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Billet de blog 15 décembre 2020

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La Dissociété

Analyse de l'ouvrage rédigé par Jacques Généreux "La Dissociété", édition du Seuil, 2006. Bien qu'il ait été publié en 2006, ce livre est d'une rare actualité, avec les deux confinements que nous venons de vivre en 2020. Dès 2006, l'auteur pointait les modifications psychologiques importantes vécues par l'individu "moderne". Notamment la perte de son aspiration profonde à "être avec"....

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Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

Aujourd'hui, on présente l'ouvrage de Jacques GENEREUX, celui que l'on préfère : le plus profond, certainement le plus sincère : "LA DISSOCIETE", édition du Seuil, 2006..

Bien qu'il ait été publié en 2006, ce livre est d'une rare actualité, avec les deux confinements que nous venons de vivre en 2020. Dès 2006, l'auteur pointait les modifications psychologiques importantes traversant l'individu "moderne". Notamment la perte de son aspiration profonde à "être avec". l'isolement forcé que nous vivons en ce moment contribue à nous faire perdre notre sentiment d'appartenance à un groupe : travail remplacé par le télétravail. Engagement associatif, politique. Activité sportive, culturelle, etc...

Analyse de la mutation anthropologique de l'individu moderne. Chaque individu a deux aspirations : "être soi même", "être avec". La libéralisme ne cesse de torpiller chez nous notre aspiration à "être avec"

L'auteur pose son hypothèse dans le début du livre. "Pourquoi, alors que nous sommes intelligents, décidons-nous du pire plutôt que du meilleur...?" Pourquoi la majorité des français accepte-t-elle ce monde atroce forgé par le libéralisme triomphant ?

Peut-être, parce que la pire des solutions (obéir aveuglement à la culture libérale de la compétitivité généralisée) est aussi une source, pour nous, de jouissance narcissique. Parce que la consommation avide d'images, de "fringues" est pour nous un anesthésiant puissant ?

Les humains acceptent librement une société contraire à leurs aspirations, ce qui suppose un dysfonctionnement du sujet. Nous vivons dans une société inhumaine au sens le plus fort (destructrice de l'être humain), non pas contraints par un tyran, mais dans une certaine mesure "librement" : pensant (à tort) que la façon la plus spontanément humaine de se défendre contre la souffrance engendrée par le libéralisme, c'est de lui obéir aveuglement, de le conforter, plutôt que de le combattre.

Voilà pourquoi l'auteur propose 10 chapitres, démontrant cette hypothèse, dominés par cinq temps forts :

1)- Il part de la crise du politique, que l'on associe a une soit disant "impuissance" du personnel politique au pouvoir. Or, ce chapitre montre au contraire que cette pseudo "crise du politique" est associée à une montée en puissance sans précédent de l'Etat et du politique...C'est la volonté politique qui a choisi le chômage de masse et la pauvreté, alors que le discours "officiel" consiste à dire qu'on a tout essayé. Mais cela correspond en réalité à une PRIVATISATION DE L'ETAT, bureaucratie au seul service de la finance. En réalité, sur le strict point de vue économique, le libéralisme ne "profite" qu'à une infime minorité de riches.

2)- De la guerre économique à la guerre des uns contre les autres :

La politique libérale est d'abord UNE POLITIQUE DE MANIPULATION CULTURELLE, visant à transformer chaque être humain en guerrier hostile. La culture libérale lamine la solidarité nécessaire à toute action collective (politique par exemple)..Dans la vie privée (familiale), nous savons échapper au cercle vicieux de la compétition généralisée qui règne dans l'entreprise. Les libéraux répondent que "les salariés n'ont pas le choix", façon implicite de dire que l'individu n'a aucune marge de manoeuvre personnelle. Ce qui est contraire à une autre affirmation du crédo libéral, selon lequel chaque homme aurait "une initiative individuelle". Cette compétition à outrance est-elle conforme à la nature profonde de chacun ?

3)-Dissociété et société de progrès humain :

Chaque individu dispose de deux aspirations ontologiques : "être soi même", et "être avec" les autres. Il en résulte que nous sommes à la fois égoïstes et altruistes, attirés à la fois par le succès personnel et les plaisirs de la coopération. Ces deux aspirations sont en synergie : si l'une va bien, l'autre aussi. Si l'une fait mal, elle gâche le plaisir de l'autre. Or, la dissociété (vie stressante au travail, licenciements, chômage, exclusion, isolement...) tend à amputer l'aspiration à "être avec" au profit du seul individualisme : triomphant pour les traders, en berne chez les chômeurs isolés.

Donc, le libéralisme est une fausse conscience, qui disloque intimement l'individu, au lieu de lui permettre de réaliser ses deux aspirations profondes. Pourtant, la culture libérale s'impose à toute la planète.

 4)- La culture de l'individu-roi prend ses racines dans l'esprit des Lumières :

L'enracinement de la fiction de l'individu autonome est une invention fondatrice de la modernité promue par les Lumières. Il s'agissait alors de réagir à la puissance d'un Roi ou du Clergé. Voilà pourquoi le culte de l'individu gagne aujourd'hui tous les esprits avec autant d'aisance, y compris les gens de "gauche".

5)- Une refondation anthropologique du discours politique :

En clair, le grand récit libéral fondé sur l'individu qui "s'épanouit" dans la lutte est une pure fable. En revanche, plus nous sommes efficaces dans cette société contre nature, moins nous nous révoltons. La culture libérale étouffe toute résistance. Voilà pourquoi, il est si difficile de construire un parti, une force politique se rebellant ouvertement contre les libéraux.

Le libéralisme stimule des satisfactions puissantes (narcissiques), qui compensent le délitement des liens sociaux. D'où la nécessité de multiplier les cercles de socialisation, famille, travail, parti politique, théâtre..., multipliant les liens de coopération : plutôt que d'accepter le modèle libéral de la compétition en solitaire.

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