Chassé-croisé chargé de symboles : c'est au moment même où les Guignols de l’info disparaissent du petit écran que Vincent Bolloré, actionnaire majoritaire, cède son fauteuil de PDG de la chaîne cryptée à son homme de main, Maxime Saada.
Mission accomplie.
Le message a le mérite d’être clair, difficile de faire mieux.
Bolloré a mis 3 ans pour prendre le contrôle de Canal+, entre 2012 et 2015, avec un seul objectif : dépolitiser la chaîne.
Coûte que coûte.
L’homme d’affaires, ami intime de Sarkozy, est connu pour faire du business, c'est-à-dire du fric, avec tout ce qui bouge sur la planète, mais dans le cas de Canal+ il est prêt à perdre beaucoup pour atteindre son objectif.
Il fallait retirer l’épine plantée dans le pied de son ami Nicolas à la veille des élections de 2017, nettoyer, aseptiser et purifier l’antenne.
Celle-là et d’autres y compris des instituts de sondages comme CSA.
Son arrivée provoque un véritable chaos dont la chaîne continue de subir les effets dévastateurs.
Canal+ marchait sur deux jambes, le foot et le cinéma, avec, au centre du dispositif, une bonne dose d’humour corrosif, d’esprit irrévérencieux et de blagues potaches que suivaient jusqu’à 3 millions de téléspectateurs, certains soirs. Sans oublier le porno du samedi soir.
Ne lui reste plus que le cinéma avec des obligations chiffrées d’investissements qui déplaisent fortement au money maker Breton devenu unijambiste.
Il s’y est pris « intelligemment » en rédigeant un cahier des charges strict et précis, très contraignant en fait, Les Guignols devaient s’assagir, s’interdire de trop chahuter ses amis politiques sans oublier de respecter les annonceurs de la chaîne.
Certains animateurs se sont vu reprochés des propos blasphématoires tenus à l’encontre du big boss.
Virés sur-le-champ comme on a pu le voir avec Stéphane Guillon.
Petit à petit les Guignols se sont rabougris, repliés sur eux-mêmes, les ailes coupées, avec de textes de plus en plus fades, de moins en moins drôles.
Ils ont perdu leur âme.
Les audiences sont passées de 1 500 000 téléspectateurs à 150 000…10 fois moins ! qui dit mieux ?
Bolloré a tout prémédité, tout orchestré, il fallait que Les Guignols meurent de leur « belle mort », discrètement, comme atteint par une maladie honteuse (elle l'est !) dont il fallait cacher le nom, c’étaient eux le problème, pas lui !
Le capitalisme financier a une emprise sur l’art, sur la créativité, sur l’esthétique, sur l’humour, plus le temps passe et plus l’oxygène se raréfie, son pouvoir croît de façon exponentielle dans l’indifférence générale.
La connerie vient de marquer des points, mais la partie n’est pas encore perdue.
Seule, ou presque, une étoile commence à scintiller, elle s’appelle Blanche Gardin.
C’est une femme !
Ouf !
Je l'adore !
L’espoir est permis.