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Billet de blog 16 août 2014

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L'irrésistible insignifiance de François Hollande.

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Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

"A chaque terrible époque humaine, on a toujours vu un monsieur assis dans un coin, qui soignait son écriture et enfilait des perles" : Paul Valéry a raison, l'époque est terrible, après  2 années passées à la tête du pays, un constat s'impose, Hollande perd son temps et le nôtre, les signes s'accumulent, les preuves son accablantes, il n'est pas à la hauteur de la situation.

Définitivement.

Quelles images de lui nous renvoyaient les rétroviseurs avant son élection ? 

Premier secrétaire du parti socialiste de 1997 à 2008, un véritable exploit en terme de durée malgré l’âpreté des combats entre "chers camarades" et trans-courants, l'homme a la solide réputation d'être passé maître dans l'art de la "synthèse molle" : en 97 c'est le candidat idéal !

On a besoin de sérénité, on recherche un consensus, il faut apaiser les esprits, calmer les ambitions en les mettant entre parenthèses, fuir les débats de fond sur l'Europe, sur la réponse socialiste face à l'économie libérale triomphante, bref, esquiver tout ce qui pourrait diviser : en 97 c'est l'homme de la situation !

Quatre ans plus tard, en 2011, Ségolène Royal n'est plus crédible, DSK est en peignoir, Fabius n'y croit plus vraiment, Montebourg, Valls et Hamon sont des candidats de façade, Baylet n'existe pas, n'a jamais existé, les primaires socialistes se choisissent un candidat par défaut, un nom sort de nulle part, Hollande !

L'illusion démocratique lui confère une sorte de légitimité qui lui aurait été interdite dans d'autres circonstances ; c'est d'ailleurs le leitmotiv de Hollande, sa signature, l'opportunisme, c'est à dire cette inépuisable capacité à se faufiler, le "pas vu pas pris" qui lui tient lieu de stratégie, il arrive à surprendre car il sait se faire oublier, il devient l'ombre de son ombre.

On ne combat pas un fantôme, Fabius aurait du se méfier, lui le fils spirituel de Mitterrand...

Il contemple le cadavre de ses ennemis, il a gagné, non pas parce qu'il est le meilleur ou le plus fort, mais parce qu'il n'a plus d'adversaire.

Hollande tiendrait sa force du chaos, comme une maladie opportuniste ; il n'a jamais été ministre.

Aubry reste bouche bée, sonnée, elle qui le connait si bien...

Effectivement on aurait du se méfier, ses détracteurs, aussi nombreux à gauche qu'à droite, nous avaient pourtant prévenu, "Flanby", "pépère","fraise tagada" pour les uns, "culbuto" ou "Guimauve le conquérant" pour les autres, la meilleure formule à mes yeux, la plus percutante...des noms d'oiseaux aussi...tous dénonçaient, dans une terrible unanimité, son incapacité viscérale à décider, à choisir, à trancher ; un consensus qui aurait pu nous alerter.

"A-t-on jamais caché un éléphant derrière une fraise des bois ?" interrogeait Fabius, goguenard et sûr de son destin.

Mais le consensus est suspect...

Tous ceux qui, malgré tout, ont voté  pour lui n'ont rien à se reprocher ou pas grand chose : d'une part ils n'étaient pas obligés de croire Fabius ou Aubry, ses compétiteurs directs, quand ils le critiquaient, encore moins ses adversaires, naturellement beaucoup plus suspects ; d'autre part il fallait sortir du Sarkozysme coûte que coûte ; ce qui reste, d'ailleurs, toujours d'actualité, malheureusement...mais c'est un autre débat.

Il faut se souvenir de ses mots prononcés au Bourget :

"Je vais vous dire qui est mon adversaire, mon véritable adversaire...il n'a pas de nom, pas de visage, pas de parti. Il ne présentera jamais sa candidature. Il ne sera pas élu. Et pourtant, il gouverne", puis il ajoute "Mon adversaire, c'est le monde de la finance".

Et encore :

"En 20 ans, la finance a pris le contrôle de nos vies. En une fraction de secondes, il est désormais possible de déplacer des sommes astronomiques, de faire tomber les banques. Les G20 se sont succédé sans résultat tangibles. En Europe, seize réunions de la dernière chance n'ont jamais rien donné. Les banques, sauvées par les Etats mangent la main de ceux qui les ont nourri. Ainsi la finance s'est affranchie de toute règle, de toute morale, de tout contrôle"

 La majorité des Français qui a placé Hollande à la tête du pays a donc deux circonstances atténuantes qui se font face : à ma droite Sarkozy, à ma gauche ce discours "de gauche"...la saturation voire l’allergie d'un côté, l'espoir de l'autre, un espoir timide, nuancé mais un espoir quand même.

Mais «Ce n'est pas parce qu'avant on avait un président qui a hystérisé la politique que maintenant il faut la chloroformer.», Jean-Luc Mélenchon n'est pas tendre et dénonce ce "capitaine de pédalo incapable d'affronter la tempête"...

Sarcastique, méchant, drôle et juste.

Devant des millions de Français qui l'écoutaient ce soir là, face à son adversaire, nous l'avons entendu dire qu'il allait renégocier le traité Européen, que Merkel n'avait qu'à bien se tenir, qu'on allait voir ce qu'on allait voir...on a vu !

Au lendemain de son élection il prêtait allégeance à la toute puissante Allemagne. 

On aurait du se méfier, sa lâcheté politique à l'égard de l'Europe se cachait (mal) dans ce faux consensus qui a fait suite au référendum sur la Constitution Européenne, en 2005 l'éviction de Fabius, alors N° 2 du PS, était déjà la preuve d'une totale soumission aux schéma directeur de l'UE. Il était à la tête du PS, là où il fallait gommer les aspérités à tout prix, à sa place donc.

La finance était son ennemi ? sous la menace des "pigeons" il cède puis recule encore et sans pudeur devant Gattaz.

Les renoncements, les reniements, les contradictions, les corrections, les "ajustements" s'ajoutent les uns aux autres, une suite sans fin...l'amateurisme de ses réformes est presque systématiquement sanctionné par le Conseil Constitutionnel.

Il n'a ni le "fond" ni la "forme"...

Quelques changements de montures de lunettes plus tard, le cheveux plus noir encore, on le voit s'agiter, gesticuler, multipliant les conférences de presse dès qu'il s'agit de saisir l'émotion publique, de la prendre à témoin, le crash d'Air Algérie dont on parle moins aujourd'hui...

Terrible calcul, sinistre impuissance, désespérante communication, cynisme d'autant plus révoltant qu'il viendrait d'un homme "de gauche"...

Son opportunisme légendaire, sa capacité à passer entre les mailles du filet, son optimisme béat, en résumé tout son parcours, lui font dire que la courbe du chômage s'inverse puisque la pente devient moins raide, que la croissance est sur le point de revenir, que la France tiendra son rang de 5e puissance économique mondiale.

Lui qui comptait sur les événements pour lui donner raison voit tous ses arguments tomber les uns après les autres, il ne peut plus se raccrocher aux branches, il va tomber comme un fruit mur, comme un fruit blet, dans le froid glacial de la déflation qui s'annonce, qui souffle déjà.

Nous avons eu ce débat dans ces colonnes, Hollande n'est pas néoconservateur, il n'est pas social-démocrate, il n'a rien de gauche, en tout cas pas au sens politique ; en termes de maladresses on peut en discuter.

Hollande est une illusion perdue d'avance, née sur les cendres d'un socialisme qui n'a pas su se réinventer, sous les décombres d'une Europe en cours de déconstruction et prisonnière de ses croyances.

En d'autres termes, il est tout petit.

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