont innombrables qui jurent entre les différents mondes de ce pauvre monde pas si pauvre que ça.
Mais ce n'est pas seulement une question de vitesse ou de confort: les facteurs qui favorisent les uns et entravent les autres sont multiples et subtils. Cela est manifeste dans le domaine culturel aux abonnés absents dans les régions déprimées loin de tout, sauf à considérer que la richesse des traditions peut se substituer à l'apport de la connaissance et de la création de l'humanité entière disponible maintenant à quelques clics éclairés. Ces clics, s'ils ne sont pas interdits comme dans beaucoup de pays dits obscurantistes, y sont tout simplement inimaginables en raison de l'absence d’intérêt car l'anecdotique, l’éphémère et le sensationnel l'emportent haut la main avec les articles de consommation de luxe dont la séduction est irrésistible. Si l'on ajoute un enseignement défaillant, les conditions indispensables à un épanouissement personnel et à une adaptation satisfaisante à la société sont compromises. Certes, contempler le désert à longueur de vie ou être en communication intime avec le monde des plantes tropicales génère une richesse intérieure et peut déboucher sur une sagesse à mille lieues de l'agitation du premier monde comme on y appelle parfois les pays riches mais l'absence de capacité d'analyse, de jugement et encore plus de distance critique livre les personnes à tous les prédicateurs et vils manipulateurs quand ce n'est pas aux mafias.
l'ONU, l'OCDE, l'OMC etc etc entretiennent des bataillons d'experts qui élaborent de savants graphiques et des tableaux de comparaison de données macroéconomiques ou sociologiques pour aboutir à un classement « scientifique » des pays dans la grande compétition de la croissance et du progrès. Entre les nantis et les irrécupérables surnagent les pays dits émergents où sont constatés les plus scandaleux écarts de niveau de vie : la manufacture du monde des BRICs auxquels il faut ajouter le Mexique et la Colombie ainsi que Singapour ou le Nigeria... un deuxième monde ? Un monde avide de consommation susceptible de faire sortir l'économie globale de l’ornière si les ressources ne s'épuisent pas comme auguré : Les ravages de l'obésité, du cholestérol et du diabète dus á la surconsommation de Coca-Cola et de patates chips en sachets compensent en partie par leur incidence négative sur l'espérance de vie la vigueur démographique. Celle-ci en effet est le plus souvent dopée par un planning familial défaillant car saboté par les institutions religieuses aussi la menace de surpopulation demeure-t-elle, compromettant de la sorte une amélioration du sort matériel desdites populations ainsi que bien sûr de l'alimentation.
Peut-on s'étonner dans ces conditions de la fascination exercée par le « premier monde » et de la mobilisation des foules s'y précipitant ? Si contrairement aux idées reçues davantage de développement économique du tiers-monde entraîne encore plus de migrations économiques,on peut s'attendre à un accroissement dramatique de l'antagonisme nord-sud en raison des attentes exacerbées des uns et de la crispation des autres sur leurs privilèges.