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Billet de blog 13 octobre 2016

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Hollande : chronique d'un sabordage pathétique.

Le livre de Gérard Davet et de Fabrice Lhomme confirme d'une façon très détaillée ce que l'on savait : un Président ne devrait jamais dire ce qu'il a dit. Mais Hollande est-il Président ?

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Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

Son bilan est « contrasté » pour la partie de son camp qui reste attachée à sa personne, il a encore des supporters.

Pour la gauche qui se cherche un nouveau paradigme et un chef capable de la représenter, de Macron à Mélenchon, sans oublier les frères frondeurs Hamon, Montebourg et les autres, François Hollande est définitivement passé de l’autre côté du miroir, il est politiquement mort.

Je pense qu’ils n’ont pas tort.

Sa survie dépend de sa capacité à passer entre les gouttes dont il fait, goguenard et résigné, le symbole de son quinquennat : un Macron « de gauche » qui amorce sa campagne à partir d’un électorat de droite et du centre, un Mélenchon qui déçoit jusqu’à Pierre Laurent, des écologistes frustrés, on peut les comprendre, ce flou généralisé, ces hésitations sont le reflet d’une décomposition en mouvement, c’est là où François Hollande pense encore exceller. A défaut de surprendre…

Il a été élu grâce aux éclaboussures laissées par la bile de Sarkozy, il a été élu grâce aux miasmes de DSK, cela laisse des traces…

Ses récentes « confidences » recueillies par Gérard Davet et Fabrice Lhomme sonnent le glas d’un parcours chaotique mais honorable dont le point d’orgue correspond au jour de son élection, au 6 mai 2012.

Ne se fait pas élire Président de la République qui veut, c’est beaucoup plus complexe.

Et pourtant…

680 pages de « confidences », de petits secrets très petits, très médiocres, des révélations qui ne disent rien d’important sauf dans le sordide d’une dentition en péril, c’est reconnu, c’est confirmé, terrible aveu !

Et si l’humour s’accompagnait, chez lui, d’un incommensurable cynisme, une façon de masquer la noirceur de son âme ?

Comme si l’homme qui se cache derrière le Président reprenait sa vraie place, son vrai visage, le Président disparait, le masque tombe, reste le rondouillard rigolo mais cynique, l’expression d’un nihilisme moral qui ne fait pas bon ménage avec la gauche telle que je la comprends, telle que je la rêve encore et toujours.

Les trahisons de Hollande viennent toutes de là.

Cet homme n’avait pas les moyens de son ambition, juste l’art du swing en eaux troubles, à grands coups d’apnées profondes.

« Un Président ne devrait pas dire cela… » un Président, non, mais Hollande n’est plus, n’est pas, n’a jamais été « Président », c’est le sens que je donne au livre de ces deux journalistes.

Les preuves s’accumulent au fil des pages jusqu’à donner la nausée, on s’interroge sur la naïveté de la démarche, on est interloqué d’apprendre qu’il n’a pas eu un droit de relecture, il n’a plus aucune crédibilité, plus aucune autorité, il est victime de lui-même, il n’a pas compris qu’une fois de plus il a laissé parler l’homme, j’allais dire la bête, qui finit toujours par reprendre le dessus sur la fonction.

Il est obligé, ipso facto, de s’expliquer devant deux grands magistrats après avoir dénoncé la « lâcheté de la justice », il commence à ressembler à Sarkozy, dangereux phototropisme. Un remous ? non, un scandale !

Un homme capable de monnayer ses convictions contre un improbable consensus national autour de la déchéance de la nationalité…et qui le dit publiquement !

Il affiche ses calculs et ses combines comme si "péché avoué est à demi pardonné", Hollande a 7 ans, il est à la tête de la 5puissance économique mondiale depuis plus de 4 ans...

Il n’a pas conscience de son cynisme, il n’a pas conscience de son image, il n’a pas conscience de ses obligations, il pleurniche sur ses plateaux repas, sur sa solitude et se fait prendre à revers, une fois encore, par une Valérie Trielweiler cocufiée, comme nous, par l’homme, pas par le Président, elle a eu le tort de prendre l’un pour l’autre, Madame est servie !

Misérables confidences, misérable quinquennat, j’aimerais que des psychanalystes compétents planchent sur ce déballage d’immondices qui, malgré l’amoncellement,  ne dépassent pas le caniveau, il faut quand même essayer de comprendre comment un homme intelligent en est arrivé là, 8 mois avant les prochaines élections présidentielles, il parait qu’il veut se  représenter.

Pour ma part je crois qu’il est en train de se saborder, il n’a rien « sous la dent », il le sait, il a troqué ses illusions contre une transparence malsaine, maladroite et anecdotique.

François Hollande fait le pari de l’homme contre le Président, il n’a pas encore compris qu’on ne veut ni de l’un ni de l’autre.

Il y a quelque chose de triste et de pathétique dans cette déroute : elle emporte tout sur son passage.

Dans la Peste, Albert Camus dit quelque chose qui concerne, je crois, François Hollande, en priorité :

« La tentation la plus dangereuse : ne ressembler à rien ».

P.S

Hasard de l'écriture et des citations qui accompagnent ce billet : je recommande chaudement l'article d'Edwy Plenel sur Camus et le journalisme inspiré par le travail de Maria Santos-Sainz, je me suis régalé !!

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