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Billet de blog 10 janvier 2025

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Vamos a la playa

Au 55, rue du Faubourg-Saint-Honoré, dans le VIIIe arrondissement de Paris, autrement dit « le Palais », l’ambiance est tout sauf morose. Ici, on ne connaît ni le vague à l’âme, ni le pessimisme : c’est fiesta permanente, cocotiers en option.

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Au 55, rue du Faubourg-Saint-Honoré, dans le VIIIe arrondissement de Paris, autrement dit « le Palais », l’ambiance est tout sauf morose. Ici, on ne connaît ni le vague à l’âme, ni le pessimisme : c’est fiesta permanente, cocotiers en option.

Ni la catastrophe écologique qui submerge Mayotte, ni les menaces impérialistes de Donald Trump, ni même les sorties lunaires de son acolyte eMusk (qui trouve judicieux de traiter certains dirigeants européens d’imbéciles) ne semblent troubler la bonne humeur du couple présidentiel.

On pourrait s’imaginer que le chaos politique, avec la dissolution de l’Assemblée nationale, plomberait l’ambiance. Mais non ! Pas une ombre au tableau.

Et pourquoi la fracassante crise économique qui étrangle la France après un quinquennat et demi de réformes foireuses ( les retraites) viendrait-elle gâcher la fête ? À quoi bon se perdre en interrogations ou, pire, en vraie et vaine autocritique ? « Que nenni ! », semble répondre un président tout sourire, qui affiche une mine radieuse.

Emmanuel Macron chante. Il danse. Il dévale les escaliers du Palais en virevoltant, enchaînant entrechats et pas chassés. Parfois, il les remonte en sautillant, les bras écartés tel un oiseau qui aurait trop regardé Mary Poppins.

Un témoin, souhaitant garder l’anonymat, rapporte que, le jour de la démission de Michel Barnier, le couple Macron a recréé une scène culte de Swing Time. Lui en Fred Astaire, elle en Ginger Rogers. Le parquet du Palais en tremble encore.

Mais quand le président ne danse pas, il prépare des oraisons funèbres. Actuellement, il peaufine un discours pour la panthéonisation de Marc Bloch, historien et résistant torturé à Caluire avant d’être fusillé le 16 juin 1944 avec 29 autres résistants à Saint-Didier-de-Formans : pas de quoi entamer sa bonne humeur.

Un acte solennel. Et un record : cinq personnalités intronisées au Panthéon depuis son élection.

Il excelle dans le genre.

Il faut dire qu’Emmanuel Macron a un hobby peu commun : il est abonné à « Deathlist », un site prévoyant les décès probables de personnalités connues dans les douze mois à venir.

Dans sa « short list » actuelle ? Brigitte Bardot.

Pour se préparer, il s’est plongé dans des biographies de l’actrice et a redécouvert Je t’aime, moi non plus que Gainsbourg avait concocté pour elle. Une pépite qu’il chantonne dès que Brigitte — non, pas Bardot, l’autre Brigitte — entre dans la pièce.

Certes, le président donne l’impression, exagérée sans aucun doute, d’être un brin déconnecté. Demandez-lui son emploi du temps, il fredonne Vamos a la Playa. Demandez-lui s’il se sent inutile, particulièrement isolé, il réplique avec La Isla Bonita de Madonna. Et pour répondre à son impopularité galopante ? Rien de mieux qu’un L’amour à la plage de Niagara.

Lors d’un voyage à Mayotte, un jeune Mahorais lui a fait remarquer le manque d’eau et de nourriture. Inattendu, mais fidèle à lui-même, Macron a entonné un refrain d’Aznavour tiré de Emmenez-moi :
« Emmenez-moi au bout de la terre
Emmenez-moi au pays des merveilles
Il me semble que la misère
Serait moins pénible au soleil ».

Il faisait 34° ce jour-là, même l'ombre avait été balayée par l'ouragan...

La scène, évidemment, a été coupée au montage. Merci, l’équipe com’, qui ne sort jamais sans ciseaux, colle et coupe-fil.

Car au Palais, comme dans une bonne comédie musicale, et même dans les moins bonnes, comme c'est le cas, ici, tout finit toujours par une pirouette, c'est ce qu'il a appris à l'ENA.

La chute est pour bientôt, mais il feint de l'ignorer.

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