-"Jean-Pierre, c'est moi, Jean-François"
-"Jean-François qui ?" demande Elkabbach qui ne reconnait pas (plus) Copé
-"C'est moi, Jean-François Copé, tu me reconnais oui ou merde ?"
-"Là oui, je te reconnais Jean-François", Elkabbach n'ajoute rien, il sait que l'homme est aux abois depuis l'article de Libération qui prouve que la surfacturation de Bygmalion dépasse 20 millions €...
-"Jean-Pierre, j'ai besoin de toi, il faut que tu me donnes une tribune, j'ai besoin de clarifier un certain nombre de choses, de rétablir MA vérité...enfin, tu vois ce que je veux dire...en ce moment c'est un peu difficile pour moi"
-"Non, je ne vois pas...enfin si je vois bien mais je ne peux rien faire pour toi, tu as dépassé un point de non retour, je t'avais prévenu...et puis je n'ai pas envie qu'on m'accuse de complaisance avec toi"
-"De complaisance ?! non mais tu déconnes ou quoi ?" s'insurge Copé, étranglé de rage il lâche "Tu as quand même facturé 7564 interviews pour nous...enfin je veux dire pour Bygmalion, entre Mars et Mai 2007, tu n'as pas oublié, non ?"
-"7564, tu es certain du chiffre? ça me parait un peu élevé quand même" lui répond le Jean-Pierre dans un éclat de rire qui n'en finit plus...
-"Je te préviens gentiment, Jean-Pierre, si tu ne veux pas m'inviter à la matinale d'Europe1 lundi matin à 8h30 je balance tout sur toi, sur Arnaud (Lagardère), sur Europe, tu sais que j'en ai des tonnes sur vous, je te préviens, Jean-Pierre, ou tu m'invites ou je balance tout, c'est simple"
Jean-Pierre Elkabbach est inquiet, il sait que Copé est désespéré, il sait aussi que sa femme, Nadia, le quittera si jamais il n'arrive pas à se maintenir à la tête de l'UMP en vue des Présidentielles de 2017, il veut tester Copé sur son pouvoir de nuisance...il y a peut être un scoop à tirer, il sait que Copé est prêt à tout...
-"Jeff, dis-moi, tu as des dossiers, je ne sais pas moi, sur Nicolas par exemple, sur Kadhafi, je ne sais pas moi, ou sur Karachi, ou sur l'affaire Bettencourt, sur le financement de la campagne de 2007 ? je te pose la question parce que, après tout, couler pour couler, autant ne pas couler tout seul, tu dois en connaître des secrets...alors là, oui, on pourrait peut être regarder tout cela d'un peu plus près...si non, tu sais, ton histoire personnelle, tout le monde la connait et de toute façon elle n’intéresse plus personne, on s'en cogne"
Jean-François reste muet, il réfléchit à la proposition d'Elkabbach, le deal est simple : des révélations, une bombe pour sauver sa peau...
-"Tu vois ça comment ?" demande Copé à Elkabbach.
-"C'est simple, je te propose de soulager ta conscience à l'antenne et..." Elkabbach n'a pas le temps de terminer son scénario "C'est d'accord", oui, c'est exactement ça, j'ai besoin de soulager ma conscience, j'en ai gros sur la patate, je suis quelqu'un de bien, mon image ne correspond pas à la réalité de tout ce que je vis et ça c'est putain crédible..." Elkabbach ne dit rien mais n'en pense pas moins, il attend que Copé intègre toutes les composantes de son stratagème.
Copé poursuit :
-"Je peux te le dire à toi, JP (prononcez ji-pé), c'est moi qui avais demandé à Buisson d'enregistrer Nicolas, je sais tout, c'est du lourd, du très lourd, tu ne peux même pas imaginer...je connais aussi les histoires de cul de Nicolas, même avec DSK ! si, si, j'te jure, par exemple avec cette journaliste Laurence Maserati...euh Fiat ou Renault je ne sais plus comment elle s'appelle"
-Ah oui ?" lui demande innocemment Elkabbach
-"Tu parles ! sur Kadhafi, par exemple, Ziad (Takieddine) m'a donné 4 cd dans lesquels on voit Brice (Hortefeux) et Claude (Guéant) recevoir des mallettes bourrées de biftons de 200 €, pleines à craquer les mallettes, ça débordait de tous les côtés, tellement que quand on a tout recompté on ne pouvait plus les fermer...d'ailleurs je me souviens que Brice avait cramé au soleil au bord de la piscine, rouge comme une écr..." "on s'en fout des coups de soleil d'Hortefeux" coupe sèchement Elkabbach qui, en bon journaliste sait faire la différence entre une vraie bonne info et une mauvaise...
Copé ajoute :
-"Sur Mamie Bettencourt on a même un petit film ou on voit Nicolas à genoux en train de..." les bruits de la rue couvrent soudainement la voix de Copé, Elkabbach, intrigué lui demande :
-"Mais Jean-François, tu es où là, en ce moment, tu me parles d'où putain ?"
-Je suis dans la rue, en bas de chez moi, tu sais je fais attention, je ne veux pas inquiéter Nadia..."
Elkabbach entend le rugissement furieux d'une moto qui approche puis un claquement sec, assourdissant "Pan !", suivi d'un autre bruit plus sourd...comme celui d'un corps qui tombe...plus rien...
"Allo, Jean-François ? Jean-François ? réponds-moi Jeff, allo ?
Elkabbach raccroche, l'air pensif, il est triste.
Il vient de louper le scoop de sa vie qui aurait relancé une carrière commencée en 1961, il y a 53 ans...