" La glorification de la pauvreté aux Jeux Olympiques "
Alors que les premières médailles arrivent, malgré le manque d'encouragement pour le sport au Brésil, les médias commencent également à faire l'éloge de "l'effort", malgré toutes les difficultés des athlètes, dont la plupart sont des jeunes issus des classes inférieures. Il est vrai qu'un effort énorme est fourni par ceux qui décident, avec peu de nourriture adéquate et peu de conditions, de se consacrer à tout ce qui est nécessaire pour se rendre aux Jeux olympiques et se battre en compétition avec des athlètes bien mieux préparés tout au long de leur vie. Ce que Rebeca Andrade [gymnaste, noire, 4 fois médaillée à Paris2024] et d'autres ont fait relève, effectivement, d'un héroïsme hors du commun.
Mais dans nos grands médias, au lieu de critiquer la négligence dans le sport, qui ne fait que refléter la négligence générale envers les pauvres, il y a toujours la louange méritocratique, c'est-à-dire le genre de louanges qui dit que celui qui le veut vraiment réussit, en dépit de toutes les difficultés. Il n'y a rien de plus vénéneux que ce discours qui justifie toutes les inégalités et suppose que tout est le résultat d'une performance simplement individuelle.
La vie et le quotidien des pauvres dans ce pays sont un véritable enfer social, où la faim ou le manque de nourriture, l'absence de stimulations de toutes sortes et la précarité générale de la vie constituent l'essentiel de l'existence. La classe moyenne, au contraire, reçoit tous les stimulations données d'emblée via la socialisation familiale privilégiée, puis ensuite de l'école privée où les enfants de cette classe sociale recevront tous les stimulations nécessaires à une carrière réussie plus tard. Et tout cela avec leurs parents qui paient le temps libre de leurs enfants pour qu'ils ne fassent qu'étudier. Dans ce contexte, parler de méritocratie est une provocation tant les disparités de départ sont grandes.
L'un des cas les plus emblématiques est celui de Valdileia Martins*, qui est devenue athlète quand elle était dans les campements du Mouvement sans terre (MST) grâce aux efforts de son père pour transformer une parcelle de réforme agraire en un lieu qui favoriserait aussi, au-delà du coton, le développement des athlètes. Il a réussi à emmener sa fille en finale des Jeux olympiques 2024 pour le saut en hauteur, mais n'a pas pu la voir dans son moment de gloire, car il est décédé d'une crise cardiaque quelques jours plus tôt. L'affaire a donc tous les ingrédients d'un drame cinématographique que la presse pourra exploiter.
Cependant, le véritable problème ici est l'abandon total des pauvres dans notre pays, dont nous ne nous souvenons que lors d'occasions spéciales telles que les Jeux olympiques. Le manque de soutien au sport est lié à l'abandon par le biais d'une mauvaise scolarisation et de l'absence de soins de santé. Le fait qu'un pauvre sur un million parvienne à surmonter les obstacles de la pauvreté ne signifie donc pas qu'il faille célébrer la méritocratie.
Au contraire, il est temps de penser au nombre de scientifiques de renom, d'écrivains talentueux, d'athlètes extraordinaires que nous pourrions avoir s'il n'y avait pas eu cette condamnation des pauvres à ne pas avoir accès à tout, rendue possible par la persécution et la haine des Blancs des classes sociales supérieures. Tous les gouvernements qui ont essayé de racheter les pauvres ont été chassés du pouvoir par un coup d'État. La corruption a toujours été un prétexte mensonger. Combien de Valdileias aurions-nous si cette condamnation était correctement exposée et critiquée ? Les Jeux olympiques devraient être l'espace idéal pour cette réflexion sociale.
Jessé Souza
(https://iclnoticias.com.br/a-glorificacao-da-pobreza-nas-olimpiadas/)
(*) Elle a abandonné durant les éliminatoires, suite à une entorse, le dimanche 4 août 204, à Paris2024.
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Bibliographie de J. Souza en français :
Le Brésil et ses élites - L'esclavage en héritage
Bibliographie de J. Souza en portugais du Brésil :
ICI, puis là, et aussi ici, sa bibliographie complète.