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Billet de blog 9 novembre 2025

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Dire « islamiste », pas « musulman »

Dans la polémique née à Montpellier autour de la formule « fanatique musulman », on oublie que le mot juste n’est pas religieux mais politique. Ce qu’il faut combattre, ce n’est pas une foi : c’est une idéologie, l’islamisme.

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Dans la polémique née à Montpellier autour de la formule « fanatique musulman » appliquée à l’assassin de Samuel Paty, on a vu ressurgir une vieille confusion entre croyance et idéologie. Dans l’espace public, le bon mot n’est pas « musulman » (fût-il affublé d’« intégriste »), mais « islamiste », car c’est un adversaire politique que l’on nomme et que l’on combat. Le reste amalgame des millions de croyants à une entreprise de pouvoir.

1) Le contexte décide du mot juste

Qualifier un meurtre terroriste commis au nom d’un projet politico-religieux relève du vocabulaire politique : on ne décrit pas la ferveur d’un individu, on désigne l’idéologie qui a inspiré l’acte. Pour Samuel Paty, la qualification publique et judiciaire a, dès l’origine, été « attentat/terrorisme islamiste » – ce que rappellent les comptes rendus de procédure et de procès (Wikipédia, actu-juridique, Dalloz).

2) « Islamiste » : un terme politique qui évite l’amalgame

« Islamisme » ne signifie pas « musulman très religieux ». Il désigne un courant politique qui subordonne l’ordre civil à la charia et vise l’instauration d’un État régi par le religieux. C’est la ligne des définitions de référence (Larousse, travaux d’analyse, etc.). Autrement dit : on parle d’idéologie de pouvoir, pas d’intensité de foi (Larousse, Institut Montaigne).

Dire « fanatique musulman », même en corrigeant par « intégriste », brouille la frontière entre une religion (dont les fidèles n’ont pas à répondre des crimes d’une doctrine politique) et une idéologie totalisante. C’est précisément ce brouillage que l’islamisme instrumentalise pour polariser la société et recruter.

3) Pourquoi l’argument « dictionnaire » est à côté du sujet

Agiter une définition de dictionnaire pour conclure que « CQFD » revient à sortir les mots de leur contexte d’usage. Les dictionnaires décrivent l’usage ; la politique exige une précision d’emploi pour nommer correctement ce que l’on combat. Dans la séquence montpelliéraine, l’élu PS et la députée LFI s’écharpent parce que l’un déplace la focale vers la religion (« fanatique musulman »), quand l’autre rappelle la catégorie politique pertinente (« terroriste islamiste »). Les médias ont largement documenté ce clivage dans les dernières 48 heures.

4) Nommer juste, c’est protéger

Nommer l’islamisme permet de combattre politiquement l’idéologie (loi, police, renseignement, prévention, école, diplomatie, internet), sans stigmatiser des citoyen·nes de confession musulmane qui n’ont rien à voir avec ce projet. C’est la seule manière démocratique de tenir ensemble sécurité, État de droit et égalité des droits.


Conclusion

Dans ce débat, la question n’est pas : « Un islamiste est-il (aussi) un musulman ? » Question stérile et piégeuse. La question utile est : quel mot désigne correctement l’ennemi politique à combattre ? Réponse : l’islamisme. Et c’est précisément pour éviter l’amalgame que ce mot doit être employé — sans trembler, sans détour.

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