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Billet de blog 12 novembre 2025

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Ce n’est pas une question d’intention

Les violences sexistes, racistes ou homophobes ne se résument pas à la volonté de nuire. Elles s’enracinent dans un système de pensée et de représentation qui distribue, depuis toujours, les places et les postures. À partir d’un simple échange sur LinkedIn, une scène banale révèle ce que notre société continue d’appeler « naturel ».

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Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

Sous un post LinkedIn où un directeur d’école affichait fièrement une photo de ses étudiants, j’ai écrit une simple observation : les étudiants debout — majoritairement des garçons — exhibent la fierté de l’appartenance, tandis que le rang du bas — exclusivement féminin — donne une impression inverse : celle de la soumission.

Une internaute m’a alors répondu, en anglais : « I imagine the placement was for artistic reasons only. The Dean does not think women are inferior. »

C’est précisément là que tout se joue.

Non, je ne crois pas que le directeur ait voulu humilier qui que ce soit.

Mais c’est justement le problème : la violence symbolique ne suppose pas l’intention de faire mal. Elle suppose simplement un monde où certaines positions — debout ou à genoux, visibles ou effacées — sont devenues naturelles.

Quand une image, une phrase, un geste reproduit une hiérarchie entre les sexes, les origines ou les identités, ce n’est pas parce que son auteur est animé par la haine. C’est parce qu’il vit dans un système qui lui a appris, depuis toujours, que cette hiérarchie existe et qu’il peut la mettre en scène sans même s’en rendre compte.

Les violences sexistes, racistes ou homophobes ne sont pas d’abord morales, elles sont structurelles. Elles naissent d’un ordre symbolique qui permet, autorise, encourage même certaines positions de domination.

Et c’est cela qu’il faut interroger : le cadre, le décor, la répétition tranquille du même partage des places.

Dans mon échange, la défense spontanée fut : il n’y avait aucune intention de nuire. Mais ce n’est pas la question.

Le problème n’est pas ce que l’auteur voulait dire ; c’est ce que l’image dit malgré lui.

Et c’est cette parole-là, celle du système, qu’il faut apprendre à entendre — même quand elle chante la fierté, même quand elle se croit bienveillante.

Parce que dans ces violences symboliques, le pouvoir n’a pas besoin d’être méchant : il lui suffit d’être là, tranquille, sûr de lui, assis ou debout à la place qu’on lui a toujours réservée.

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