Le 14 décembre je publie un petit billet intitulé « Miss France incarcérée à la prison de la Santé ».
Derrière ce titre racoleur, si ce n’est provocateur, en lien avec une double actualité – l’élection de Miss France et l’incarcération de Claude Guéant – le sujet du billet devient parfaitement compréhensible, ou plus compréhensible dès la troisième ligne, au second paragraphe : « La justice a donc tranché : pas de peine de substitution, pas de sursis pour ce délinquant de haut vol qui accumule les handicaps dans le sillage de son mentor, ancien président de la République sèchement battu par François Hollande en 2012. »
En employant le masculin et en parlant de Sarkozy, je fléchais Guéant.
Parfaitement conscient des risques liés au double sens, je crois utile, en plus, de désamorcer un éventuel retour de bâton de la part du Comité Miss France et/ou de la nouvelle Miss en ces termes : « Je plaide l’indulgence du Comité Miss France qui saura faire la part des choses, je suis tout disposé à présenter mes excuses les plus plates à Diane si elle me le demande gentiment… »
Je n'ai d'ailleurs pas reçu d'alerte ou de mise en garde en provenance de l'une ou de l'autre.
Pas de quiproquos possibles donc, ma seule motivation est de faire le maximum de publicité à la condamnation de l’homme à tout faire, de l'exécuteur des basses œuvres de Sarkozy qui vient d’être embastillé grâce, notamment, à l’excellent travail d’investigation de Médiapart et de Fabrice Arfi : je suis absolument sidéré et ulcéré par le silence de BFM, de LCI, de CNEWS, de TF1, de France 2 et de toute la presse mainstream, leur discrétion (entrefilet, bande défilante, mais aucune chronique) est un aveu de complicité active face à des délinquants politiques de haut vol qui passent leur temps à gruger les citoyens-électeurs-contribuables que nous sommes.
Lutter contre la connerie envahissante consiste d’abord et avant tout à lutter contre toutes les formes d’abus de pouvoir, c’est le positionnement de ce modeste blog.
Je suis donc une chambre d'échos, un humble relais de Fabrice Arfi, de Karl Laske et de toute l’équipe chargée des investigations de Médiapart, j’utilise mes armes habituelles, la dérision, l’ironie et l’humour, je pense en effet que le rire est essentiel, une arme redoutable, je m’approprie ce qu’en disait Cabu « Il n’y a pas de limites à l’humour qui est au service de la liberté d’expression, car, là où l’humour s’arrête, bien souvent, la place est laissée à la censure ou à l’autocensure ».
Nous y sommes !
Hier, je reçois un premier message du Club qui me propose de préciser qu’il s’agit d’un billet d’humour, ce que je fais immédiatement « Billet d’humeur et d’humour », une formule que j’ajoute au chapô.
Je reçois un second message qui me propose, cette fois, de modifier le titre, ce que je fais en substituant à « Miss » sa traduction française en « Mademoiselle ».
J’en profite pour adapter le corps du texte, ici ou là, sans perdre trop de cohérence avec l’esprit du billet afin de prendre en compte les réserves émises par Le Club qui m’explique être assailli de messages véhiculés par des internautes « Si nous faisons comme vous le pari de la bienveillance et de l'intelligence des lecteurs, nous avons constaté à plusieurs reprises que des billets dont les contenus étaient tout à fait conformes à notre charte de participation pouvaient être mal interprétés et relayés de manière biaisée en raison de leur titre. C'est même un phénomène très courant sur les réseaux sociaux - qui peut générer des incompréhensions, des signalements, voire des plaintes. Pourriez-vous donc modifier le titre en plus du chapô d'ici ce soir à 19 h ? Ce billet commence à beaucoup circuler et les risques de malentendus sont élevés. »
Je suis un lecteur assidu de Médiapart, de Martine Orange, de Laurent Mauduit, d’Edwy Plenel et bien sûr de Fabrice Arfi, de Karl Laske et de bien d’autres encore ; je suis aussi un bloggeur qui avance à visage découvert, sous mon vrai nom ; quand je fais l’objet d’attaques, cela m’arrive, je ne tombe jamais dans la surenchère ni dans les pièges de l’agressivité et de l’outrance, de ce point de vue, Sarah Bosquet qui me sollicitait au titre de ces échanges pour Le Club a raison de faire comme moi le pari de l’intelligence et de la bienveillance, je la remercie de me le reconnaître.
Quand on prétend vouloir lutter contre la connerie envahissante, il faut essayer d’échapper tant que faire se peut à ses pièges, ce n’est pas toujours facile, on est toujours le con de quelqu’un, parfois de soi-même, je sais de quoi je parle…
Il n’est pas question ici de faire le procès du Club et encore moins celui de Médiapart : je suis attaché à ce « journal », à son positionnement et, j’ose le dire, à son ambition qui est de lutter contre l’apparence des choses, source de manipulations et d’abus en tout genre, il y va de la santé de la démocratie, c’est une lutte permanente d’autant plus dure que la presse mainstream est devenue la propriété des amis de Nicolas Sarkozy et/ou d’Emmanuel Macron, c’est un fait incontestable, on le voit bien dans le traitement de faveur réservé à Claude Guéant, motif de ce billet.
Médiapart fait exception avec générosité puisque nous avons tous, es qualité d’abonnées, le droit de nous y exprimer, c’est le dernier espace de liberté pour les « invisibles » que nous sommes, apprécions à sa juste valeur ce que cela représente.
Il n’en reste pas moins que cet épisode nous oblige à un triste constat : la pression que nous venons de subir, Le Club et moi (j’insiste sur l’association des deux) nous a conduits à faire des concessions à la connerie envahissante qui, de ce fait et pour cette raison, vient de marquer un point, un point de plus !
J’ignore qui sont ces internautes dont parle Sarah, je ne sais pas mesurer l’ampleur du bataillon, leur pouvoir de nuisance, je ne sais qui ils sont, je devine les menaces, Sarah ne les invente pas.
Au titre de la liberté d’expression, du droit à l’intelligence qui reste une option improbable pour ces internautes fantômes et anonymes, je dis que cette petite défaite nous oblige à renforcer notre vigilance et à raffermir notre pugnacité.
Je laisse le soin à mon Maître, Pierre Desproges, de conclure prudemment et sobrement : « Testis unus, testis nullus, on ne va pas bien loin avec une seule couille ».