Tester la liberté d'expression est un signe de santé et révélateur d'un malaise.
Adepte d'un certain manichéisme ambiant qui a tendance à simplifier le débat et républicain de conviction, j'ajoute ma voix à celle de la foule: pour la liberté d'expression ! pour la liberté de pensée !
Une bonne chose de faite !
Caricaturer le Prophète en réponse à une interprétation délirante et pathologique de l'islam, pourquoi pas ?
Une fois, deux fois, trois fois...bon, d'accord, mais on peut peut être passer à autre chose, non ?
Se renouveler, ce ne sont pas les sujets qui manquent.
S'acharner sur Mohamed et faire de ses caricatures le symbole de la lutte pour la liberté d'expression n'a plus de raison d'être, au-delà d'une certaine limite, le caractère répétitif de ces dessins pourrait, peut devenir suspect.
Charlie a gagné son procès (dans une parfaite solitude et une quasi indifférence générale), le droit a parlé, ils ont payé beaucoup trop cher le prix de cette victoire juridique, j'en pleure encore.
J'ajoute que si je sais que je fais de la peine à 80 % de mon auditoire, ou à 99 % même si ce n'est pas seulement une question de proportion, je décide, en toute liberté de conscience, de ne pas blesser des gens que je dis respecter.
Pas besoin d'un juge pour savoir jusqu'où je peux aller.
Il y a bien d'autres sujets qui mériteraient que nous nous interrogions
J'en propose un :
Au titre de la liberté d'expression, au titre de la liberté de la presse, je souhaite que soit publier la liste nominative de tous les français qui ont acheté du "Madoff", cet escroc qui purge une peine de 150 ans de prison pour avoir monté une pyramide de Ponzi, une technique d'escroquerie qui remonte à la nuit des temps.
Savoir que Mme Dupont et Monsieur Martin se sont fait avoir ne m’intéresse pas, j'ai même tendance à les plaindre, ils ont le droit de croire aux mirages de la bulle financière que les médias décrivent avec autant de plaisir que de gourmandise, ils n'y connaissaient rien, ceci peut expliquer cela.
Cela étant, la cupidité restera.
Par contre, savoir qui, parmi les 100 premiers managers français, banquiers, industriels, hommes d'affaire et autres milliardaires a pensé pouvoir s'enrichir encore un peu plus et plus vite, toujours plus vite, oui, ça m’intéresse beaucoup.
Car ce sont eux qui détiennent le vrai pouvoir, c'est avec eux que se décident nos salaires, nos retraites, nos indemnités de chômage et tout le reste.
Avec eux ?
Non, ils décident de tout, hier en concertation avec les syndicats et l'Etat, maintenant avec une certaine arrogance, seuls, omnipotents.
Le pouvoir politique et démocratique a cédé du terrain face au libéralisme triomphant, or le libéralisme c'est eux, ils ont un visage, ce sera plus facile pour la caricature...
Eux savent, polytechniciens, énarques, on parle d'élites, non ? des gens parfaitement informés...non ?
Pas beaucoup de Martin, très peu de Dupont.
Savoir que nous avons des gens à la tête du CAC 40 (mais pas que) qui ont tenté le "coup Madoff", vite fait, en passant, oui, j'aimerai savoir.
Mais ces clowns qui nous gouvernent n'ont pas d'humour, ils ont de l’orgueil, ils invoqueront la bourse, les actionnaires voire "leurs salariés" pour continuer de se planquer, trop peur de la honte, trop peur de ces rires que j'entends déjà...
Je fais un pari : la liste ne sortira pas, elle ne sortira jamais.
Si j'ai raison, un constat s'imposera : c'est beaucoup plus facile de caricaturer Mohamed que de caricaturer le "libéralisme".
Si, par bonheur, j'avais tort, un autre constat s'imposera : c'est aussi dangereux de caricaturer le libéralisme que de caricaturer le Prophète.
Chercher l'erreur.