Il ne s’agit pas simplement du caprice d’un communicant zélé qui voudrait remplacer un sigle – APL– contre un acronyme – AIR – il s’agit de changer radicalement de paradigme : hier on donnait un coup de pouce aux plus démunis, aujourd’hui on donne un coup de main aux plus riches.
Sous la Présidence Macron l’Aide Personnalisée au Logement – APL– sera bientôt remplacée par l’Aide Inconditionnelle aux Riches – AIR – question d’époque et de sensibilité, un choix politique assumé.
« Ave impérator, morituri te salutant » telle est la devise revisitée des députés LREM qui vont devoir soutenir publiquement le décret d’application d’une loi imaginée par des prédécesseurs apeurés en mal de trésorerie, surtout en panne d’inspiration, maladie récurrente au PS.
Claudius ou César, peu importe celui des deux qui exigea des gladiateurs ce salut en entrant dans l’arène ou avant de livrer un ultime combat, Macron a la morphologie d’un petit dictateur capable de s’adapter à n’importe quel type d’uniforme du moment qu’il reflète l’autorité absolue, si jamais la tunique est trop grande, ou trop large, on la fera raccourcir par des mains expertes.
Ce n’est pas l’homme qui est trop petit c’est la tunique qui est trop grande.
« 5 euros par mois, ce n’est pas grand-chose , ce n’est rien » : le montant de la réduction est moins important que le symbole qui s’y attache, c’est en partie vrai, en partie seulement car 5 euros pour ceux qui calculent tout, au centime près, pour savoir s’ils peuvent se payer un repas c’est déjà beaucoup trop, beaucoup plus qu’un symbole.
Réduction de l’APL, augmentation de la CSG contre taxe habitation que personne, où presque ne paye plus, la technique de l’enfumage tourne à plein régime : réforme du droit du travail, plafonnement des indemnités de licenciement, inversion des normes du dialogue social au profit des entreprises, un projet antisyndical, des lois antiterroristes liberticides contre une loi dite de « moralisation » de la vie politique que même les députés LREM fraîchement élus rechignent à voter.
La tactique de l’écran de fumée ou plutôt celle de la carotte et du bâton car il y a quelque chose qui est du ressort de l’infantilisation dans cette démarche, en plus de nous prendre pour des cons on nous prend aussi pour des gamins qui gobent tout, tout cru.
La presse fait ses choux gras de la baisse de popularité du Président qui passe de 64 à 54 % d’opinions positives : nous, ce qui nous étonne le plus c’est de découvrir qu’il y a un français sur deux qui lui ferait encore confiance. Mais que font les abstentionnistes du deuxième tour ?
Un couillon sur deux.
Le libéralisme exige que le pauvre soit tondu à ras, les oreilles bien dégagées.
Et pourtant…
En France la fraude à l’impôt sur les sociétés représente un manque à gagner annuel de l’ordre de 60 à 80 milliards d’euros se répartissant en fraude sur la TVA pour 15 à 19 milliards d’euros, à poids égal avec la fraude sur les revenus, viennent ensuite l’impôt sur les sociétés pour 23 à 32 milliards d’euros, le plus important manque à gagner, et enfin l’impôt sur les patrimoines pour 3 à 4 milliards d’euros.
Pour mémoire le déficit de la sécurité sociale est d’environ 8 milliards d’euros pour 2016…
Pour encore mieux se fixer les esprits le dérapage du déficit français hérité de Hollande et à l’origine des atermoiements macroniens s’élèverait à un peu moins de 9 milliards d’euros à fin 2016…
Les deux cumulés n’arrivent pas à la cheville du manque à gagner sur l’IS des plus grandes entreprises…à moins de la moitié dans l’hypothèse haute !!
Au niveau européen le manque à gagner intra communautaire s’élèverait à 1000 milliards d’euros…
Le taux de contribution effective par taille d’entreprise est tout à fait édifiant : pour les 1 110 000 entreprises de moins de 250 salariés le taux de contribution s’élève à plus de 47 % alors que pour les 12 000 entreprises de plus de 2000 salariés il tombe à 4 %...12 fois moins !!
Pour la Commission Européenne et pour l’OCDE « La moitié des transactions internationales résulterait de transactions intragroupes qui aboutissement à héberger une part conséquente de leurs bénéfices dans des pays fiscalement privilégiés, plus communément dénommés paradis fiscaux ».
Des montages financiers très sophistiqués qui permettent de diminuer drastiquement leur contribution fiscale.
Et pourtant…
Quand il s’agit de changer la loi pour retrouver un peu d’oxygène c’est aux pauvres, aux étudiants, aux emplois précaires et aux plus démunis que ces énarques de malheur pensent en premier.
L’AIR de rien.