Pas un journaliste, pas un expert, pas un institut de sondage ne l’avait anticipé et pourtant Trump va bel et bien gouverner le pays de John Steinbeck, de John Dos Passos, d’Henry Miller, d’Hemingway, de Faulkner, d’Edgar Poe, de Melville, de Paul Auster…sans pudeur car il en est dépourvu, sans retenue car il va détenir tous les leviers que cette jeune démocratie peut offrir à son Président, le Congrès, la Chambre des Représentants, le Sénat.
Passé l’étonnement provoqué par la déroute du camp démocrate, la Bourse New-Yorkaise reprend ses esprits et refait son handicap, un moment déstabilisée par l’ampleur de la victoire de l’homme à la mèche blonde sur la femme à la mèche blonde.
L’ordre libéral ne connait pas la crise, l’ogre libéral a toujours faim.
Un combat de blonds !
Même la Floride ! même les « latinos » ! Tant pis pour l’indigestion de burritos sur-pimentés.
Les inégalités, le chômage, la misère, le désespoir, la méfiance, le terrorisme, bref, la peur vient d’enfanter un monstre qui, même dans ses rêves les plus fous, n’imaginait pas une seconde arriver à un tel niveau, bien conscient qu’il était de ses lacunes, de ses faiblesses et de ses nombreuses erreurs servies par un tempérament parfaitement déviant, les femmes en parlent mieux que les sondeurs.
Deux constats :
- Les limites de Trump, ses carences, ses vices, son arrogance, sa vanité et son inculture lui ont permis de se libérer des chaînes d’un discours trop convenu et de laisser grande ouverte la boite à fantasmes. Son auditoire s’est reconnu dans ses mots, dans son intonation, dans ses plaisanteries de comptoirs et bon mots d’après-matchs, les femmes, les musulmans, les juifs et les homos sont une source inépuisable de rires gras et résonnants, l’entrejambe qui démange, l’haleine qui dérange.
- Les hommes politiques, les experts, les journalistes et les sondeurs ignorent absolument tout ce qui peut concerner les gens auxquels ils croient encore s’adresser, tout ! Le décrochage a laissé place à une véritable rupture, une rupture maintenant consommée.
Ces deux constats sont interdépendants, étroitement liés, pour être élu Trump devait rester Trump, fidèle à lui-même et à sa réputation qui lui servait de légende.
Ses caricatures lui simplifiaient la tâche et lui servaient de discours, loin de le desservir elles renforçaient son image.
Et cela a parfaitement fonctionné.
Hilary Clinton et les millions de dollars de sa famille ajoutés à son extrême froideur ont fait le reste, cette femme n’a rien de séduisant, rien…mais sa défaite est, curieusement, moins intérressante que la victoire de Trump.
Ce paradoxe s'explique par les nombreux enseignements que l'on peut tirer du succès d'un candidat tel que Trump, la victoire de Clinton eut été vide de sens, c'est bien son problème.
Le populisme, puisqu’il s’agit de cela, s’articule autour de cette peur et de cette arrogance, il s’accouple harmonieusement avec toute sorte de médiocrités, la provocation, la vulgarité, la haine, le racisme protéiforme…toujours avec des mots simples, souvent avec des jeux de mots répétés, tous plus creux les uns que les autres.
A tous ceux qui, dans ces colonnes, se demandent encore à qui peut bien ressembler Trump, à la Le Pen ou au Sarkozy je suis tenté de répondre que le populisme c’est Poutine, c’est Erdogan, c’est Hofer en Autriche, c’est Adam Walker en G.B ou Orbàn en Hongrie
Sarkozy et Le Pen, bien sûr, chez nous.
A force d’ignorer les peuples, ou de les mépriser, le désespoir engendre toujours et partout la même maladie, une sorte de peste brune et bubonique.
Lui trouver un prénom, Nicolas ou Marine, comme on le fait pour les cyclones, n'a strictement aucun intérêt.