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Billet de blog 24 mai 2023

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De l’aube au crépuscule, la Résistible Ascension de Colinas Krasozy

Du 24 janvier 1955, date de sa naissance, jusqu’au 11 février 1956, les natifs héritent d’un signe astral assez peu enviable en vérité : c’est l’année de la chèvre en bois ...

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Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

Du 24 janvier 1955, date de sa naissance, jusqu’au 11 février 1956, les natifs héritent d’un signe astral assez peu enviable en vérité : c’est l’année de la chèvre en bois.

Si le destin avait été moins capricieux, plus inspiré, plus généreux peut-être, il serait né en mars 1991, le bois devenait or …sa frustration viendrait de là : il n’aura de cesse de traquer le lingot pour réparer cette outrageante injustice et conjurer le mauvais sort qui vient des astres chinois.

Traque qui l’emmènera jusque dans l’orient moyen, la Libye d’abord, le Qatar ensuite.

Sa petite taille – 166 centimètres – a aggravé son amertume et exagéré son ambition : il se croyait un destin d’empereur, tout jeune il dessinait cette couronne, ce diadème orné de diamants, de rubis et d’émeraudes, qui lui irait si bien tout en le grandissant.

Pour régner, il lui fallait un peuple, soit !

Il n’ignorait rien du pouvoir après avoir fait ses classes et réciter ses gammes auprès de son mentor, un vieux Corse redouté autant que retors, ancien vendeur d’anisette reconverti dans l’action civique, Fabienne Boulin-Burgeat, fille de feu Robert Boulin, pourrait en attester : c’est avec lui qu’il apprit à dire le contraire de ce qu’il faisait en flirtant, la nuit venant, quand les lumières s’éteignent, avec le Diable pendant que bigots et bigotes dorment d’un sommeil agité par les cris rauques des couples homosexuels en rut qui grattent aux portes de leur mairie, pas loin de l’église et de l’école Sainte-Marie.

La lumière noire est son soleil.

Armé d’un Karcher, il promettait de tout nettoyer, de tout purifier, afin de proposer aux bonnes gens une vie plus conforme à leurs aspirations profondes : purée-pomme de terre, rôti de porc, saucisson à l’ail, jambon de Bayonne avec cornichons, beaucoup de cornichons.

Difficile, en effet, d’accéder aux sommets sans l’aide d’une foule de cornichons noyés dans un bain de vinaigre blanc.

Sans oublier le dessert, une gouleyante religieuse au café, surtout pas au chocolat dont la couleur lui fait faire des cauchemars.

Après avoir réussi une mystérieuse, mais très juteuse affaire immobilière à Neuilly, sur une petite île lâchement abandonnée des pauvres, le voilà aux portes du Pouvoir.

La chèvre en bois plaquée or fait illusion, il trompe son monde comme personne y compris ceux qui lui ont tendu la main qu'il croque par impatience avec férocité : le vendeur corse d’anisette, devenu manchot après avoir été cocufié, lui céda le mirador de Neuilly d’où il pointa ses flèches sur Paris, ville voisine.

Il transperça le cœur du chef du Village après avoir volé celui de sa fille : s’ensuivit une haine tenace entre le hobereau parisien et la chèvre de bois plaqué or qui régnait sans partage sur les Neuilléens argentés et donc émerveillés devant tant d’arrogance.

De quiproquos en malentendus, de magouilles saumâtres en coups tordus, le voilà arrivé là où il se rêvait, il tue le père et devient grand calife à la place du grand calife.

Il aime tellement les califes qu’il n’hésite pas à les inviter à planter leur tente bédouine dans les jardins de l'hôtel de Marigny.

David a vaincu Goliath et côtoie maintenant le gratin du terrorisme mondial, l’élite des dictateurs en djellaba et quelques milliardaires, ses meilleurs amis.

Ils seront reconnaissants : Ali Baba, sorti de sa grotte neuilléenne, palpe son magot, compte ses pièces d’or et se dit qu’il est bien loin le temps de la chèvre en bois, il décide qu’il aurait pu naître en mars 1991, qu’il aurait dû naître en mars 1991, qu’il est né en mars 1991.

De là où il est, il pense qu’il peut tout faire, tout inventer, tout recréer, tout se permettre.

Il réécrit son histoire. Et la nôtre.

Sa chèvre est en or massif.

L’autre chèvre est reléguée dans un hangar, loin des regards, dans une indifférence complice de médias asservis.

Une chèvre en bois outragée, une chèvre en bois brisée, une chèvre en bois martyrisée, mais une chèvre en bois libérée qui interpelle les lois du royaume « Mais enfin, mesdames, messieurs, n’y a-t-il pas là quelque chose qui vous choque ? D’où vient mon infortune ? D’où vient son incroyable richesse ? Êtes-vous sourds et aveugles à ce point ? ».

Les chèvres en bois sont têtues.

Le bêlement de la pauvre chèvre en bois est finalement entendu malgré les efforts déployés par une presse majoritaire qui tente de l’étouffer avec un énorme édredon rempli de silences épais et denses, ils s’y mettent à plusieurs et se relayent nuit et jour pour faire taire cette maudite bête.

Pour cette presse l’enjeu est de taille : il se trouve que par un curieux hasard bien pensé, bien organisé, bien orchestré aussi, cette presse est la meilleure amie des amis de Colinas Krasozy, la chèvre en or…comment faire ?

Dire la vérité ? Ils se tireraient une balle dans le pied ! Un suicide, en fait.

Mentir, alors ? Pas crédible !

Ne rien dire, donc !

La France de Colinas Krasozy, la presse de Colinas Krasozy a enfanté d’un serpent de feu né le 21 décembre 1977.

Et après-demain ?

La vraie, la seule question que nous devons nous poser est simple : comment sortir de ce système vieux de plus de trente ans qui s’autoalimente et s’enrichit par mille bouches avides qui saisissent leurs proies grâce à des tentacules médiatiques à ventouses venimeuses ?

Ne laissons pas quelques journalistes indépendants, Fabrice, Karl et quelques juges isolés seuls face à ces monstres hideux.

Ne soyons pas complices !

« Ce qui rend la corruption, ou même la simple médiocrité des élites, si funeste, c'est la solidarité qui lie entre eux tous leurs membres, corrompus ou non corrompus, dans la défense du prestige commun. » De Georges Bernanos dans Le Chemin de la Croix-des-Ames.

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