L’anti-Sarkozysme est né le 29 avril 1983, le jour de son élection à la mairie de Neuilly-sur-Seine, élection rendue possible grâce à des coups fourrés, à des reniements et à de multiples trahisons.
A Neuilly-sur-Seine la première victime s’appelait Charles Pasqua, encore convalescent, d’autres, après lui, dans son propre camp, ont subi ses attaques, méticuleusement préparées, souvent voilées, toujours sournoises, Chirac notamment. Fillon aussi qu’il méprisait intensément et publiquement car Sarkozy adore plus que tout l’humiliation, surtout si elle est publique.
Sarkozy est un tueur froid et obsessif.
Nul ne sait si le coup que lui a porté, hier, son électorat va mettre (enfin) un terme définitif à son existence politique mais une chose est certaine, les allergènes sont tellement puissants, polymorphes et toxiques qu’ils font maintenant partie de l’ADN politique de chaque Français doté d’une mémoire saine et en âge de voter.
Fort à parier que l’anti-Sarkozysme survivra à sa mort politique et ne disparaîtra que le jour de ses obsèques et encore…cet homme qui a fait du clivage et de la provocation en tout genre les bases de sa stratégie politique suscite mépris ou haine, ses scores, hier, dans les Alpes Maritimes et dans les Hauts de Seine sanctionnent le parcours d’un traître dont tout le monde se méfie.
Sa « famille » politique se bouchait le nez, aujourd’hui elle recrache le morceau. Hier il faisait illusion, il faisait encore peur.
Cette allergie à l’homme, au politicien et à l’affairiste notoire ont motivé des électeurs de gauche à aller voter : 15 % des votes exprimés, environ 600 000 personnes, pas négligeable voire significatif.
Ils ont voté pour qui ?
Certainement pas pour l’ultra libéral et très conservateur Fillon, impossible, en effet, de soutenir ce Chrétien militant, ennemi déclaré du mariage gay (et de l’adoption) et concubin de la Manif pour Tous.
Le programme de Fillon est susceptible de bloquer le pays indéfiniment et de le ruiner encore plus sûrement qu’il n’avait réussi à le faire entre 2007 et 2012, son record de 1750 milliards d’euros de dette publique - + 750 milliards - risquerait d’être enfoncé dans des proportions intolérables pour les Français, inadmissibles pour l’U.E.
« La France est en faillite » disait-il 6 mois à peine après avoir été nommé, c’est donc en toute connaissance de cause qu’il a continué à creuser le trou, il recommencera, la récidive est inscrite en toutes lettres dans son programme qui ne trouvera de financement que dans le surendettement.
Juppé et ses équipes de technocrates vont expliquer cela en détail, ils ont des arguments.
Non, les anti-Sarkoziste sont allés, majoritairement, soutenir le maire de Bordeaux, les lèvres pincées, du bout des doigts, en faisant le pari qu’il saura naviguer (et négocier) entre une tentation libérale et ses racines gaullistes, enfin, ce qu’il en reste…
Il fallait éliminer Sarkozy dont Juppé avait fait son adversaire prioritaire.
Le programme de Fillon est une chance pour la gauche et pour tous les démocrates de progrès : un véritable repoussoir, comme un chiffon rouge.
Le Thatcher Français va devenir la cible unique de toutes les critiques y compris dans son propre camp.
L’allergie à la personne de Sarkozy va laisser place à une allergie à un programme ultra libérale dont les Français connaissent les limites et les excès, pour une partie d'entre eux.
N’oublions pas que si Fillon a gagné la primaire de la droite et du centre, il n’a pas encore gagné la Présidentielle.
Il reste 6 mois pour expliquer, et faire comprendre, que le « modèle Français » est strictement incompatible avec le programme de Fillon, comme l’eau et le feu.
Demain Juppé va commencer le travail, à nous de le poursuivre.
La victoire de Fillon, pour surprenante qu’elle soit à ceci de rassurant : son ambition ultra libérale va cristalliser sur lui un niveau d’alerte générale et de vigilance absolue que personne n’attendait plus.
Le renaissance démocratique autour d’un nouveau modèle Français pourrait venir de là, de cette probable et très souhaitable révolte populaire qui commence toujours par un rejet massif.