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Billet de blog 11 août 2023

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« Séparer l’homme de l’artiste »

Ce billet est une simple remarque sur cette expression très souvent utilisée, parfois de manière brillamment ironique comme Blanche Gardin lors de la cérémonie des Césars, mais qui me semble très critiquable.

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Ce billet est une simple remarque sur cette expression très souvent utilisée, parfois de manière brillamment ironique comme Blanche Gardin lors de la cérémonie des Césars, mais qui me semble très critiquable.

« Séparer l’homme de l’artiste »... ou « faut-il séparer l’homme de l’artiste ? »… Mais comment le pourrait-on ? Un artiste est nécessairement un être humain, homme ou femme. Si un artiste commet un crime, il est évidemment justiciable comme n’importe quelle personne. Ni plus, ni moins. On ne peut en aucun cas « séparer » la personne qui élabore une œuvre de cette personne : il n’y a pas d’un côté un créateur, de l’autre un citoyen.

En réalité, la question est mal posée, et mal posée, elle permet de biaiser complètement le débat. La création n'est pas le créateur; l’œuvre n'est pas un être humain.

Ainsi, il me semble qu’il faudrait plutôt dire :

« faut-il séparer l’artiste de son œuvre ? » ou « faut-il séparer l’artiste de sa création? »

Autrement dit : peut-on continuer à fréquenter une œuvre dont le créateur a été condamné par la justice pour un crime ou parce qu'il a commis un acte qui nous est moralement insupportable ?

A tout un chacun de répondre, selon sa morale et ses choix, tout en respectant ceux de l’Autre.

Mais à mon sens, si l’on ne veut pas sombrer dans un délire purificateur qui omettrait l’une des fonctions de l’art, il vaudrait mieux ne pas oublier que :

- Fréquenter une œuvre, ce n’est pas être contaminé par elle (ça peut même être exactement le contraire). On peut aimer Le Voyage et être de gauche, apprécier Genet sans occulter ses sympathies ultra-droitères de ses années de guerre et une certaine fascination pour l’uniforme nazi.

- Avoir aimé une œuvre dont l’auteur s’est avéré être un criminel, ce n’est pas être son complice. On peut aimer tel titre de Noir Désir sans être un machiste violent.

- Une œuvre n’est pas une personne, elle en est une création, et les deux n’entretiennent parfois que des liens ténus: l’exemple d’Emil Nolde est assez frappant.

- Personne n’est juste, droit, pur, personne n’est exempt de zones d’ombre. L'expression de celle-ci sert à la connaissance de l’être humain et probablement à sa civilisation. Et celui ou celle qui les exprime ne les commet pas, pas plus que celui qui les lit ou les regarde.

Une chose est certaine : si l'on écarte les œuvres dont les auteurs ont eu des comportements plus ou moins douteux et/ou répréhensibles, il ne va pas rester grand chose dans les bibliothèques et les musées.

Illustration 1
Verre de sirop de grenadine © http://profsalce.legtux.org/5chap13.html

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