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Billet de blog 24 juillet 2014

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Les 7 péchés capitaux selon Edwy.

Je reviens sur la lettre ouverte d'Edwy Plenel à François Hollande à propos d’Israël et de la Palestine.

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Je reviens sur la lettre ouverte d'Edwy Plenel à François Hollande à propos d’Israël et de la Palestine.

Premier constat à l'attention de ceux qui pensent que cet article est beaucoup trop long : si Edwy Plenel avait rédigé un article extrêmement condensé, de 6 à 10 lignes environ, je ne l'aurais pas lu ; ni vous non plus, probablement. On attend d'Edwy Plenel plus qu'un simple paragraphe. Avoir du recul, prendre le temps d'organiser et de mettre en forme ses arguments sur un tel sujet, y consacrer 4 pages ne me semble pas complètement inutile, l'état d'Israël a derrière lui 67 longues années de conflits extérieurs et de crises internes, il est né de la Shoah, 4 pages pour développer ses arguments dans un tel contexte, émotionnel et historique à la fois, n'a rien d'extravagant pour quelqu'un qui est censé avoir de la mémoire. L'amnésie accompagne souvent l'excès de vitesse qui rend les raccourcis accidentogènes. Prenons le temps de débattre. 

Deuxième constat : le résumé de cet article mentionne clairement qu'il s'agit d'un "Parti pris en forme de lettre ouverte". Ceux qui ne partagent pas l'analyse d'Edwy Plenel, ceux là même qui jugent l'article trop long, lui reprochent son "parti pris"...je ne sais pas si l'article est démesurément long (trop long pour qui ?) en tout cas, il s'agit bien d'un parti pris qui s'assume comme tel, c'est même écrit en toute lettre ! soyons attentifs aux mots ! soyons attentifs aux maux ! Ce qui m’intéresse, ceux qui m’intéressent, sont les arguments, les idées qui s'opposent à celles de Plenel, pas les anathèmes, pas les insultes, pas les accusations.  Historique pas hystérique, émotionnel pas passionnel.  

Pas facile, c'est certain.

Troisième constat : la France compte environ 4 700 000 musulmans et 550 000 juifs, c'est une spécificité qui n'a pas d'autre équivalent en Europe, c'est ce qui peut expliquer la dimension passionnelle du débat chez nous, peu ou prou nous sommes tous concernés. Pour des raisons familiales et culturelles j'ai un œil sur l'Espagne, sur l'Allemagne, sur les USA, sur le Canada et sur l'Angleterre, il n'y a pas ce type de débat dans ces pays, en tout cas pas avec cette intensité. 

Revenons au fond du débat.

D'abord il ne faut pas oublier que Hollande fait du Hollande, l'homme est tiède, sans charisme, il semble dépourvu de doctrine, sans stratégie, sans vision à moyen et long terme...il avance par à-coups, corrige, revient, accumule les pas de côtés, zigzag, il est flou...on ne le changera pas. Vous le connaissez trop pour vous en étonner encore.

1, une faute politique sidérante.

D'accord avec vous mais avec une nuance : Sarkozy avait initialisé avant lui cet alignement pro israélien , créant de facto une sorte de rupture, c'est d'autant plus remarquable si on se souvient effectivement de l'équilibre revendiqué par le mouvement gaulliste depuis ses origines ; Hollande confirme la rupture politique plutôt qu'il ne la met en oeuvre. Contrairement à ce que j'ai lu, Hollande n'est pas Chiraquien, il pourrait même avoir un petit côté Sarkozyste, c'est dire si, sur ce sujet, il s'est éloigné de son "ami"... 

2, une faute intellectuelle.

Vous avez parfaitement raison, la confusion entre antisémitisme et antisionisme est à mes yeux la pire faute qui soit, un raccourcis dramatique qui, dans le contexte français que je rappelais, risque de nous emmener très loin... extrêmement dangereux en effet !

D'accord avec les développements proposés aux points 3 et 4 ; en revanche j'ai un peu plus de mal avec le "5e péché Hollandais", je vous cite : "Vous avez surtout commis une faute historique en isolant la lutte contre l’antisémitisme des autres vigilances antiracistes".

Je ne suis pas certain de pouvoir vous suivre sur ce chemin même si je suis, comme beaucoup d'autres, d'accord avec l'idée d'être vigilant à l'encontre de toutes les formes de racismes, c'est utile de le rappeler, salutaire. La question juive telle que Marx et Sartre l'abordent, l'antisémitisme transfrontalier, transculturel et notoirement historique tels que les pogroms nous l'enseignent font de l'antisémitisme quelque chose d'unique, quelque chose de très spécifique en effet. Il n'y a pas de "race juive" à proprement parler tout comme il n'y a pas de "race aryenne" quoi qu'en pense Joseph Arthur de Gobineau. Et donc je serais tenté de donner une place à part à la lutte contre l'antisémitisme qui  d'après moi, ne répond pas à la même logique ni aux mêmes "réflexes" que les autres formes de racismes ; les conséquences ne sont pas les mêmes non plus...n'ont pas la même ampleur, c'est l'histoire qui nous le dit, encore hier. C'est plus qu'une nuance...

6, la faute sociale.

Transformer la jeunesse des quartiers populaires en classe dangereuse serait une faute majeure, en effet, comment être contre une telle affirmation ?

Cela étant posé, ce constat global, moralement et politiquement juste, ne rend pas suffisamment compte du désœuvrement idéologique et de la quête de sens qui conduisent une infime minorité de ces jeunes des quartiers populaires et défavorisés, nos jeunes, à chercher des solutions politiques dans une interprétation abusive du Coran. L'extrême droite Israélienne et la coalition qui l'accompagne font de la Cisjordanie et de Gaza un "territoire politique" qui s'exporte un peu partout dans le monde y compris ici, chez nous. Le fait qu'il s'agisse d'une infime minorité ne permet pas de nier ou de minimiser les conséquences qui découlent (ici) de cette politique Israélienne (là), c'est toute la difficulté, me semble-t-il, de la mondialisation du conflit israélo-palestinien qui risque de redevenir un conflit israélo-arabe, ce qu'il a toujours été d'ailleurs. Donc deux écueils à éviter : ne pas généraliser, vous avez raison, mais ne pas minimiser non plus, par "dilution" si je puis dire.

Je tiens à vous redire le plaisir de vous lire, c'est pour ce type de contribution et de débat que je me suis abonné à Médiapart.

Mais Hollande est et restera Hollande, j'en ai bien peur.

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