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Billet de blog 5 février 2014

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LE 6 FEVRIER 1934... ( petit rappel historique)

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MICHEL ETIEVENT ECRIT : "attendez vous , attendons nous que l'histoire vous (nous) repète encore de terribles leçons?...
il y a 80 ans le 6 février 1934, les ligues fascistes emplissent les rues aux cris de "juifs dehors, députés à la Seine, italiens à la mer, communistes à l'échafaud" et sont à deux doigts de s'emparer de l'assemblée nationale. Aussitôt le 9 et le 12 f2vrier des manifestations monstres de gauche se croisent et s'unissent aux cris de "fascisme dehors.On veut du pain, la paix et la liberté" Ces cris font dissoudre les ligues d'extrème droite, ouvrent la route au front populaire qui, sous la pression populaire, concède les 40 heures, les congés payés, le doublement voir le triplement de certains salaires, les plus grands conquis sociaux du siècle... Aujourd'hui 4 février, des fascistes emplissent les rues, crient "juifs et communistes, arabes dehors!". A deux pas de chez moi à Chambéry, des jeunes d''extrême droite envahissent une scène de théâtre criant "juifs, cocos assassins!" ...J'ouvre mon courrier. une lettre d'une grand mère lectrice, victime en 1942, de la barbarie des camps nazis. Elle achève sa lettre par " Je désespère, Michel j'ai peur!...." ! Je regarde par la fenêtre . Dans la rue.... personne... Ou êtes vous ? Où sommes nous?...bises à tous...et debout... le 6 février 2014 partout... Michel Etievent.
Brigitte PASCALL : Cher Michel, permets-moi, pour une fois, de ne pas adhérer 5 sur 5 à ton propos. Cette référence au 6 février 1934, que je lis partout en ce moment, elle me saoule. Bien sûr, elle a pour elle quelques apparences : au cours de la manif de "jour de colère", n'a-t-on pas entendu "dehors les juifs", comme au cours de la journée du 6 février 1934. Mais tout le reste diffère. Permets-moi de te résumer ce que raconte Jacques KERGOAT, qui a beaucoup écrit sur le syndicalisme, et dont les analyses sont toujours vues avec les lunettes de défenseur du Mouvement ouvrier, qu'il a été toute sa vie, dans son livre "La France du Front populaire", édition La Découverte, 1986.
Tout commence avec le scandale STAVISKY : cet escroc notoire fréquente la bonne société et dispose de nombreuses relations politiques de droite et de gauche. A 19 reprises, il réussit à échapper aux poursuites lancées contre lui. En 1933, le crédit municipal de Bayonne émet pour 2 millions de faux bons de caisse. Stavisky prend la fuite, la police le retrouve dans un chalet de montagne, qu'elle cerne. Le Canard enchainé affirme que Stavisky est "suicidé" d'une balle dans la tempe gauche. Des notables radicaux sont directement compromis : Garat, le député-maire de Bayonne, Bonnaure, élu parisien, Dalimier, ministre radical des colonies. Le 27 janvier, Chautemps démissionne, son beau-frère Pressard étant compromis. Le préfet de police Chiappe, dont les liens avec l'extrême droite sont connus, également compromis est révoqué.
Les ligues d'extrême droite multiplient les manifs : on en compte 10 entre le 9 et le 28 janvier 1934. Elles sont en général violentes, puisqu on compte 175 gardes mobiles blessés, 1035 arrestations. C'est l'Action Française qui les anime. La révocation de Chiappe est à l'origine de la manif du 6 février. Pendant des heures, manifestants et forces de l'ordre s'affrontent place de la Concorde. A deux reprises, le barrage, qui interdit l'accès à la chambre des Députés est sur le point de céder. Les policiers devront tirer. Il y a 14 morts parmi les manifestants, 655 blessés. Finalement, les émeutiers n'arrivent pas à prendre la chambre des députés, le colonel de La Roque donnant à ses troupes l'ordre de rebrousser chemin.
Comment interpréter cette journée ? Pour Léon BLUM, il y a eu complot. "L'insurrection avait, à l'intérieur de la Chambre, des représentants et des chefs". Parmi les slogans entendus, il s'agit "d'étrangler la gueuze", "en finir avec le régime abject", "donner à la nation des chefs dignes d'elles".
Comme on le voit, la manif du 6 février 1934 est très politique. Les ligues de droite cherchent a s'emparer physiquement du Parlement, ce qu'elles payent au prix de 14 morts. Restons une seconde sur le nombre de morts : le chiffre de 14 témoigne, plus que de longs discours, de l'extrême détermination des membres de l'Action Française, qui n'hésite à payer de leur vie, leur tentative de prendre d'assaut la Chambre des députés.
Au cours de la manif de "jour de colère", on a entendu des slogans "Hollande dégage !", mais rien n'a été tenté pour s'emparer de l'Elysée ou de l'Assemblée Nationale. Il n'y a pas eu de morts, ce que d'ailleurs personne n'a relevé, comme si cela allait de soi. Aucun slogan n'a demande le remplacement de Hollande par un tel ou un autre, ou la fin de la République. Les gugusses de "Jour de colère", ( pour qui je n'ai vraiment aucune admiration, n'en déplaisent à tous ceux qui me virent en ce moment de leurs listes d'amis, au seul motif que je suis l'amie d'ARIANE), sont beaucoup moins politises, beaucoup moins déterminés, que les ligues d'extrême droite, qui ont opéré au cours de la journée du 6 février 1934. Tant pis si ce que je dis n'est pas "tendance" : mais mettre ces deux mouvements sur le même plan participe d'une erreur manifeste d'appréciation. Autre différence : les organisateurs de "Jour de colère" n'ont pas de "relais" dans la droite classique, les Copé et Fillon. Du moins, pas encore. On voit bien comment, dans les années 30, la gangrène de l'extrême droite ravageait la classe politique "classique", comme l'explique très bien Léon BLUM, puisque les organisateurs de la journée du 6 février siégeaient à la Chambre même des députés.
Moi, je dirai, dans le sillage d' Olivier BESANCENOT, les manifs de la droite extrême sont fortes de la faiblesse de l'absence de manif à la gauche de la gauche. La décision du PC de supprimer notre belle manif contre l'augmentation de la TVA, afin de ne pas faire peur au PS, est lourde de conséquences, meurtrière pour notre camp, celui de la gauche critique et humaniste. Il y a des paires de gifles qui se perdent. O. Besancenot appelle a une manif au cours du mois de février : il est évident qu'il faut répondre de façon positive ! Il ne faut surtout pas laisser la rue à l'extrême droite ! En ce moment, Gaël BRUSTIER, proche du PS, tartine à mort sur le thème : "l'imaginaire a basculé à droite". Ce n'est pas mon avis. Mais, en se taisant en ce moment, on lui donne malheureusement mille fois raison...

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