Bruno Painvin (avatar)

Bruno Painvin

Nouvelliste et spectateur engagé.

Abonné·e de Mediapart

863 Billets

2 Éditions

Billet de blog 14 septembre 2018

Bruno Painvin (avatar)

Bruno Painvin

Nouvelliste et spectateur engagé.

Abonné·e de Mediapart

Pourquoi le quinquennat d’Emmanuel Macron est mort-né

Le « Enmêmetempstisme », mantra macronien par excellence, est mort peu de temps après mai 2017, en 100 jours exactement. L'hypothèse de croissance sur laquelle Macron a basé toute sa stratégie politique a explosé. Tout s'écroule. C'est fini. Hum, c'est fini...

Bruno Painvin (avatar)

Bruno Painvin

Nouvelliste et spectateur engagé.

Abonné·e de Mediapart

Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

Emmanuel Macron a été élu sur un double malentendu : la menace Le Pen et la promesse d’un « Nouveau Monde » censé dépasser tous les clivages.

Il me fait penser au personnage de Lucien de Rubempré dans Les illusions perdues de Balzac, à la troisième partie en particulier, Les souffrances de l’inventeur.

Il ne devrait pas oublier – nous non plus – que son score de 66.1 % au second tour de l’élection présidentielle face à Marine Le Pen, loin d’être le signe d’une victoire éclatante, masque, en fait, une réalité beaucoup moins réjouissante : il a été élu par (seulement) 44 % des inscrits, en d’autres termes, une majorité de Français, 56 %, n’a pas voté pour lui, a voté contre lui ou n’a pas voté du tout, un taux d’abstention record au second tour de 25 %...

De quoi relativiser ! Ce que Jupiter ne sait pas faire.

Le « Enmêmetempstisme », mantra macronien par excellence, est mort peu de temps après mai 2017, en cent jours exactement : d’abord avec la réforme de l’ISF, la baisse des APL, l’augmentation de la CSG et la réforme du contrat de travail ; ensuite avec les projets de réformes sur la durée, sur les conditions d’accompagnement et d’encadrement du chômage et celle des retraites ; toutes ces remises en cause d’avantages acquis sans aucune contrepartie  ont définitivement enterré son ambition de faire cohabiter sous le même chapiteau une approche économique ultra libérale avec un programme social progressiste digne (?) de ce nom.

On sait que l’huile ne se mélange pas avec l’eau, les molécules d'huile sont composées d'une queue hydrophobe (qui rejette l'eau), et d'une tête hydrophile (qui aime l'eau). Si vous mélangez de l'huile et de l'eau, les deux parties se repoussent. C’est exactement ce qui se passe entre le libéralisme et le socialisme.

Certains électeurs, très naïfs ou mal informés, ont mis de l’huile dans l’eau bouillante des pâtes en mai 2017…

Le programme de Macron de « lutte contre la pauvreté » dotée de 8 milliards d’euros sur 4 ans prouve, une fois de plus, qu’il n’a pas pris la mesure des problèmes, le mélange ne se fera pas.

L’épouvantail Le Pen a eu un autre effet pervers puisque le président des riches et des villes est né peu de temps après son élection sur les cendres d’une politique prétendument « de gauche et de droite, ni de droite ni de gauche ».

Compliqué !

Quand on n’est pas d’un côté, on est de l’autre, je n’ai jamais vu de voiture mettre son clignotant  au centre, quoi qu’en dise Môssieur Bayrou, le grand cocu centriste.

Macron, le libéral, slalome à droite, point Barre !

Les réformes qu’il a entreprises et celles qu’il envisage de faire d’ici la fin de son quinquennat se déroulent donc dans ce climat ultra libéral qui ne produit aucun effet (positifs…) sur l’économie française, les dividendes des patrons augmentent pendant que les investissements stagnent, le pouvoir d’achat des pauvres et des classes moyennes continue de baisser, Barnard Arnault voit sa fortune grimper de 30 % en 2 ans…

On a le droit d’espérer que les résultats arrivent « tôt ou tard ». Que « mieux vaut tard que jamais »…les vrais chiffres du chômage ne le disent pas, personne n’y croit, pas même Yvonne, ma voisine, qui fait semblant en utilisant ces formules approximatives…

Macron a fait une erreur colossale : il a bâti son plan quinquennal sur une hypothèse de croissance de 2 %/an sur 5 ans…nous atteindrons difficilement 1.7 cette année, les années suivantes risquent d’être encore plus moroses, bien plus moroses. Les recettes fiscales ne seront pas au rendez-vous de la maconnerie macronie.

L’inflation grignote un pouvoir d’achat déjà très affaibli, les taxes et les impôts vont accélérer ce processus d’érosion que le savant ministre de l’économie devenu président n’a pas vu venir ni su anticiper, c’est doublement impardonnable.

La récession et l’inflation torpillent un plan mort-né.

Il est incompétent.

Libéral donc passif, impuissant, résigné. Les libéraux n’ont aucune imagination et c’est parfaitement normal puisqu’ils font confiance au « marché », à l'autorégulation. 2007-2008, tu parles d'une autorégulation !

Il faut regarder autour de soi pour bien comprendre que le salut français ne viendra pas des « autres », ni des États-Unis, ni de la Chine et encore moins de l’Europe.

Les pays émergents finissent d’émerger, quand ils ne s’essoufflent pas, leur croissance commence à se calmer, ils ne nous tirent plus vers le haut.

Plusieurs grosses « bulles » risquent de nous péter à la gueule dans un avenir très proche.

Celle du marché obligataire, marché sur lequel les États et les entreprises se financent, le crédit pour faire simple ; celle des valeurs technologiques de type GAFAM ; celle des spéculations financières autour du bitcoin, par exemple, qui voit son cours s’effondrer.

Aux USA la dette sur les prêts automobiles ajoutée à la dette sur les cartes de crédit ajoutées à la dette étudiante, toutes ces dettes de crédit cumulées avoisinent les 4000 milliards de dollars !

La réforme Bâle 3 qui impose un ratio de fonds propres aux banques pour faire face à des crises financières du type  subprimes n’y suffira pas.

L’argent se fait rare malgré des taux avantageux, les banques prêtent de moins en moins facilement, elles anticipent la crise. Les PME et les ETI sont les premières touchées or ce sont ces entreprises qui recrutent.

Les banques centrales, elles,  sont exsangues, la FED a tapé dans ses réserves, la BCE aussi, il a fallu soutenir un capitalisme financier devenu fou et incontrôlable il y a 10 ans. Et ce n'est pas fini...

Les moyens de défense étatiques ou systémiques sont aujourd’hui quasi inexistants, totalement ou presque totalement épuisés.

Les tensions sont palpables, il suffirait d’une toute petite étincelle pour faire exploser la planète, c’est ce qui plombe l’ambiance.

Certaines valorisations boursières font peser un risque énorme sur l’économie mondiale quand on sait, par exemple, que la capitalisation boursière d’Apple ajoutée à celle d’Amazon est égale au PIB de la France…

Apple s’enrhume, Amazon tousse comme ce fut le cas il y a peu pour Facebook et c’est l’économie mondiale qui bascule dans la crise.

Il n’y a pas que ces valeurs boursières, répétons-le, une dizaine d’autres groupes gigantesques, les « géants du web »  font l’objet de spéculations effrénées, elles aussi  :  Airbnb, Alibaba, Google, LinkedIn, Microsoft, Netflix, Twitter, Uber, Yahoo…

Nasdaq où NSE, peu importe, le volume de transactions et leur montant sont totalement déconnectés de l’économie réelle, il n’y a pas de contrepartie possible, pas de « couverture », impossible de se protéger, c’est fini.

Une crise peut en cacher une autre…certains économistes n’excluent pas que toutes ces bulles explosent en même temps ou les unes après les autres…c’est une question de semaines ou de mois, prophétisent-ils.

Ces différents facteurs de risque s’ajoutent à un climat économique français et européen délétère, exception faite de l’Allemagne qui, a elle seule, ne pourra rien faire malgré ses 30 milliards d’excédents commerciaux, Merkel est pieds et poings liés à l’UE, son destin ne lui appartient pas. Le maître est devenu l’esclave des cancres, fin de l’histoire. Du Hegel pur jus.

C’est cette concomitance de risques qui pèsent sur l’économie française comme une menace et qui expliquent que les 4 prochaines années du quinquennat Macron ne peuvent pas être autre chose qu’un échec économique et social qui s’ajoutera à la déconfiture politique à laquelle nous assistons depuis 1 an, déconfiture qui a commencé avec le président des riches et qui s’est illustrée, cet été, par l’affaire Benalla pour se conclure, piteusement, par le départ en vacances de monsieur Hulot.

Il ne pourra pas redresser la barre, c’est sa stratégie politique qui est en cause, Jupiter est têtu et orgueilleux.

C’est d’ores et déjà terminé.

À nous maintenant d’envisager l’avenir.

Un avenir qui doit impérativement commencer par une stratégie de rupture.

PS : Macron, le libéral, slalome à droite, point Barre ! Barre avec un "B" majuscule...vous l'aviez ? ma modestie, doit-elle en souffrir, s'efface devant cette formule qui continue de me plaire. C'est de l'autosatisfaction...un peu comme Macron...aïe, aïe, aïe ! Pardon.

Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.